D’Aurelio Porfiri, éditeur et écrivain catholique italien, pour le Salon beige:
Comme on le sait, le mois de mai est considéré comme un mois spécialement dédié à la dévotion à la Bienheureuse Vierge Marie. Dans le passé, diverses cérémonies rappelaient aux fidèles l’importance de la Mère de Jésus dans notre foi. Bien que la dévotion mariale remonte à plusieurs siècles, il semble que le jésuite Annibale Dionisi au XVIIIe siècle ait indiqué mai comme mois marial. Il a affirmé qu’il était important de vivre cette dévotion non seulement dans des lieux désignés, des églises, mais aussi dans la vie quotidienne. Et en effet, une impressionnante série de dévotions a accompagné le peuple chrétien au cours des siècles en rendant hommage à Marie. Et ce fut surtout une occasion chère aux humbles, aux gens du peuple qui ont renouvelé leur amour et leur dévotion à la Mère du Ciel.
Mais que reste-t-il de tout cela aujourd’hui ? Peu ou rien. La théologie progressiste, qui va de pair avec les protestants, a commencé à se sentir gênée par la Mère de Dieu et a essayé de minimiser autant que possible son rôle dans l’histoire du salut. Assez du mois marial, assez du chapelet, assez des dévotions à la Bienheureuse Vierge Marie : le nouveau christianisme doit être christocentrique, il n’y a pas de place pour Marie ! Certes, les slogans ont toujours un effet, mais il est dommage que parfois, au lieu de révéler la réalité, ils la cachent. Sans le fiat de Marie, nous serions dans une autre civilisation, une autre époque. L’écrivain Vittorio Messori nous dit que « sans la racine de chair qu’est le corps de cette Femme, tout le mystère de l’Incarnation finit par perdre l’indispensable matérialité pour devenir un spiritualisme évanescent, un moralisme prêcheur ou, pire, une idéologie dangereuse ». Et peut-être n’est-ce pas une idéologie qu’est devenue la religion, une idéologie dangereuse avec ses dogmes, qui pourtant ne sont pas chrétiens.
Pourtant, les personnes humbles voient encore Marie comme un phare pour leur cheminement. Les humbles avec les grands pécheurs, comme le disait Léon Bloy, sont ceux qui ont le plus besoin de sentir la présence de la Mère proche. Beaucoup voient cela comme un fruit de l’ignorance. Je crois que c’est plutôt un don d’innocence. Certes, ces gens ne seront pas capables de grandes élaborations de pensée, mais ils semblent être mystérieusement plus proches de la vérité que les nombreux pharisiens de ce monde. Dans une de ses intuitions réussies, Joseph Ratzinger disait que ce n’est pas la foi des savants qui juge celle des humbles, mais celle des humbles qui juge celle des savants.
Dans certaines célébrations de la Vierge Marie, le Psaume 14 est chanté, ou du moins devrait l’être, dont le refrain est “Ceux qui ont le cœur pur habiteront dans la maison du Seigneur”. Ici, les soi-disant savants risquent souvent de perdre la pureté de leur cœur, cette innocence qui aide à être proche de Dieu.Si vous n’êtes pas comme des enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux, dit l’Evangile. Et tous les enfants ont besoin d’une mère.