Jean-Marie Guénois évoque le synode des évêques sur la nouvelle évangélisation, qui acommencé dimanche :
"À Rome, l'anniversaire du concile Vatican II
n'est pas marqué par l'euphorie. Les cérémonies romaines, en ce
11 octobre, donneront le change mais, cinquante ans après l'ouverture de
ce concile, le cœur n'y est pas. Car le bilan est plutôt sombre:
l'“aggiornamento” de l'Église catholique voulu par Jean XXIII pose
aujourd'hui plus de questions qu'il n'a pu en résoudre. Jusque-là
relativement tabou, ou confisqué par les traditionalistes, le discours
critique sur les fruits du concile est désormais publiquement porté par
des évêques modérés. Une digue du silence semble même avoir cédé comme
viennent de le démontrer les trois premiers jours de débat au synode sur
«la nouvelle évangélisation» en cours à Rome jusqu'à la fin octobre.[…] [L]'Église catholique souffre de «tiédeur»
comme [Benoît XVI] l'a dénoncé lui-même en ouvrant les travaux lundi: «Le chrétien
ne doit pas être tiède, a insisté le Pape. C'est le plus grand danger
du chrétien.» Il a aussi fustigé une
grande idée, fausse à ses yeux, mais issue de l'esprit de ce concile,
selon laquelle les chrétiens pouvaient désormais «faire l'Église»,
c'est-à-dire inventer une nouvelle Église catholique. Nul ne peut «faire
l'Église», a-t-il rétorqué en improvisant devant les membres du synode.
Chacun doit seulement «faire connaître ce que le Christ a fait».[…] Il a encore insisté, mercredi matin,
lors de l'audience générale: «Il faut revenir aux textes du concile en
le libérant d'une masse de publications qui, souvent, au lieu de les
faire connaître, les ont cachés.»Redécouvrir donc le vrai concile
mais, en attendant, le tableau dressé en introduction des travaux du
synode par les rapporteurs continentaux sur la situation de l'Église
catholique est inquiétant. Le cardinal Peter Erdö, archevêque de
Budapest en Hongrie et président du Conseil des conférences épiscopales
d'Europe, l'a constaté crûment: «Dans la plus large partie du continent,
c'est l'ignorance à propos de la foi chrétienne qui se répand», avec
«une perte de la mémoire et de l'héritage chrétiens».De fait, ce
sont «les évêques européens» qui apparaissent «les plus déprimés et les
plus démoralisés», rapportent les observateurs du Vatican chargés de
relater les débats à la presse. D'où la nécessité de retrouver une
nouvelle vigueur, ce qui a poussé Benoît XVI à lancer en ce 11 octobre
une «année de la foi» car il lui apparaît capital qu'un demi-siècle
après le concile, les catholiques puissent redécouvrir leur foi qu'ils
connaissent mal. Il en a confié l'animation à Mgr Rino Fisichella,
un brillant prélat italien qui en a résumé l'esprit, mardi: «On a trop
bureaucratisé la vie sacramentelle», assure-t-il. Conséquence: «nous
apparaissons fatigués, répétant des formules obsolètes qui ne
communiquent pas la joie de la rencontre avec le Christ et nous sommes
incertains sur le chemin à prendre. Nous nous sommes renfermés sur
nous-mêmes, montrant une autosuffisance qui empêche les autres de nous
aborder comme une communauté vive et féconde, générant des vocations».
Il précise: «nous avons perdu la crédibilité. Oppressés par le contrôle
de notre langage, nous sommes craintifs dans nos prises de paroles». […]"