De Jeanne Smits à propos de l’arrêt de la Cour Suprême à propos de l’avortement :
[…] Beaucoup ont noté que les cinq juges qui ont adopté l’opinion Dobbs sont tous catholiques.
Comment ne pas ressentir une gratitude émue en constatant que Roe est tombée en la fête du Sacré-Cœur, que nous fêtons en ce mois de juin à rebours des « Gay Prides » du monde qui s’autoproclame maître des avancées sociales ? Comment ne pas trembler d’émerveillement devant la date ce cette victoire, le 24 juin, jour de la saint Jean-Baptiste qui tressaillit de joie dans les entrailles de sa mère devant le Messie, Fils de Dieu, âgé de quelques jours à peine dans le sein de la Bienheureuse Vierge Marie ?
Comment ne pas se rappeler qu’en la fête de l’Annonciation, il y a trois mois à peine, le pape François consacrait la Russie, l’Ukraine et le monde au Cœur Immaculé de Marie ?
Cette « opinion » des juges suprêmes américains, adoptée par cinq voix contre quatre, produit un premier effet immédiat : dans plus de vingt Etats américains, de l’Arkansas au Wyoming, l’avortement n’est plus légal du fait de lois prévoyant que la fin de Roe v. Wade déclencherait automatiquement les dispositifs de protection de la vie. Dans pas moins de treize Etats, parmi lesquels le Texas, le Mississippi, la Louisiane… l’avortement serait automatiquement interdit (avec une seule exception, le danger pour la vie de la mère, cas où on peut en effet discuter de l’opportunité d’une sanction pénale).
Le droit de l’avortement rendu aux Etats, pour le meilleur et pour le pire
Ailleurs, c’est la prochaine étape de la bataille qui commence : il appartient désormais aux politiques et aux militants de nombreux autres Etats d’œuvrer pour la mise en place de lois pro-vie, avec la certitude enfin que la victoire est possible.
Les législateurs américains pourront même aller plus loin, puisque désormais rien n’empêche les membres du Congrès de mettre sur pied l’interdiction totale de l’avortement aux Etats-Unis au niveau fédéral.
En proclamant vouloir « rendre au peuple et à ses représentants élus leur autorité sur la régulation de l’avortement », la Cour suprême ne va certes pas jusqu’à proclamer le caractère inconstitutionnel de l’avortement légal dans l’ensemble des Etats-Unis. Mais elle interprète de la manière la plus exacte et la plus stricte, la plus juridique possible un texte malmené depuis cinquante ans pour empêcher les Etats hostiles au massacre des innocents de mettre en œuvre leur volonté politique à cet égard. Les juges n’ont pas mâché leurs mots : « Tout comme l’infâme décision dans l’affaire Plessy v. Ferguson, Roe était aussi notoirement entachée d’erreur et en contradiction avec la Constitution, depuis le jour où elle a été rendue. »
Plessy v. Ferguson est la décision par laquelle la ségrégation raciale fut autorisée dans les écoles des Etats-Unis au motif que les enfants d’ethnies différentes étaient dans ce cadre certes « séparés », mais « égaux ». Dobbs insiste beaucoup sur cette affaire pour montrer que la jurisprudence de la Cour suprême ne saurait être considérée comme contraignante, gravée dans le marbre, même pour protéger la stabilité de l’interprétation de la loi au bénéfice des citoyens qui ont le droit de savoir où ils en sont, dès lors qu’elle peut être fausse, voire scandaleuse. Voir mettre sur un même plan Plessy v. Ferguson et Roe v. Wade constitue, il faut bien le dire, un plaisir rare. […]
On peut dire qu’en dépit de ses imperfections et de nombre de décisions contestables, notamment au sujet de la crise du COVID, Donald Trump a été le moyen par lequel les autorités fédérales des Etats-Unis ont été privées de leur pouvoir de nuisance vis-à-vis des enfants à naître. Du fait de l’existence d’un mouvement pro-vie fort et cohérent, qui a su imposer la fin de la légalité fédérale de l’avortement comme sujet incontournable de toutes les campagnes politiques nationales, il a, nolens volens, épousé leur cause.
C’est lui qui a nommé trois des cinq juges suprêmes à l’origine du renversement de Roe v. Wade (Gorsuch, Kavanaugh et Amy Coney Barrett). Il avait promis des nominations solides à la Cour suprême, et il a tenu parole. Il a choisi des juristes hors pair, soucieux d’une interprétation stricte de la Constitution américaine. Et contrairement à ce que peut penser aujourd’hui toute la gauche américaine, il a mis fin au « gouvernement des juges », c’est-à-dire au pouvoir exorbitant de magistrats qui ont imposé leur idéologie progressiste et post-moderne en sollicitant le texte fondateur des Etats-Unis. […]