Arnaud de Beauchef, auteur de plusieurs ouvrages sur l’oraison, a été interrogé dans l’Appel de Chartres. Extrait :
La chrétienté est, comme son nom l’indique, un des piliers de notre association. Quel lien pouvons-nous établir entre cet engagement pour un ordre temporel facilitant le plus possible l’établissement du règne de Dieu et la pratique de l’oraison ?
Une observation qui me semble intéressante est que chaque époque a tendance à se considérer comme moderne, même si ce concept, à proprement parler, date du XIXème. A leur manière, les romains étaient modernes la Renaissance était moderne, les Lumières étaient modernes, nous sommes modernes. Chaque modernité vieillit, puis passe, remplacée par un nouveau paradigme. Une société chrétienne, à l’inverse, est une société qui aide chacun, à son époque, à passer de l’homme moderne à l’homme éternel. C’est une société où l’on prie, où l’oraison tient sa place. C’est une société où un saint Louis, un Charles Quint peuvent abandonner leur royaume ou leur empire pour entreprendre une quête spirituelle.
Mais aujourd’hui nous sommes loin de ces époques…
Nous avons aujourd’hui deux problèmes : celui d’une société moderne qui se prétend sortie de l’histoire, mais qui a en réalité très peur de vieillir et qui du coup interdit à ses membres d’accéder à l’homme éternel afin de ne pas affaiblir l’élan de sa modernité. Nous avons également une Eglise qui a une peur morbide de ne pas se montrer attrayante en proposant clairement à l’homme moderne le chemin lui permettant d’accéder à l’homme éternel. Ce concordat temporaire de la Société et de l’Eglise ne pourra que craquer lorsque la modernité présente aura perdu en légitimité et dépassé un niveau tolérable d’illusion et de violence. Il me semble que nous ne sommes plus très loin de ce seuil, les circonvolutions ecclésiastiques devenant de plus en plus acrobatiques.