Extrait de témoignages de prêtres dans Le Figaro :
[…] Confronté à la même problématique dans le Lot, en zone encore plus rurale, le père Florent Millet, recteur du sanctuaire de Rocamadour, a longtemps été vicaire général du diocèse, numéro deux de l’évêque:
«Quand j’étais vicaire général, j’ai vu des prêtres actifs, toujours prêts à aller partout, d’autres plus casaniers, d’autres toujours disponibles, d’autres toujours submergés. Les tempéraments et les caractères jouent, mais j’ai observé qu’un curé qui aime ses paroissiens est un prêtre heureux. Cela paraît simple, mais cela se vérifie. En revanche, si je ressentais un malaise aujourd’hui, il viendrait de la question liturgique. Nous étions arrivés à une situation paisible avec les prêtres traditionalistes et tout se passait bien. On peut comprendre que Rome veille à ne pas voir des chapelles particulières, mais les nouvelles restrictions nous compliquent les choses.»
Il y a peu encore, les prêtres ne critiquaient jamais le pape. Il apparaît dans ce tour d’horizon que plusieurs d’entre eux – requérant l’anonymat – ne tiennent plus cette réserve. À l’évocation d’un possible «malaise», les prêtres parlaient uniquement de «regards noirs»,de «changements de trottoir» et d’«invectives désobligeantes» dans la rue. C’était il y a deux ans, au paroxysme de la crise de la pédophilie. Aujourd’hui, certains d’entre eux, qui ne sont pas des extrémistes, mettent en lumière «une immense perte de confiance dans le pape François».
«Beaucoup de prêtres de moins de 50 ans sont décontenancés parce qu’ils ont l’impression que François sème le trouble, la division et qu’il est toujours dans la dénonciation du cléricalisme, confie l’un d’entre eux. J’ai tout abandonné pour suivre le Christ, pas pour exercer un pouvoir! Or, enseigner clairement l’Évangile serait devenu du cléricalisme? Certains fidèles nous reprochent d’être vieux jeu quand nous enseignons ce que l’Église professe. Le pape, objectivement, ne représente plus un signe de communion. Il y a un trouble chez les prêtres parce que nous vivons une crise de confiance.»
Un autre, dans le même registre, ajoute:
«Quand nous regardons vers Rome, qui a toujours été un cap, un phare, une terre ferme, on nous dit: “On ne veut plus de prêtre comme vous.”Il faut se justifier de porter un col romain. Le pape nous donne l’impression qu’il ne nous comprend pas et qu’il ne nous aime pas. Nous restons fidèles, comblés par les joies de notre ministère, mais nous sommes désemparés et beaucoup de catholiques le sont avec nous. Si nous tenons c’est grâce aux jeunes, très motivés, qui montrent l’arrivée d’une nouvelle génération bien dans son temps et qui n’a pas honte de se dire catholique. Pas identitaires, ils attendent qu’on leur parle de la foi chrétienne. Ce sont eux l’avenir.»