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France : Société

L’accueil des clandestins passé au crible des quatre vertus cardinales

Le problème des migrants oblige le Pape et l'Eglise à concilier deux impératifs apparemment incompatibles dans le creuset d’un même réalisme évangélique. Frédéric Rouvillois tente de les concilier en faisant appel aux quatre vertus cardinales :

"[…] Le premier impératif, aime ton prochain comme toi-même, conduit à ouvrir les bras à l’autre. Et en l’occurrence, à refuser l’engrenage de la terreur qui conduit des millions de personnes, créatures de Dieu et faites à son image, à quitter leurs maisons et à demander l’hospitalité. Ceux-là, en tant que chrétien, je ne puis les laisser à la porte, sauf à ressembler au mauvais riche que son égoïsme condamne irrémédiablement au tourment éternel. À l’égard de mes frères souffrants, un devoir s’impose sans discussion, celui que le Pape rappelait à Rome le 6 septembre : « être le plus prochain des plus petits et des plus abandonnés ». Concrètement, ce précepte justifie une pratique de l’accueil qui ne distingue pas entre une migration politique et une migration économique – distinction  moralement contestable, celui qui s’enfuit avec sa famille pour ne pas mourir de faim n’ayant pas moins le droit d’être accueilli que celui qui émigre parce qu’il estime que sa liberté d’expression ou son droit de vote étaient violés dans son pays d’origine. En somme, l’opposition à  la « culture de mort » suggère une politique d’ouverture et de charité.

Mais à ce premier impératif s’en ajoute un second, qui commande de s’aimer soi-même en tant que l’on est une créature de Dieu, et que l’on a par là-même des devoirs envers soi. Benoît XVI soulignait à ce propos que « l’homme aussi possède une nature qu’il doit respecter »2. Or sa nature est d’être un animal social, qui va constituer avec ses proches un groupe particulier, une société dotée de certaines caractéristiques dont procèdera sa propre identité.

On ne saurait en effet confondre le Peuple de Dieu, composé de tous les hommes en tant qu’ils sont frères, puisqu’issus du même Père céleste, et les peuples humains, qui s’y découpent comme les pièces dans un puzzle, chacune d’entre elles étant dotée de sa propre forme, de sa couleur et de sa place. Tout homme, appartenant au Peuple de Dieu, appartient aussi, simultanément, à un peuple particulier, à une patrie où généralement il est né, à une culture qui l’a modelé, à une terre et à une histoire où il s’enracine.

Cette réalité, les papes contemporains en ont souligné l’importance dans la construction de l’homme : sans elle, expliquent-ils, l’homme est déraciné, perdu, privé de ce qui le constitue, un être sans ombre et sans épaisseur, victime idéale des nouveaux marchands d’esclaves.

Or, ce second impératif s’oppose, lui, à ce que les portes soient ouvertes de façon inconsidérée à des masses de plus en plus considérables. Si les identités sont indispensables, on ne peut en effet accepter un processus qui conduit de façon certaine des millions de personnes, séduites par le miroir aux alouettes du consumérisme, à rompre avec leurs racines, et des millions d’autres à subir ce qu’ils ressentent comme une invasion, une dilution de leur identité et une mise à mal de leur culture.

Mais comment concilier ces deux impératifs ? Le christianisme distingue à cet égard quatre vertus cardinales, la prudence, la tempérance, le courage et la justice : toutes les quatre sont à l’œuvre pour résoudre cette difficulté.

  • La justice, qui vise à donner à chacun le sien, pousse à aider ceux qui ont tout perdu et à leur rendre une dignité, celle qui leur appartient en tant que créatures de Dieu ; mais sans pour autant léser ceux qui, ici, souffrent également de la pauvreté sous toutes ses formes.
  • La prudence consiste à peser le pour et le contre. Et à constater qu’il faut bien entendu recueillir, au moment présent, ceux qui se noient à quelques encablures des côtes européennes. Il faut les recueillir, tout en faisant comprendre aux autres, à tous les autres, qu’il s’agit d’un cas d’exception, d’un moment transitoire. Bref, qu’il n’y a pas de place ici pour les dizaines de millions qui, un jour peut-être, seraient tentés de venir s’installer en Europe. Pas de place, parce qu’un afflux excessif, à la libanaise, entraînerait à coup sûr un surcroît de misère et, à terme, de violence, voire de guerre civile, les envahis ne pouvant accepter indéfiniment l’injustice de leur propre situation. Même Saint Martin ne donna au pauvre que la moitié de son manteau. La prudence consiste donc, du côté des décideurs, à refermer progressivement mais fermement les frontières, tout en agissant dans les pays d’origine de telle sorte que le flux migratoire finisse par se tarir. Bref, à agir en véritables politiques, qui savent que leur rôle est de traiter les causes du mal, pas simplement ses symptômes les plus visibles.
  • La tempérance, elle, consiste à accepter de restreindre notre train de vie afin d’aider, là-bas, des populations si misérables que sans cette aide, elles seraient tentées de tout quitter pour venir chez nous. Elle enseigne qu’en perdant un peu en confort matériel, nous pouvons espérer sauver l’essentiel : notre identité spirituelle, et peut-être notre vie.
  • Le courage, enfin, est ce qui peut nous conduire, d’une part à ne pas baisser les bras, et de l’autre à ne pas craindre d’intervenir – en prenant une part active à l’éradication des causes du problème. « L’espérance chrétienne est combattive », déclarait encore le pape François le 6 septembre. Le christianisme n’est pas une religion de la passivité, et il y a des moments où, au nom de la justice et même de la prudence, le courage commande d’agir. Avant qu’il ne soit trop tard.

