Dans La Croix, Nicolas Sénèze tente de définir ce que signifie le terme de "chrétienté" :
"La chrétienté désigne l’ensemble des nations qui, au Moyen Âge,
professaient la foi chrétienne et étaient gouvernées par des princes
catholiques sous l’autorité du pape. Pour certains catholiques, les idées nées des Lumières et de la
Révolution (raison, séparation de l’Église et de l’État…) ont mis à bas
cette civilisation idéale, entraînant la sécularisation actuelle. Ils appellent donc de leurs vœux un retour à cette époque et la
renaissance, selon les mots du philosophe Gustave Thibon d’«un tissu
social dans lequel la religion pénètre jusqu’au moindre recoin de la vie
temporelle (habitudes, usages, distractions et travail…), une
civilisation dans laquelle le temporel est sans cesse imprégné par
l’éternel»."
Voici ce qu'en dit pour sa part Dom Gérard, ancien père abbé du Barroux (+) :
"La Chrétienté est une alliance du sol et du Ciel; un pacte scellé du
sang des Martyrs, entre la terre des hommes et le paradis de Dieu. Un
jeu candide et sérieux, un humble commencement de la vie éternelle. La
Chrétienté, c'est la lumière de l'Evangile projetée sur nos patries, sur
nos familles, sur nos moeurs et sur nos métiers. La Chrétienté, c'est
le corps charnel de l'Eglise, son rempart, son inscription temporelle
[…] C'est aussi et surtout la proclamation de la royauté de
Jésus-Christ sur les âmes, sur les institutions et sur les moeurs"
Et le site du pélerinage précise :
"La Chrétienté, c'est une cité dans laquelle les institutions et les
modes de vie ne sont plus des obstacles à l'épanouissement des hommes,
mais, respectueux de l'ordre naturel, des instruments qui permettent
l'élévation de l'homme. Il ne s'agit pas, en voulant pacifier et
embellir la Terre, de remplacer le Ciel, mais bien de lui servir
d'escabeau. Et les pèlerins de Chartres sont de ces chrétiens qui
veulent instaurer sur terre ce règne social de Jésus, car nous savons
qu'Il est la seule alternative à la culture de mort et que c'est avec
Lui seul que nous pourrons bâtir une civilisation du 3ème millénaire qui
soit harmonieuse."
La Chrétienté, c'est la civilisation de l'Amour que ne cessent d'annoncer les deux derniers papes.
Addendum 11h30 : on me fait cette remarque :
"le journal "La Croix"
Désigne un journal fondé par les pères
assomptionnistes, qui fut catholique.
Pour certains catholiques, les
idées nées des Lumières et de la
Révolution (raison, séparation de l’Église et de l’État…) ont mis à bas
cette notion, entraînant la sécularisation actuelle de ce journal.Les vrais catholiques appellent donc de leurs vœux un retour à cette
époque et la
renaissance, selon les mots du philosophe Gustave Thibon d’«un journal
dans lequel la religion pénètre jusqu’au moindre recoin de la vie
temporelle (habitudes, usages, distractions et travail…), un
journal dans laquel le temporel est sans cesse imprégné par
l’éternel»"
Olivier
Je dirais qu’elle a été mis à mal par le protestantisme.
Mû de Jamir
Sénèze : la nuit
Dom Gérard : le jour…
PEB
Dom Gérard et mon ami Nicolas disent au fond la même chose.
L’abbé est un prédicateur qui annonce un Évangile de Salut. Ses accents lyriques traduisent son désir de vivre dans la Foi un bonheur terrestre collectif authentique au pied de cet arbre de vie qu’est la Croix bienfaisante de Notre Seigneur Jésus-Christ.
Nicolas est un journaliste, et néanmoins catholique sincère. Son propos didactique vise à expliquer un mot selon ses acceptions historiques, philosophiques et politiques. Il s’adresse non à un peuple de fidèles mais à un public en quête d’informations.
Autant comparer les mérites de la Somme de saint Thomas d’Aquin et la verve d’un saint Bernard prêchant la Croisade!
Gustave Minet
“La chrétienté désigne l’ensemble des nations qui, au Moyen Âge, professaient la foi chrétienne et étaient gouvernées par des princes catholiques sous l’autorité du pape.” Tout à fait d’accord. Sous l’autorité du Pape. C’est l’Eglise, gouvernée par le Pape, qui est la société voulue par Dieu. Les nations chrétiennes ne sont que des territoires ecclésiastiques. D’ailleurs, c’est cela ou bien ce que l’on connaît maintenant : des nations où le christianisme est un élément culturel accessoire, superflu et éliminable.
louis
Excellentes définitions de la chrétienté, dans cet article (alors que ma paroisse de Martres-Tolosane – 31- s’apprête à fêter la Saint vidian martyr des musulmans sarrasins) et bonne remarque d’Olivier, ci-dessus ! Oui, la chrétienté est mise à mal par ceux-là mêmes qui devraient la défendre et dont certains portent pourtant le rouge du sang des chrétiens sur leur soutane…quand ils en mettent une.
jejomau
“fils de la chrétienté, le catholique est fier de sa foi. Il travaille à établir le Règne du Christ dans toute sa vie et dans le monde qui l’entoure”
Ca rappelle quelque chose à quelqu’un ?
Sancenay
Tiens, j’ignorais que la conception de la séparation de l’Eglise et de l’Etat était née des “lumières”.
Il me semblait avoir lu quelque part que dès le 11ème siècle, le moine Suger, conseiller du Roi, travaillait ardemment à définir ce principe.
Certes les “lumières” ne sont déjà pas bien lumineuses ,alors sans doute faut-il le secours de la “science” perfide de Monsieur Senèze pour les éclairer !
Ah, encore une histoire de croix sans davantage de manière que de bannière!
Cathelineau
Effectivement, la définition de la Chrétienté donnée par Nicolas Senèze est assez juste, notamment grâce à la belle citation de Thibon (dont on retrouve les mêmes accents chez Dom Gérard).
N’en concluez pas pour autant que le chroniqueur de La Croix défende en quoi que ce soit l’idée de Chrétienté. Lisez ses écrits et écoutez ses interviews : il bannit le mot “sacré” de son vocabulaire, et la référence a la Chrétienté lui donne des boutons.
Au moins a-t-il le mérite de comprendre ce dont il s’agit, contrairement à la plupart des journalistes.
L. Cheron
Sancenay,
dans les rapports entre Eglise et Etat, vous confondez la « séparation » avec la « distinction ».
La situation léguée par la tradition à la fin de l’ancien régime, c’était le régime particulier du concordat de Bologne (1516) qui, faisant de l’Eglise gallicane l’objet et le fruit d’un traité entre la couronne et le Saint-Siège, supposait évidemment une distinction de ces deux dernières instances (on ne conclut pas un traité avec soi-même), sans qu’il y eût séparation : on est bien lié par un accord, et non pas séparé. Si l’on veut, l’Eglise gallicane se trouvait à l’intersection de l’Etat monarchique et de l’Eglise universelle et se faisant, en partie « dans l’Etat » (l’Agence générale du clergé, par exemple, en était bien), mais en partie seulement : ainsi, quand la monarchie crut opportun de fustiger le jansénisme à la fin du règne de Louis XIV, il fallut bien obtenir de Clément XI la bulle Unigenitus.