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Histoire du christianisme

Les 2 conceptions du droit

Du Pr Pichot-Bravard sur Le Rouge et le Noir :

"Depuis l’Antiquité, deux conceptions du droit s’affrontent.

Les uns définissent le droit comme l’expression de la volonté de ceux qui exercent la souveraineté.

Les autres considèrent que le droit est «  cela qui est juste  »,
qu’il est un art, l’art d’attribuer à chacun la part qui lui revient
(Ulpien), l’art de ce qui est « bon et équitable » (Celse). Ces derniers
estiment que les commandements de ceux qui exercent le pouvoir, que les
lois, ne sont légitimes qu’à la condition d’être justes
, à la condition
de respecter des principes de droit qui échappent à la volonté des
hommes et qui sont le reflet d’un ordre naturel objectif. Aristote a
ainsi distingué la justice naturelle et la justice positive. La
philosophie stoïcienne a affirmé l’existence d’une loi naturelle.
Inspiré à la fois par la philosophie aristotélicienne et par la
philosophie stoïcienne, Cicéron a donné de cette loi naturelle une
définition précise qui a nourri ultérieurement la réflexion des juristes
romains ou romanistes. De son côté, Saint Augustin a défini la loi
comme l’acte permettant de faire régner la justice, estimant qu’une loi injuste n’est pas une loi et que personne n’est tenu d’y obéir, conviction qui nourrit profondément les mentalités médiévales, dominant les esprits jusqu’au XVIIe siècle au moins.

Dans l’Ancienne France existait une véritable « Etat de Justice » permettant, par delà l’inévitable imperfection des institutions humaines, la soumission du Souverain au Droit.

Cet « Etat de Justice » était nourri :

1- Par la conviction que la première mission du Roi, celle qui fonde sa légitimité, est de faire régner la Justice dans son royaume, ce qui implique, notamment, qu’il se soumette aux lois fondamentales et au droit naturel ;

2- Par la réflexion des canonistes : ceux-ci ont défini pour
l’Eglise des concepts juridiques que les légistes du royaume de France
ont ensuite repris et appliqué à la Chose publique : par exemple, l’idée
qu’il existe un statut général de l’Eglise, corpus de règles s’imposant
au pape, idée reprise par Jean de Terrevermeille lorsqu’il a affirmé en
1419 l’existence d’un Statut du royaume constitué de règles supérieures à la volonté du Roi et l’empêchant, concrètement, de disposer de la Couronne et d’aliéner le domaine de la Couronne ;

3- Par certaines maximes de droit romain, notamment la constitution Digna Vox, qui date de 429 ;

4- Par la rhétorique des Cours souveraines, en particulier celle du Parlement de Paris, qui ont, depuis la première moitié du XIVe
siècle, reçu du Roi la mission de vérifier, lors de l’enregistrement
des lettres du Roi, si celles-ci ne comprennent pas de dispositions
contraires à la justice et à la droite raison, et, qui ont, dans ce cas,
le devoir d’attirer l’attention du monarque en lui adressant de « très
humbles remontrances ». Se servant de ce devoir de conseil, les Parlements se sont prétendus, à partir de la fin du XVe siècle, le « Sénat du royaume », vérifiant que les lois du Roi sont conformes aux lois du Royaume. C’est là la lointaine origine de notre contrôle de constitutionnalité des lois.

La consistance de cet « Etat de Justice », et le souci des magistrats
de faire régner l’équité, assurait le respect du droit naturel. A cet
égard, Louis XV, lors de la réforme du chancelier Maupeou, affirme qu’il
est « dans l’heureuse impuissance » de porter atteinte à la vie, à
l’honneur et à la propriété de ses sujets.

Le droit de la famille, mariage et filiation, échappait presque entièrement à l’Etat, relevant du droit canonique. [Lire la suite]"

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