De Jean-Yves Naudet :
"La fameuse TVA, dite sociale ou maintenant « contre les délocalisations » […] est l’aboutissement d’un long processus, qui a peu à peu fait disparaitre la notion d’assurances sociales au profit d’une grande machine monopolistique et redistributrice qui n’a plus rien à voir avec l’assurance. Les assurances sociales sont mortes, reste un monstre bureaucratique et nocif, la Sécurité Sociale.
La question de la protection contre les risques de la vie est aussi vieille que le monde. Au moyen-âge, et même jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, en dépit des tentatives de réformes de Turgot, c’était les corporations professionnelles qui organisaient la sécurité et la protection contre les risques de la vie. Turgot avait compris qu’elles avaient vieilli, bloquant l’innovation et détruisant la liberté du travail. Le décret d’Allarde a fini par les détruire en 1791.
La question de la protection demeurait entière. La loi Le Chapelier, toujours en 1791, puis la limitation des possibilités de libre association au début du 19° ont empêché les sociétés de secours mutuel, organisées librement entre salariés, de jouer ce rôle ; les textes ont été très restrictifs tout au long du 19° siècle, le pouvoir ayant toujours eu la tentation de mettre la main sur elles, d’en limiter la liberté et de les contrôler, voire de les détruire. Pourtant, quoi de plus logique que d’utiliser un système soit mutualiste, soit assuranciel, pour faire face à des événements indépendants les uns des autres ? Tout le monde ne tombe pas malade ou ne devient pas chômeur le même jour. C’est donc en général un problème techniquement assez facile à résoudre, comme celui des assurances incendies, accidents de véhicule ou vol.
L’Etat a toujours eu la tentation de contrôler ces systèmes, sous divers prétextes. Inventée par Bismark partisan de l’Etat arbitre dans la lutte des classes, perfectionnée par Beveridge au nom de l’Etat Providence, la Sécurité Sociale est apparue en France sous le régime de Vichy, puis paradoxalement dans le programme du Conseil National de la Résistance. Elle souffre de plusieurs vices de constitution : c’est un organisme étatique (en dépit des fausses apparences de la gestion par les « partenaires sociaux »), c’est un monopole obligatoire, comme seuls les monopoles publics peuvent l’être (nul ne peut y échapper ni choisir un autre mode de protection), c’est un mélange opaque de systèmes et de régimes.
En effet, dans la Sécu, on trouve tout d’abord les retraites […]. Il y a ensuite l’assurance maladie et accidents du travail, qui relève de la logique classique de couverture de risques indépendants Il y a encore le régime famille, destiné à redistribuer, à revenu égal, des familles avec pas ou peu d’enfants vers les familles ayant plusieurs enfants ; il n’a cessé d’être dévoyé en introduisant des conditions de ressources, alors que la vraie politique familiale consisterait d’abord à laisser aux familles ce qu’elles ont légitimement gagné, au lieu de les spolier par les cotisations et l’impôt. Il y a enfin (mais en dehors de la Sécu) les assurances chômage, avec à nouveau un problème classique d’assurance.
[…] la distinction entre cotisations salariales et patronales purement illusoire – puisqu’il s’agit toujours de retenues sur des salaires – conduit à masquer au salarié ce que lui coûte « sa » protection. Quel salarié, touchant net 2000 euros, sait qu’en réalité il a acheté (contraint et forcé) 1500 euros de protection sociale ? […].
Une autre tromperie est de laisser croire que la Sécurité Sociale est une institution d’assurance (comme au bon vieux temps des « assurances sociales ») et d’assimiler les cotisations à des primes. Or, les cotisations, même s’il existe un plafond, dépendent du revenu. Que dirait-on si l’assurance auto dépendait non du type de voiture ou du choix libre de l’assuré, mais du revenu de l’automobiliste? […] On doit ajouter qu’en principe un contrat d’assurance est volontaire et offre des options diverses à l’assuré. Rien de tel : non seulement il y a obligation de s’assurer (ce qui à la limite peut se défendre dans un système par répartition), mais il n’y a pas de choix ni de la formule d’assurance, ni de l’assureur. […]
La TVA sociale, même si elle vise à compenser les cotisations familiales et non les cotisations maladie, parachève cette déconnection : un touriste va financer par ses achats la Sécu dont il ne bénéficie pas ; plus généralement le lien entre cotisant et assuré est rompu. Au fond, la TVA sociale ne fait que poursuivre dans la voie précédente : fiscaliser les cotisations. Les « assurances » sociales sont mortes, définitivement ; il est vrai qu’elles avaient un pied dans la tombe depuis longtemps. Nous sommes au bout de la logique du Big Brother redistributif, qui coûte de plus en plus et rembourse de moins en moins."
Philippe Edmond
La TVA sociale a pour but de compenser un problème de financement de la redistribution sociale. Dans un monde a frontières ouvertes, asseoir celle ci sur les salaires favorise les délocalisations. Il faut donc que la fiscalité sociale porte sur un élément non délocalisable et proche des populations, la consommation. Ce basculement déchargerait l’emploi et les entreprises d’un poids qui réduit l’emploi en France.
La difficulté que pose cette mesure est qu’il n’est pas possible de savoir comment les bénéfices de celle ci seront partagés. Une entreprise produisant en France sera en tout cas favorisée pour pouvoir baisser ses prix de vente hors TVA par rapport aux entreprises étrangères.
Nathanaël
Les assurances sociales sont mortes depuis que les cotisations qui les financent ne sont plus assises sur les seuls revenus du travail salarié, mais aussi sur ceux du capital (CSG etc), alors que que – sauf les prestations familiales qui d’ailleurs ne ressortissent pas au principe de l’assurance – les situations qu’elles sont censées indemniser (maladie, chômage et retraite) ne relèvent que de la condition salariée.
A ma connaissance, la détention d’un quelconque capital, dont les revenus sont assujettis à la CSG etc, n’ouvre pourtant pas droit à aucune assurance maladie ni pension de retraite.