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Cathophobie

La pièce de Castellucci : image de l’âme désespérée qui finit par se retourner contre Dieu

Un lecteur m'envoie son analyse de la pièce. Extraits :

"Je suis allé voir la pièce hier soir pour pouvoir répondre aux journalistes qui nous faisaient le reproche de ne pas être allé voir par nous-mêmes. Tout d'abord, je confirme que la scène où les enfants jettent des grenades (et non des excréments…) sur le portrait du Christ a bel et bien été supprimée à Paris. Pour quelle(s) raison(s) ? Est-ce la mobilisation de Civitas en amont qui a décidé Castellucci à "couper l'herbe" sous le pied des Cathos ? Je ne sais pas. […]

La pièce débute, elle est d’un bout à l’autre abominable. Je l'ai vraiment ressentie comme une agression au plus profond de moi-même, comme une attaque contre tout ce qu'il y a de beau, de pur en l'homme. Cette pièce est, toute entière, un cri de désespoir qui finit par se retourner contre le Christ. Jugez en : pendant environ 45 minutes, un vieillard dans son salon est pris de crises d'incontinence de plus en plus violentes. Son fils, parfaitement c*n d'ailleurs, au lieu d'emmener son père aux toilettes dès le départ, ce que n'importe qui d'un peu intelligent s'empresserait de faire, le nettoie dans le salon, en chemise et cravate. Il y a bien une gradation. Le père finit nu comme un vers, dos au public, irrévérencieusement face au portrait du Christ, et maculé de m**de, presque des pieds à la tête. Castellucci, de temps à autre, fait entendre des sons de flatulence, et insuffle par deux ou trois fois dans la salle l'odeur ignoble qui va avec les sons susdits.

Notons plusieurs choses : d'abord, l'extraordinaire monotonie de la pièce. Aucun suspens, aucune histoire, aucun intérêt. Pendant 45 minutes, imaginez que vous posiez devant des WC ouverts et que vous regardiez faire quelqu'un. C'est exactement ça, mais en pire. D'autre part, je note l'incroyable inconvenance du public, plié de rire à plusieurs endroits particulièrement éprouvants (le père se lâche à nouveau devant son fils qui vient de le changer, ou bien il se macule de visage d'excréments). Comme quoi, les anciens l'avaient bien compris, il est IMPOSSIBLE de réaliser une véritable tragédie, inspirant douleur et pitié au spectateur, avec un objet trivial. Or il n'est rien de plus trivial en l'homme que ses déjections. C'est pour méconnaître ce principe que le metteur en scène obtient un résultat opposé à celui qu'il disait vouloir créer : au lieu d'inspirer de la pitié avec cette pièce « tragique », il fait rire, il inspire la moquerie. Sur le plan dramatique, cette pièce est donc un ratage total.

Dans les deux dernières minutes de la pièce, le vieillard grimpe, à l'aide d'une sorte d'échafaudage, jusqu'au sommet du portrait, et derrière lui. En haut, il déverse un liquide que l'on peut effectivement prendre pour le liquide scatologique utilisé dans le reste de la pièce. Enfin, le portrait est déchiqueté, désagrégé de l'intérieur, le tout sur une musique puissante et proprement infernale. Nous sommes plusieurs cathos qui à la fin avaient le même jugement à propos de ces dernières minutes : il y a là quelque chose de satanique. Je n'exagère rien, ceux qui ont vu et entendu me comprendront.

Je le répète, j'ai ressenti cette pièce comme une agression. Le metteur en scène présente la déchéance de l'homme dans ce qu'elle a de plus physique et de plus brutal mais, d'une part, il ne remonte pas aux causes et ne suggère jamais le péché originel (or il se dit chrétien), d'autre part, à force d'outrance dans la scatologie, il passe à côté de son dessein initial, qui était, disait-il, de montrer la beauté de l'homme confronté, sous le regard du Christ, à cette situation. Je n'ai jamais vu la tendresse du fils, ou sa patience. J'ai vu un vieillard nu déféquant sur scène et torché par son fils, et cela est si violent, si difficile à supporter qu'il est impossible d'apercevoir quelque beauté que ce soit.

