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Histoire du christianisme

Les Conciles et la foi

Les Conciles et la foi

Recension de Marion Duvauchel sur l’ouvrage du père Charles Mallard, vicaire épiscopal, curé de la cathédrale de Toulon sur l’Histoire de la foi en suivant les conciles. Le Salon beige ne soutient pas toutes les remarques formulées :

Reconstituer une histoire de la foi en suivant les conciles, voilà qui est à la fois malin et ambitieux. Mais c’est non sans raison que l’auteur nous prévient : nous ne pouvons ni ne devons en effet « nous contenter d’une histoire qui s’arrêterait à la Pentecôte pour se prolonger par une vague diffusion de la religion avec des haut et des bas selon les époques ». Une histoire de la foi, cela s’appelle une histoire théologique : il s’agit d’examiner « ce que l’esprit a inspiré à nos Pères » en suivant le fil rouge des ces assemblées improbables confrontés à deux grands soucis : la vérité théologique et la discipline ecclésiastique.

Suivre les conciles, soit. Oui mais lesquels ? Parce qu’il y en a eu beaucoup, beaucoup. Il faut suivre les plus significatifs, ceux que l’histoire ecclésiastique et théologique a retenus. Encore fallait-il les situer dans les vicissitudes de l’histoire pour mieux comprendre les enjeux, les ruptures et sous la pierre, le lézard de l’unité de l’Église, qui s’enfuit dès qu’on la soulève.

En huit chapitres, de l’Assemblée de Jérusalem au concile de Vatican II, ce petit livre précis et synthétique expose les principales étapes de cette histoire théologique et les problèmes que l’Église a affrontés au long des quelque vingt et un siècles de son histoire.

Tout commence sans surprise avec le « concile (ou assemblée) de Jérusalem, fondateur de la démarche conciliaire et de ses principes : « la collégialité », « l’inspiration » et « la dimension théologique ».

Les 4 premiers conciles (ceux qui suivent l’Assemblée de Jérusalem) sont des conciles fondateurs de quelque chose de nouveau : «  la recherche d’une juste expression de la foi ». L’Église de Rome n’est encore qu’un patriarcat comme Alexandrie, Constantinople, Antioche et Jérusalem.

Chaque concile fait l’objet d’un document final : et c’est ce document qui expose la décision prise sur le point discuté car si le concile est un lieu de discussions, parfois âpres, il est là pour décider, pour trancher. La réception de la décision est une toute autre affaire.

On est bien d’accord avec le père Mallard que cette recherche d’une expression juste de la foi demande une grande humilité, mais on ne peut que constater combien cette humilité est souvent absente tout au long de cette histoire conciliaire. L’affrontement Cyrille/Nestorius en est l’un des moments les plus navrants.

Avec ces premiers conciles s’ouvre aussi l’histoire des hérésies et des premières ruptures : ce qu’on appelle un schisme. Le concile de Nicée (325) est lié à Arius et à l’arianisme dont il est l’instigateur. Le concile de Constantinople, qui suit, peut s’analyser comme la prolongation des soucis provoqués par l’arianisme. Les deux conciles suivants, celui d’Éphèse en 431 et celui de Chalcédoine en 451 compromettent plus encore la paix théologique, déjà bien fragile. Mais c’est le concile de Chalcédoine qui fait apparaître les Églises dissidentes : la copte, l’église jacobite et l’Église d’Arménie.

C’est aussi le moment où Rome se présente comme un vecteur de conciliation et d’arbitrage. D’un côté l’évêque de Rome, de l’autre les patriarcats orientaux.

Des quatre premiers conciles, on passe aux quatre derniers du premier millénaire : « Dans l’Église indivise ». C’est une période conciliaire sous le signe de Byzance (de 553 à 870) dans la mesure où trois de ces conciles se déroulent à Constantinople et un autre à Nicée. Ils reflètent la fracture entre un Orient monophysite (Byzance) et un Occident orthodoxe.

L’analyse de toute cette période est concise et vraie et l’une des conséquences les plus lourdes est bien « la lente dérive entre Orient et Occident ». Trois mouvements divergents sont repérés : l’autorité pontificale et la centralisation romaine qui en est le corollaire d’un côté ; de l’autre, une sorte de « nationalisme ecclésiastique » byzantin.

Cependant, le troisième mouvement n’est pas tout à fait de même nature car il touche les pays désormais sous domination musulmane qui vont connaître une évolution particulière liée au fait qu’ils sont en situation de survie. C’est le christianisme oriental, les « chrétiens de l’Orient, ceux qu’on appelle improprement les « Nestoriens » (le père Mallard ne le souligne pas suffisamment) dont l’histoire tragique émerge aujourd’hui au sein de notre monde catholique romain, sans réellement réussir à faire entendre sa voix.

Par ailleurs, Orient et Occident sont des catégories à la fois vagues et chargées d’histoire. L’Orient, c’est d’une part l’Orient « byzantin » ou si l’on préfère sous tutelle byzantine, et d’autre part l’Orient sous domination musulmane. Mais il y a aussi un Orient méditerranéen. L’Orient, c’est vaste, et l’Occident ce n’est encore qu’un « petit cap asiatique ».

