Pour la première fois depuis l'hiver 1982-1983, la France a été, en
octobre, importatrice nette d'électricité auprès de ses voisins
européens. le mois d'octobre a été marqué par de nombreux arrêts des
réacteurs nucléaires français. Ainsi, début novembre, près d'un
réacteur sur trois ne produisait toujours pas d'électricité. Une partie
de ce manque de production est imputable aux grèves intervenues ce
printemps chez EDF, qui ont désorganisé le planning de maintenance et
de rechargement en uranium des réacteurs.
Les grèves chez EDF obligent la France à importer de l’électricité
8 commentaires
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Jeannette
La tactique est subtile et l’exécution lente, si bien que mon titre peut paraître bien indûment catastrophiste. Il n’en est pourtant rien. Dans deux domaines majeurs et structurants pour l’économie française dans son ensemble, nous sommes à un point où le démantèlement de ce à quoi les français étaient attachés commence : l’électricité et le transport ferroviaire.
1) Dans le domaine de l’électricité
Du fait de la pression de Bruxelles, EDF va bientôt devoir vendre à un prix inférieur à son prix de revient de l’électricité nucléaire (lire un dossier sur le très riche site Euractiv).
La France avait fait, avec le choix du nucléaire et du quasi-monopole d’EDF, un pari sur la production d’énergie à bon marché, propre à favoriser le développement d’activités notamment industrielles (mais aussi tertiaires : il faut pas mal de watts pour faire tourner les serveurs de Google et ceux de la fondation Hulot).
La France va devoir manger son chapeau et commencer par subventionner l’activité de concurrents d’EDF.
Il faut bien comprendre ce qui va se passer : l’électricité pas chère qui bénéficiait à tous, c’est fini. Demain il faudra des producteurs concurrents qui feront monter les prix (comme en Californie). En attendant, dans la phase transitoire, la rente nucléaire qui était redistribuée aux français via un courant pas cher, va être versée aux Poweo et autres marketeurs qui achèteront, à un prix encore inférieur au coût de revient, donc subventionné, une électricité qu’ils se contenteront de revendre plus cher aux français.
Avantage technologique pour l’économie française : rien.
Avantage économique : rien.
Avantage idéologique : Bruxelles sera contente de voir un marché français oligopolistique contrôlé par des boîtes privées plutôt qu’un monopole appliquant une stratégie nationale (rappel : le privé c’est sacré, le public c’est mal).
2) Même chose du côté du ferroviaire
RFF, la société qui gère les rails, va augmenter ses tarifs au détriment de la SNCF (Les Echos). Quelle raison ? Il s’agit de pomper la SNCF pour financer l’arrivée des concurrents de la SNCF. Une usine à gaz est en construction pour permettre à RFF d’être solvable alors que la SNCF ne le sera plus. Comme ça RFF pourra financer les aménagements qui bénéficieront à Véolia, et autres nouveaux entrants qui viendront écrémer le marché de transport en se positionnant sur les meilleures liaisons. La SNCF, elle, récupèrera les gares de banlieue et les petites liaisons, qui continueront de se dégrader lentement.
Ce que l’on reprochait aux services publics c’était de profiter de leur monopole pour, avec leurs services profitables, financer des activités dites de “service public” et faire indûment concurrence au privé. Dès aujourd’hui, le public est prié de lâcher au privé les activités rentables, et l’état est censé subventionner la partie qui fonctionnait autrefois à pertes. Sauf que les parties bénéficiaires ne sont plus là pour enrichir l’Etat et les budgets publics mais les actionnaires de groupes privés qui eux n’ont cure des obligations de services publics.
Par ailleurs, comme les transports ferroviaires et la production d’électricité (comme les télécoms) sont, en grande partie, des monopoles naturels, le coût global de ces oligopoles subventionnés sera supérieur au coût antérieur. C’était bien le public qui était économiquement efficace dans ces secteurs et le privé qui sera inefficace (essayez de demander à la SNCF l’évolution du prix moyen du kilomètre depuis dix ans : secret défense. Parce que les tarifs montent en prévision de l’arrivée de concurrents).
3) Sur les télécoms
Lisez à ce propos les billets très clairs et passionnants de Michel Volle, un ingénieur humaniste (sur le monopole naturel, les télécoms sont-elles un monopole naturel ?, les effets de la concurrence, France télécom et la divestiture, la catastrophe symbolique…)
Quelques extraits de Michel Volle, brillant comme toujours :
“Le régulateur aurait pu jouer le rôle d’une direction générale, et préserver l’efficacité du secteur si les entreprises avaient été non pas mises en concurrence mais associées en un partenariat. Mais la bataille entre les concurrents, sauvage, ne laisse aucune place à la coopération, au partage des résultats de la R&D ; elle brise la cohérence du réseau. Sous prétexte d’efficacité, là encore, le secteur gaspille en fait ses ressources.”
