2 affaires concomitantes : l'affaire Marwa et une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au sujet de la loi Claeys-Leonetti.
Le juge des référés du Conseil d’État confirme l’injonction de reprendre les soins de Marwa :
"1. Dans l’ordonnance de ce jour, le juge des référés du Conseil d’État commence par rappeler qu’il doit exercer un office particulier s’agissant d’une décision d’arrêt de traitements. En principe, le juge du référé-liberté, qui se prononce dans un très bref délai, ne peut faire cesser une atteinte à une liberté fondamentale que lorsqu’elle est manifestement illégale. Toutefois, s’agissant de la décision d’interrompre ou de ne pas entreprendre un traitement au motif qu’il traduirait une obstination déraisonnable, dont l’exécution porte atteinte à la vie de manière irréversible, le juge des référés ordonne les mesures de sauvegarde dès lors qu’il estime que cette décision ne relève pas des hypothèses prévues par la loi.
2. Le juge des référés du Conseil d’État examine ensuite si les conditions posées par la loi pour interrompre les traitements d’une personne hors d’état d’exprimer sa volonté (procédure appliquée par l’hôpital) étaient remplies. Il se place dans le cadre de sa jurisprudence récente (CE, Assemblée, 24 juin 2014, Mme Rachel L. et autres), qui prévoit que le médecin en charge doit se fonder sur un ensemble d’éléments médicaux et non médicaux dont le poids respectif dépend des circonstances particulières à chaque patient. En l’espèce, le juge des référés du Conseil d’État estime qu’au vu des éléments médicaux et non médicaux, les conditions posées par la loi n’étaient pas remplies. Il relève, d’une part, que des éléments d’amélioration de l’état de conscience de l’enfant ont été constatés et qu’il existe, aujourd’hui, une incertitude sur l’évolution future de cet état. Dans ces conditions, malgré le pronostic extrêmement péjoratif établi par les experts médicaux, il juge que l’arrêt des traitements ne pouvait être regardé comme pris au terme d’un délai suffisamment long pour évaluer de manière certaine les conséquences des lésions neurologiques.
Le juge des référés relève, d’autre part, que faute de pouvoir rechercher quelle aurait été la volonté de l’enfant, qui avait moins d’un an à la date de la décision, l’avis de ses parents revêt une importance particulière. Or ceux-ci s’opposent de manière unanime à l’arrêt des traitements. Au vu de ces éléments, le juge des référés estime que la poursuite des traitements, dans les circonstances de l’espèce, ne caractérisait pas une obstination déraisonnable, n’ayant pour d’autre effet que le maintien artificiel de la vie. La décision d’arrêter les traitements de l’enfant ne relevait donc pas de l’hypothèse d’interruption de traitement prévue par la loi à l’égard des personnes hors d’état d’exprimer leur volonté.
Dès lors qu’il constate que la décision ne pouvait pas être prise par le médecin dans le cadre de cette procédure, le juge des référés ne se prononce pas sur la question de savoir si cette procédure était applicable ou bien si, s’agissant d’un mineur, le consentement des parents à l’arrêt de traitement était nécessaire. Le juge des référés du Conseil d’État rejette donc l’appel de l’AP-HM. Celle-ci demeure ainsi tenue, en vertu de l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille, de poursuivre les soins de l’enfant."
Le Conseil Constitutionnel a été saisi le 3 mars par le Conseil d’Etat d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au sujet de la loi Claeys-Leonetti. L’Union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés (UNAFTC) conteste le texte d’application, mais en fait la loi elle-même. Ce texte, dit l’association, va
« à l'encontre de l'article 34 de la Constitution française, qui prévoit que la loi fixe les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques ».
Car la loi Leonetti-Claeys
« confie au pouvoir réglementaire le soin de définir la procédure collégiale, sans garantir ni le caractère collégial de la décision de limitation ou d'arrêt des traitements d'un patient hors d'état d'exprimer sa volonté, ni l'exercice d'un recours suspensif contre une telle décision ».
Il manque dans cette loi
« des garanties légales aux exigences constitutionnelles de sauvegarde de la dignité de la personne humaine (Droit à la vie, article 2 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen) et du droit à un recours juridictionnel effectif (article 16 de la DDHC) ».
Le Conseil constitutionnel devra se prononcer, également « à la demande du Conseil d'État, sur la sédation profonde et sur le lien entre obstination déraisonnable et arrêt de la nutrition et de l'hydratation artificielle ». Or c’est là que se situe précisément le caractère euthanasique de la loi (qui n’a pas été déclarée conforme à la Constitution puisqu’elle avait été votée à la quasi unanimité et donc n’avait pas été soumise au Conseil constitutionnel).