De Pierre-Olivier Arduin dans L'Homme nouveau :
"Pour la première fois, des parlementaires français sont revenus sur l’un des principes directeurs des lois de bioéthique de 1994 et 2004 qui réserve l’assistance médicale à la procréation (AMP) à un couple formé d’un homme et d’une femme dont l’infertilité est dûment constatée. Avec le concours des sénateurs de droite les plus libertaires, entrés ouvertement en rébellion contre leur propre camp, l’opposition a réussi un « hold-up bioéthique » en donnant satisfaction aux lobbies homosexuels qui n’en espéraient pas tant. Contre toute attente, le Palais du Luxembourg a en effet instauré un droit à l’AMP pour «l’ensemble des couples», balayant toute référence à l’altérité sexuelle. Ce qui revient de facto à mettre les techniques de procréation artificielle à la disposition des «couples» de femmes homosexuelles via le recours à un donneur anonyme de spermatozoïdes. […]
Le droit français promeut un modèle familial obsolète répondant à l’adage «un père, une mère, pas un de plus, pas un de moins», rappellent-ils. Le Code civil datant de 1803 s’obstine ainsi à établir la filiation d’un enfant à partir de l’identification d’un père et d’une mère en principe procréateurs de leur enfant. Le Code de la santé publique lui-même se fonde sur ce principe pour définir le «projet parental» si bien que l’AMP est uniquement proposée aux familles rentrant dans ce cadre traditionnel. Un modèle qui n’a que trop duré et qu’il convient de faire voler en éclats selon une majorité de sénateurs.[…] Aussi le législateur s’honorerait-il s’il inscrivait dans le marbre de la loi tricolore un nouveau droit, celui de fonder une famille quelle que soit son orientation sexuelle. Car c’est le désir d’enfant, c’est l’intention d’être parent, et non la dimension biologique de la procréation, qui doit constituer le fondement moderne d’un droit de la famille à revoir de fond en comble. Pour ouvrir une brèche dans notre édifice juridique, rien de tel que de s’appuyer sur les progrès scientifiques de l’AMP qui ont permis de multiplier à l’infini les possibilités d’engendrer. […] En suivant ce raisonnement, les sénateurs en sont arrivés logiquement à faire de l’assistance médicale à la procréation le support technique du projet familial des homoparents d’intention. […]
Bien sûr, on peut se consoler à l’idée qu’il est hautement probable que l’Assemblée nationale, avec le soutien du gouvernement, revienne sur cette décision en seconde lecture. Pour autant, le vote du Sénat a pour ambition d’influencer à moyen terme les choix de société comme on l’a vu avec le débat sur l’euthanasie en début d’année, voire de préparer le terrain dans l’optique d’une alternance législative en 2012. La gravité de sa portée ne saurait donc être sous-estimée."