“…la Bourse est une foule sujette à des mouvements collectifs et rapides d’enthousiasme et de panique. Quand on la prend pour boussole, la tentation est forte (et, à vrai dire, irrésistible) de prendre de ces mesures d’« économie » qui accroissent le résultat immédiat en détruisant le potentiel de l’entreprise. Alors s’amorce une spirale descendante. On stérilise, comprime ou supprime la recherche. On se débarrasse des coûts, des soucis et des responsabilités, en sous-traitant la maintenance, la relation avec les clients etc. – mais cela ne fait qu’aggraver le problème de sureffectif qu’avait suscité l’automatisation.
Le slogan de l’« orientation client » recouvre une « orientation chiffre d’affaires » plus qu’une attention à la dynamique des besoins. On ne répond plus aux lettres de réclamation, on laisse la boucle locale se dégrader dans les zones jugées non rentables. La défense de la part de marché utilise les procédés mensongers de la publicité et du marketing « pied dans la porte ». La présentation du catalogue est délibérément compliquée, les factures séparées masquent au client le total de son budget en télécoms (les familles qui possèdent plusieurs téléphones mobiles, un ou deux accès à l’Internet à haut débit etc. sont-elles conscientes de ce qu’elles dépensent ?).”
Ce sont deux dossiers affreusement complexes mais parfaitement emblématiques de l’engrenage européen. Nous avions des sociétés publiques, en position de monopole ou de quasi-monopole, qui rendaient, de façon globalement convenable, un service au pays. Ce service était défini de façon stratégique, contractuelle et centralisée (avec des règles parfois de très grande complexité et fondées sur des calculs économiques poussés, comme la tarification au coût marginal pour EDF).
On peut regretter certains choix passés : l’obsession nucléaire d’EDF, la prime au TGV pour la SNCF, l’échec du fret… Soyons assurés qu’après éclatement de ces marchés dans les mains de 4 ou 5 intervenants privés, c’en sera de toute façon fini de toute réflexion stratégique et de tout questionnement en termes de politiques publiques.
L’Etat cachera bien la misère avec des obligations de service public de plus en plus mal financées, la splendeur passée des sociétés nationales permettra de masquer encore quelque temps leur misère, après quoi il n’en restera rien. Quelques services de luxe pour ceux qui pourront, et un service réduit ou plus strict minimum pour les autres. Avec la bénédiction du Parti Socialiste.
Edgar
La Lettre volée
jano
C’est encore une affaire aberrante.La France est dotée d’une puissance nucléaire EDF importante. Pourquoi laisser des grévistes maîtres du jeu pour une chose si nécessaire ? Mais certains articles sur ce sujet, tentent à démontrer que grâce aux éoliennes les Allemands viennent à notre secours!!! Une sorte d’action psychologique anti atome finalement.
Si depuis 6 mois le personnel avait été réquisitionné les centrales seraient opérationnelles.
jerome
Peut-être qu’un “insider ” EDF pourrait me répondre : les investissements hasardeux d’ EDF à l’étranger ne sont-ils pas peu ou prou la cause du manque de moyens pour faire face à l’entretien des centrales nucléaires ? avec pour conséquences des délestages à venir puisque le réseau n’est pas fait pour importer mais pour exporter …
SD
C’est le “service public”… Ni un service, ni pour le public !
“des producteurs concurrents qui feront monter les prix (comme en Californie).” : la Californie n’a pas assez de producteurs, trop anti écolo. C’est son drame : trop de demandes pas assez d’offres.
“Nous avions des sociétés publiques, en position de monopole ou de quasi-monopole, qui rendaient, de façon globalement convenable, un service au pays” : pléthoriques, surpayés, tout le temps en grève, népotisme (EDF), hors de prix…
L’état peut avoir une vision stratégique avec des entreprises privées : il suffit de l’inscrire dans le cahier des charges. Mais l’État est trop occupé à préparer la réélection de Nicolas Sarkozy
PG
On se souviendra combien on nous avait répété dans tous les médias que le manque d’électricité en Californie était dû au fait que là-bas les compagnies d’électricité, production et distribution, sont privées ; et que la recherche ”ultra-libérale” du profit pour leurs actionnaires boursiers égoîstes et leurs fonds de pensions maudits leur avaient fait négliger d’investir. Et que comparé à notre glorieux service public monopolistique et étatique les Californiens étaient vraiment bien malheureux.