Cette beauté morale, en réalité, n'existe pas chez Castellucci, bien qu’il veuille affirmer le contraire. Ne remontant pas à la cause initiale, celle du péché originel, il ne peut introduire la notion de rédemption qui permettrait, avec le respect de la bienséance la plus élémentaire, de rendre l'idée profonde de la pièce intéressante. Au contraire, cette longue scène scatologique suggère que l'homme n'est capable de rien de beau ou de pur. Le désespoir s'instaure rapidement, et s'il y a dans cette pièce une métaphore, c'est celle de ce vieillard, image de l'âme désespérée qui finit par se retourner contre Dieu. C'est tout le sens de la scène finale, qui s'intègre parfaitement dans le reste de la pièce. La scène supprimée des enfants rajoutait une idée de révolte lancée à la figure d'un Dieu impassible, incapable de concevoir de la pitié pour sa créature déchue. Notons d’autre part le mépris du fils pour son père. Je n’ai hélas pas conservé la traduction des dialogues, donnée à l’entrée, dont j’ai déchiqueté la feuille nerveusement tout au long de la pièce. Mais ces dialogues et le jeu du fils ne laissaient aucun doute sur les sentiments de mépris implicite du fils pour un père qui n’est capable de rien d’autre que de gémir et de pleurer.

[…] Cette pièce est une négation du véritable humanisme, qui est la lutte contre tout ce qui rend bestial l'être humain à l'intérieur comme à l'extérieur de lui. C'est d’ailleurs en tant que négation de l’homme que cette pièce devient une négation de Dieu. A s'attaquer à l'homme, on finit par se retourner contre le Créateur de l'homme : on offense un peintre en lacérant son chef d'œuvre (c’est d’ailleurs réversible : à s’attaquer à Dieu lui-même, on s’attaque presque nécessairement à ses créatures).

Négation de la nature raisonnable comme de la surnature, la pièce de Castellucci est profondément anti-chrétienne, quelque soit l'intention de départ du metteur en scène, qui se dit chrétien. Je veux croire que son intention première était de représenter la beauté de l'homme confronté à une aussi douloureuse situation. C'est complètement raté. C'est un ratage total. La surproduction de matière fécale s'oppose de toute façon et dés le départ à un tel dessein : on ne peut faire un tragédie avec un objet trivial. Castellucci, sans le savoir peut-être, a réalisé une comédie noire, atroce, désespérée, infernale. On rit jaune, ou l'on pleure nerveusement, ou l'on se sent comme une nausée dans l'estomac. On devient fou, et quelques spectateurs, trop peu, quittèrent la salle en criant de colère.

Est-ce qu'un tel navet, qui dans une société normale enverrait son auteur à l'hôpital psychiatrique, nécessitait une telle mobilisation de notre part ? Je n'ai pas la réponse à cette question, très honnêtement. Plusieurs de mes amis, excellents cathos et qui ont vu la pièce se sont posé la même question à la sortie. Nous sommes déçu et furieux que des copains puissent se payer un procès pour ça. Mais d'un autre côté, cette mobilisation si fervente n'est-elle pas un sérieux motif d'espérance ? Quant à l'aspect « contre-productif » que certains ont dénoncé  dans cette mobilisation, puisqu’elle conforte nos adversaires dans leur sentiment d’être de vertueux défenseurs opposés au fascisme, j'ai envie de dire au risque d'un manquement à la charité chrétienne que la majeure partie du public, sans parler des "meneurs" (Delanausé, Mitterrand…), est en l'état déjà endurcie et de mauvaise foi. C'est un fait. Au cas par cas, et avec beaucoup d'efforts et la grâce surabondante de Dieu, peut-être.

Alors restons sur le plan surnaturel, sans fidéisme pourtant. Le combat politique est primordial, le combat culturel aussi. N'oublions pas le combat spirituel. Prier devant un théâtre, manifester notre Foi, notre Espérance, notre Charité n'a jamais fait de mal à personne. D'autant plus que les passants qui observent les manifestations et avec lesquels nous pouvons discuter finissent généralement en total accord avec nous. Des personnes ont été frappé par la piété de certains jeunes lors des prières. Est-ce finalement si contre-productif que cela ? Aux yeux du monde, oui, puisqu’au lieu de porter un coup décisif à ces malheureux, nous leur faisons de la publicité tout en nous faisant nous-mêmes démolir par les merdias traditionnels. Mais le Monde n'est pas de Dieu, jugeons d'un point de vue surnaturel ces rassemblements, c'est, je crois, le seul moyen de les comprendre."

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