Jean-Marie Guénois analyse la première réforme structurelle du Saint-Siège :
"la secrétairerie d'État, équivalent de Matignon, perd le contrôle qu'elle exerçait sur les finances du Saint-Siège, tout en gardant, pour le moment, la gestion administrative de l'Église. Une véritable révolution: c'est comme si Bercy, le ministère des Finances, ne répondait plus au premier ministre mais au président de la République.
Cette gestion sera assurée par un ministère des Finances appelé «secrétariat pour l'Économie» et placé sous la direction du cardinal George Pell, 72 ans, actuellement archevêque de Sydney (Australie) et membre du fameux «G 8», le «conseil des cardinaux» qui assiste le Pape. […] Ce conseil répondra directement au Pape dont le pouvoir est considérablement renforcé. Tout en étant le plus haut responsable de l'Église, le Pape dépendait jusque-là, techniquement, de la secrétairerie d'État en matière financière. Cette fois, il supervise les finances. Le filtre de la secrétairerie d'État - qui était une forme de pouvoir de l'administration centrale sur le Pape - tombe au profit d'une structure plus directe, plus transparente, bref, moins romaine.
L'autre nouveauté tient à la rationalisation des finances du Vatican. Une seule structure, le secrétariat pour l'Économie, pour deux mondes: la cité du Vatican (l'État du Vatican surtout financé par les musées) et le Saint-Siège (l'entité morale et internationale de l'Église catholique, financée par les dons des fidèles). Ils vivaient comme deux planètes parallèles. Mais l'une, le Saint-Siège, ne pouvait boucler son budget sans la cité du Vatican, qui en jouait… Ce qui fut l'un des problèmes soulevés par le scandale de Vatileaks.
Une seule structure donc qui prend en pratique la place de trois services: l'administration pour le Patrimoine du Siège apostolique (Apsa), chargé, jusque-là, de la gestion du patrimoine mobilier et immobilier ; la préfecture pour les Affaires économiques, responsable du contrôle de la gestion, des budgets prévisionnels et des bilans ; le bureau du Travail, une sorte de direction des ressources humaines voulue par Jean-Paul II mais qui n'a jamais bien fonctionné car sans pouvoir économique.
Avec la réforme, L'Apsa est réduite au rôle de «banque centrale du Vatican», selon la note du Saint-Siège. Au passage, rien n'est dit sur le fameux organisme qui jouait jusque-là ce rôle: l'IOR, l'Institut pour les œuvres de religion. Son sort n'est pas encore fixé. En revanche, toute la partie gestion de patrimoine, immobilier et mobilier, n'est plus assurée par l'Apsa mais par le nouveau ministère. Qui absorbe également toute la comptabilité, budgets prévisionnels, bilans comptables qui étaient assurés par la très austère préfecture pour les Affaires économiques. Ce nouveau ministère reçoit aussi une vraie mission de direction des ressources humaines avec des moyens que n'avait pas le bureau du Travail.
Troisième nouveauté, cette réforme entend installer plus de rigueur dans les comptes du Vatican par la mise en place systématique d'une gestion financière, très contrôlée dans son exécution via des reportings réguliers mais aussi dans ses prévisions qui seront cohérentes et non plus disparates. Les outils de gestion existaient déjà mais ils étaient mal coordonnés. La centralisation des comptabilités de la soixantaine d'entités qui composent le Vatican sera systématique."