Cela reposait sur deux mensonges :
– le secteur public est immensément coûteux, car on ne compare jamais les coûts lorsqu’on est dans la religion du ”public”, en alignant tarifs + déficits + subventions + impôts + gabegies diverses du type Comité d’entreprise et avantages sociaux indus, ou productivité médiocre,
– le secteur privé californien, pris comme bouc émissaire de toute privatisation avait été victime du lobbying des agriculteurs de l’arrière pays californien qui souhaitaient utiliser l’eau des rivières pour irriguer le désert et faire pousser des agrumes, au lieu qu’elle soit utilisée dans de nouveaux ouvrages hydro électriques.
Comme quoi le rôle de l’Etat n’est pas de produire de l’électricité ou d’attribuer des monopoles, même privés, comme celui quasi total d’EDF, mais d’arbitrer au nom de l’intérêt commun, lequel n’a rien à voir avec l’économie étatique, les monopoles publics, ou les concessions monopolistiques à des cartels financiers gérés par des énarques anciens Dir Cab de Bercy, voire anciens secrétaires d’Etat, tout ce petit monde se cooptant en rond, pour des intérêts particuliers co gérés avec les syndicats proches du PC, tandis qu’une structure de défaisance de l’endettement et du déficit d’EDF est financé par l’argent de nos impôts, en plus de nos factures d’électricité.
Passant (r)
“Demain il faudra des producteurs concurrents qui feront monter les prix (comme en Californie”
Rappelons que lors de la “libéralisation” du marché de l’électricité en Californie les “autorités” ont imposées :
– une séparation nette entre producteurs / transporteurs / distributeurs : le courant produit est mis en commun dans un “pool” géré par une superbe administration très très très compétente
– des prix fixés et administrés sur une longue période de transition
– l’interdiction d’importer de l’électricité depuis les états (y compris des états-unis) voisins
Résultat, avec une augmentation soutenue de la consommation, une forte hausse du prix du pétrole, la très grande difficulté de produire plus d’énergie renouvelable, l’opposition à l’hydro-électricité et au nucléaire pas écologiques, l’impossibilité légale de faire venir du courant moins cher de chez les voisins, les entreprises se sont retrouvées étranglée financièrement, incapables de dévelloper ou même d’entretenir les centrales et les lignes électriques.
D’où de gigantesques et brutales pannes en cascades.
Le rapport avec EDF ? Dans les deux cas une bande de technocrates étatistes super compétents prend des décisions aux conséquences catastrophiques sans jamais rendre de compte.
Il ne s’agit pas de défense du secteur privé ou de libéralisme, mais de dirigisme technocratique.
“On peut regretter certains choix passés : l’obsession nucléaire d’EDF, la prime au TGV pour la SNCF, l’échec du fret… Soyons assurés qu’après éclatement de ces marchés dans les mains de 4 ou 5 intervenants privés, c’en sera de toute façon fini de toute réflexion stratégique et de tout questionnement en termes de politiques publiques.”
L’obsession pour le train au détriment de tout autre moyen localement plus rentable/efficace (bus…) : c’est la SNCF publique.
Le flinguage du transport de fret par train en France : c’est le travail des cheminôts (syndiqués) de la SNCF publique.
La scission Rail / Train : mettre toute les dettes sur une obscure société pour faire croire que la SNCF publique est rentable et bien gérée.
Planquer tout un tas de coûts annexes (retraites entre autres choses…) sous le tapis : merci le SNCF publique.
La réflexion stratégiques ? Où donc ?
kantz
La réflexion startégique est faite par des gens qui ne sont plus du métier, des technocrates només politiquement, et payés pour amener une destruction des services publics.
Au XIX siècle, les réseaux ferroviaires étaient majoritairement privés, et jamais ils n’ont eu cette construction bizarre de séparrer réseau et traffic.
Chaque compagnie avait son réseau, ses trains et surtout ses employés qui connaissaient le dit réseau et se transmettaient ce savoir.
Ce découpage selon le pincipe néo-libéral du libre accés au résaux n’est qu’une de facette du sabordage de notre SNCF.
Cela ne vas amener qu’incohérence et apparente supériorité de la route.
C’est débile quand il faut résuire nos productions de gaz à effet de serre de 40% d’ici 2020 (11 ans) et 85% d’ici 2050, si nous voulons échapper à une catastrophe mageure pour l’humanité.
(Je sais qu’il existe des négationistes de l’effet de serre. J’ai étudiés leurs arguments et vérifié auprès de vrais spécialistes, dans le meilleur des cas ces révisionistes sont des autruches ou de munichois version 1938)
Papon
C’est pourquoi il sera sage à l’avenir de se munir d’un groupe electrogene, de même qu’il est judicieux de posseder un moyen de transport personnel.