De ce fait, la conclusion du chapitre III apparaît comme le propos optimiste d’un pasteur : « la séparation entre l’Orient et l’Occident ne peut être acceptée comme une évolution inéluctable de l’histoire, mais plutôt comme un défi à relever ».

Le chapitre IV fait apparaître le Moyen âge tardif. Qu’est-ce qui change ? D’abord, les conciles sont désormais convoqués par le pape (et non plus reconnus par lui) et surtout il se déroulent en Occident. Depuis le VIIIe siècle, l’islam a coupé la Méditerranée en deux, donnant naissance à cette Europe qui est une « Méditerranée basculée vers le Nord ». L’empire carolingien n’a pas duré. Et surtout la conquête de l’islam a entraîné des troubles dans trois des cinq patriarcats : Antioche, Alexandrie et Jérusalem avec pour conséquences l’effacement progressif de l’autorité de ces patriarches et un isolement des Églises « d’Orient ». Puis une longue histoire en régime de survie et de persécutions plus ou moins dures.

L’autorité pontificale commence alors à s’imposer ou du moins à se rendre davantage visible.

Désormais, les conciles suivants se déroulent en régime « romain ». Quatre conciles se déroulent à Latran, suivi de celui de Lyon. Ils soutiennent et reflètent la lente et persévérante réforme grégorienne. Désormais, la papauté occupe l’avant-scène et l’histoire des conciles devient celle de conflits entre l’autorité du pape et celle du concile.

Au schisme qui a divisé l’Église entre orthodoxes et romains (Orient/Occident) vient s’ajouter un schisme au sein de l’Occident même.

Au premier millénaire, l’effort portait sur l’indépendance de l’Église vis-à-vis du pouvoir politique. Latran V et le concile de Trente porte l’effort sur la « primauté du pastoral sur le financier ». Et c’est à Trente que les sacrements prennent une dimension dogmatique.

Trois siècles passent. Les conciles se sont raréfiés. On n’en retient que deux : Vatican I et Vatican II, les deux derniers chapitres de ce petit livre éclairant. La liberté, liberté chérie, la liberté, souligne l’auteur, est devenue le maître mot. Et « cette liberté revendiquée par les libertins, les libertaires et par le libéralisme s’oppose à l’institution ecclésiastique ».

A la perte du pouvoir temporel, le pape répond en développant la dimension spirituelle de son action. Il définit en 1854 le dogme de l’Immaculée conception, et dix ans plus tard, il publie l’Encyclique Quanta Cura, accompagnée du Syllabus qui condamne quelques 80 propositions du modernisme. L’Église se divise une nouvelle fois : d’un côté les intransigeants, de l’autre les libéraux. Face aux attaques contre l’Église, une parade : le concile. Deux problématiques majeures se mettent en place : l’infaillibilité pontificale et le rapport foi et raison. C’est Vatican I qui va geler les problématiques et les fixer dans une opposition devenue centrale et presque dogmatique.

La guerre interrompt ces réunions mouvementées sur des questions qui aujourd’hui n’intéressent plus que les milieux que l’auteur nomme les « intransigeants ». Il semble qu’aujourd’hui on les appelle les « tradis ».

Last but not least, le concile Vatican II. Comme pour chaque chapitre, l’auteur définit les grands changements de sociétés et leur impact sur l’Église à la moitié du XXe siècle. Un nouveau schéma de l’Église est présenté ; des sujets délicats sont disputés (le diaconat, le pouvoir épiscopal ; le schéma de l’œcuménisme). Car l’Église propose des « schémas ». Mais bien d’autres thèmes sont abordés. Un archevêque « propose qu’on accepte le remariage du conjoint innocent ». Le sujet est vite clos et on s’en tient à l’indissolubilité du mariage. L’archevêque s’appelait Zoghbty, je suggère qu’on retienne ce nom. L’idée n’était pas si bête. Le père Mallard ne se prononce pas.

Le lecteur ou la lectrice aurait apprécié sans doute quelques pages conclusives, ces pages où souvent l’auteur s’autorise à faire entendre l’écho de sa pensée profonde sur quelques points délicats. Dans sa sagesse prudentielle, le père Charles a préféré clore son ouvrage sur le dernier point du concile de Vatican II : l’appel universel à la sainteté.

Cela dispensait en effet de toute conclusion.

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2 commentaires

  1. La conclusion de tout cela est pourtant évidente : le concile V2 a totalement détruit toute velléité de respect et d’amour pour la Tradition ! Et justement , il y avait une seule chose à surtout ne pas toucher , c’était la Messe de St Pie V !!! Depuis plus de 60 ans , on a pu assister , avec peine et effarement , à l’auto-destruction de notre église , bien orchestrée par des Bugnini et autres démolisseurs de la foi ! Mais tout ça , ce n’est pas nouveau , on le sait , malheureusement !

  2. Il faut bien savoir qui est – il, le père Mallard ? Si je ne me trompe pas, le fils de l’amiral Mallard, que j’ai connu à l’époque.
    La prudence, le silence et les non dites, qu’il démontre, concernant le désastre du Concile Vatican 2, selon l’article, est un calcul bien connu de ceux qui ont l’expérience de la carrière et qui la mettent en avant, devant la véracité.

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