Et les catholiques de France, dans tout ça ? Il leur revient, pour rester fidèles à ce réalisme évangélique, de tenir fermement les deux bouts de la corde sans sacrifier l’un à l’autre – le devoir d’amour d’un côté, qui leur commande d’ouvrir les bras et, de l’autre, le devoir de maintenir la cité conditionnant la réalisation de cet amour, qui les pousse à la vigilance. Ni oublier que tous deux constituent des formes complémentaires de la charité.

[Add] : plusieurs remarques sur cette analyse. Elle n'épuise pas le sujet – notamment sur la question de l'islam. Et ne mentionne pas le fait que le second principe relève de la responsabilité de nos gouvernants. Jusqu'à quelle limite les Français devront-ils respecter le premier principe, si leurs gouvernants ne prennent pas en compte le second ?

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11 commentaires

  1. Saint Martin n’a donné que ce qui lui appartenant en propre. En effet tout soldat romain n’était propriétaire que de la moitié de tout ce que lui donnait l’armée romaine, la moitié de ses vêtements, de ses armes, de son cheval, et bien sûr de son manteau. Donc Saint Martin a tout donné.

  2. Il convient de rappeler que 90% des gens qui viennent sont musulmans.
    Qu’il n’y a pas d’islam modéré : il suffit d’ouvrir le coran pour le vérifier.
    Qu’il s’agit en vérité d’une invasion sous couvert d’immigration et que, de fait,
    nous vivons une forme nouvelle de guerre… entretenue par la propagande idéologique d’un système fou avec le soutien de leurs médias.
    De plus, beaucoup des nôtres sont dans les difficultés et repoussent, par exemple, les soins dentaires (qui ne sont plus remboursés ou très peu, tandis que l’AME prend en charge la totalité des soins pour les étrangers…) Chez nous, la pauvreté gagne du terrain, chaque jour un peu plus. Nous le voyons bien!
    Les droits sociaux diminuent chaque année… Nous croulons sous les dettes : des communes, de l’état, et de l’Europe… sans parler des impôts directs et indirects sous toutes ses formes qui augmentent.
    Il convient d’être réaliste car bientôt la France sera, elle aussi, au niveau de ceux qui nous envahissent avec le concours de l’Europe, des naïfs et des collaborateurs du système mondialiste.
    Bientôt La France sera, elle aussi, un Pays du tiers-monde, peuplée par une foule bigarrée, hors sol & sans racine… de consommateurs compulsifs et serviles.
    De fait, la France & sa civilisation n’existera plus, son histoire non plus, du reste.
    Le bon sens voudrait que l’on commence par bien s’occuper des nôtres, avant de s’occuper des autres.
    Ul faudrait s’occuper de nos familles bien malades et décomposées, de nos anciens délaissés, de nos handicapés, de nos enfants et de nos jeunes gens qui ne trouvent pas d’emploi pour fonder à leur tour une famille.
    Bref, le monde est devenu fou!

  3. J’accueillerai des migrants à bras ouvert, mais des chrétiens d’orient en priorité !

  4. “aime ton prochain comme toi-même”
    Le prochain (PROXIMUS) est le plus proche de nos proches (superlatif de PROPINQUUS).
    On est loin du LOINTAIN, si j’ose dire!
    Il ne nous est demandé que d’aimer notre prochain.

  5. A placer sous le commentaire de Vendome
    =======================================
    Bonne remarque, Vendome, mais à condition d’ajouter aussi Lc 10,29. Un Samaritain n’était certes pas un “plus proche” pour un Juif. Mais c’était quand même un demi-juif. Pourquoi Jésus n’a-t-il pas fait de cet homme blessé un éthiopien ou un parthe ou un babylonien, ou un arabe, c-à-d un “lointain” ?

  6. Saint Martin a tout donné en effet, encore aujourd’hui, le soldat n’est pas propriétaire de l’entièreté de son paquetage…A l’époque de Saint Martin c’était juste la moitié…

  7. @vendome : quand le lointain est devant ma porte , il devient mon prochain ! J’ai alors le devoir de l’accueillir et de le respecter , lui a aussi bien sûr le devoir de me respecter !

  8. Le suicide d’un peuple ne fait pas partie des percepts de l’Église.
    Organiser la destruction de notre civilisation et de notre pays pour croire nous complaire dans le “bien imaginaire” n’est pas une vertu mais un égoïsme sans nom, puisqu’il consiste à spolier nos propres enfants de ce qui leur appartient et que nous avons reçu avec obligation de leur transmettre.
    La responsabilité de chaque peuple est de développer le territoire qui lui a été confié. Chaque race dispose d’un territoire légitime pour s’épanouir, la migration est une lâcheté, car il existe aujourd’hui les technologies pour faire de chaque coin une terre accueillante à condition de se mettre au travail.
    Le multiculturalisme est l’escroquerie des peuples sans terre qui revendiquent le droit de s’installer n’importe où au dépend des autres peuples.

  9. Quand le Lointain est devant ma porte , il devient mon Prochain !

  10. les quatre vertus cardinales… Toutes proportions gardées, cela me fait penser aux quatre plaques que tout bâtiment de la “Royale” porte sur ses parois : Honneur, Patrie, Obéissance et Courage !
    Que les marins me pardonnent si je me suis trompé !

  11. Cela rejoint la prière :
    Mon Dieu donnez moi le courage d’entreprendre , la lucidité dans mon action et la persévérance dans l’effort.

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