Un lecteur me signale cet article d’Aleteia, indiquant que “le cardinal Sarah défend le motu proprio” Traditionis Custodes. L’article fait référence à l’entretien donné par le cardinal au Figaro, et dont voici l’exacte réponse :
Vous avez été préfet de la Congrégation pour le culte divin, en charge de la liturgie. Quel regard portez-vous sur les tensions actuelles chez les fidèles autour du motu proprio « Traditionis custodes » restreignant l’usage de la liturgie latine ancienne ?
Toucher à la liturgie est toujours très délicat. Elle est l’expression de notre relation intime avec Dieu dans la louange et l’amour. Je crois que le pape François a clairement expliqué son intention dans les diverses visites ad limina des évêques français et polonais. Son but n’est absolument pas de supprimer la liturgie ancienne. Il est conscient que de nombreux jeunes et des familles y sont intimement attachés. Et il est attentif à cet instinct de la foi qui s’exprime dans le peuple de Dieu. Il ne s’agit donc pas, chez eux, d’une nostalgie de personnes âgées. Le pape a demandé d’appliquer ce texte avec souplesse et sens paternel. Il sait bien que ce qui a été sacré pour tant de générations ne peut du jour au lendemain se trouver méprisé et banni.
Je crois au contraire que le pape attend que la liturgie actuelle s’enrichisse de ce que la liturgie ancienne a de meilleur. De même, il attend clairement que la liturgie ancienne soit célébrée dans l’esprit de Vatican II, ce qui est parfaitement possible. Elle n’est pas et ne doit pas devenir un prétexte pour les contestataires du concile.
Je ne sais pas si cette réponse constitue réellement une “défense” du motu proprio. J’y vois personnellement une volonté légitime d’interpréter les actes du pape dans une logique, toute ratzinguérienne, d’herméneutique de la réforme dans la continuité. Mais cette interprétation a des limites car, comme pour sa position sur l’immigration, rappelée avec justesse par Sonia Mabrouk sur Europe 1, il y a une marge évidente entre la position du cardinal Sarah et le pape. Ou alors il faut m’expliquer comment l’application du motu proprio dans le diocèse de Rome (interdiction de tout sacrement -hors la messe- selon la liturgie traditionnelle et interdiction de la célébration du Triduum pascal selon le missel de 1962) constitue une application “souple et paternelle”, car je n’ose croire que le décret pour le diocèse de Rome ne puisse pas refléter la volonté du pape. Et ce dernier expliquait dans sa lettre accompagnant le motu proprio, que ce dernier est principalement dictés par deux principes, dont celui de “pourvoir au bien de ceux qui sont enracinés dans la forme de célébration précédente et ont besoin de temps pour revenir au Rite romain promulgué par les saints Paul VI et Jean-Paul II“. Si le but exprimé ici n’est pas de supprimer in fine la liturgie ancienne, alors quel est-il ?
Que le cardinal Sarah s’interdise de critiquer les paroles et les actes du Saint-Père, c’est tout à son honneur, mais il ne faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages.