Député des Yvelines siégeant au sein du groupe UMP, président du Parti Chrétien Démocrate, Jean-Frédéric Poisson est interrogé dans Présent à propos des soins palliatifs. Extraits :
La mort n’est-elle pas une affaire d’ordre privée, qui ne devrait concerner que le patient, la famille et le corps médical ? Pourquoi vouloir légiférer à tout prix ?
Il y a dans la mort de chacun d’entre nous une dimension collective. La mort de chaque homme interpelle l’ensemble du corps social, dans la mesure où chaque décès nous replace dans notre condition d’homme mortel et devant un certain nombre de nos obligations à l’égard des mourants. Dans les rites funéraires, la société tout entière rend hommage à ceux qui sont morts. Il est donc normal que la société se saisisse du sujet de la fin de la vie. Elle peut le faire par la loi, car sans loi, les médecins seraient souvent obligés de faire des choix délicats par eux-mêmes et iraient facilement au-devant de poursuites judiciaires.
Malgré tout, je pense même que la législation abusive sur ce sujet est problématique. Je défends pour ma part la possibilité de recourir à une justice qui rétablirait ce que la loi ne peut pas résoudre. Il y a quelques années, un homme de 90 ans a été condamné pour avoir étouffé sa femme qui agonisait depuis des années d’un cancer dans son lit d’hôpital, mais il a été dispensé de peine, car le poids des circonstances atténuantes était terriblement lourd. Dans des cas très compliqués comme celui-là, un équilibre a été trouvé.
Le gouvernement a promis de développer les soins palliatifs, chose qui devait déjà être faite depuis la loi Leonetti de 2005. Mais dans le même temps, une coupe de 10 milliards d’euros est prévue dans le prochain budget de la santé. Ne craignez-vous pas que les soins palliatifs passent à la trappe encore une fois ?
Bien entendu, et le fait que la sédation terminale profonde se généralise et soit facilitée par la nouvelle proposition de loi entraîne le risque que celle-ci s’impose petit à petit au détriment des soins palliatifs. En effet, sédater de façon continue jusqu’au décès ne demandera pas de moyens financiers ou humains supplémentaires, contrairement au développement des soins palliatifs qui en demandera beaucoup !
Si le gouvernement n’a fait aucun effort depuis trois ans pour développer les soins palliatifs, c’est sans doute aussi parce qu’en développant l’offre palliative comme objectif prioritaire de santé publique, il y aurait le « risque » de rendre inutile toute forme de légalisation du suicide assisté, légalisation qui est souhaitée par plusieurs de ses membres.
Ne pensez-vous pas que les soins palliatifs ne sont qu’une solution palliative au déficit d’entraide intergénérationnelle au sein des familles ?
Cela peut parfois être le cas. Mais je tiens tout d’abord à rappeler que des unités de soins palliatifs au domicile des patients se développent lorsque les patients peuvent rester chez eux. Ensuite, il faut prendre acte du fait que certaines personnes ne peuvent pas assumer la souffrance de leurs proches au quotidien et ont besoin d’être aidées. Dans le cas de patients qui souffrent d’Alzheimer, il peut être insupportable pour le conjoint ou les enfants de ne pas être reconnus.
Les soins palliatifs doivent donc absolument être développés : il se trouve là des gisements d’humanité dont notre monde moderne a bien besoin."