Un numéro spécial du Monde de l’enfance aborde les grandes questions bioéthiques liées au début de la vie : les tentations du bébé à la carte, l’utérus artificiel, l’assistance médicale à la procréation, etc. A la question :
""Le XXIe siècle est marqué par la recherche du bébé "zéro défaut". Cet objectif vous semble-t-il dangereux ?"
La question peut surprendre, mais on en est là : l’eugénisme est-ce (vraiment) dangereux ? Axel Khan, directeur de l’Institut Cochin de recherches biomédicales, opposé au clonage, répond :
"le diagnostic pré-implantatoire ne permettra jamais d’éviter tout handicap !Aujourd’hui les tests génétiques permettent de choisir l’embryon en fonction d’autres caractéristiques, comme le sexe. A l’avenir, il sera sans doute possible de sélectionner l’embryon en fonction de son potentiel physique. […] La question, comme pour le clonage reproductif, est davantage du domaine du jugement moral que celui de la réalisation. […] Je ne pense pas qu’il soit prudent de permettre [aux parents] d’avoir l’enfant qu’ils ont pré-dessiné. De plus, l’enfant qui va naître est une autre personne (…). Il ne doit pas devenir une prothèse du corps des parents ou le produit du choix parental en fonction de son identité biologique, comme le sexe ou la forme du visage".
Pour Boris Cyrulnik, enseignant en éthologie humaine à l’université Sud-Toulon-Var :
"On appelle ces enfants les "chargés de mission" : ils doivent être parfaits, sinon ils deviennent des sous-hommes ! [cela nous rappelle quelque chose. Mais le mot n’est pas laché. NDMJ]. D’un point de vue génétique, on sera un jour capable de fabriquer l’enfant de nos représentations idéales. Les prémices sont déjà présentes, avec la loi autorisant les avortements en cas d’anomalie génétique grave (…) Mais cette situation soulève un problème, à savoir que nous nous prenons pour des dieux capables de fabriquer l’enfant rêvé".
CQFD : l’avortement mène à l’eugénisme. Condamner l’eugénisme -ce que font ces spécialistes- revient tôt ou tard à remettre en cause l’avortement.