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L'Eglise : Benoît XVI

L’image chrétienne de l’homme : Un texte inédit de Benoît XVI

L’image chrétienne de l’homme : Un texte inédit de Benoît XVI

Un essai vient de sortir en Italie sous le titre « La verità dell’amore. Tracce per un cammino ». Il est préfacé par Mgr Georg Gänswein. Et il contient un inédit de Benoît XVI. Ce texte du pape défunt a été publié par Sandro Magister et traduit par Benoît-et-moi :

L’atmosphère qui se diffusa amplement dans la chrétienté catholique après Vatican II fut initialement conçue de manière unilatérale comme démolition des murs, comme « abattage des bastions », de sorte que dans certains milieux, a on a même craint la fin du catholicisme, ou [ovvero] on l’a attendue avec joie.

La ferme détermination de Paul VI et la détermination tout aussi claire, mais joyeusement ouverte, de Jean-Paul II permirent à l’Église de retrouver – humainement parlant – sa place dans l’histoire.

Quand Jean-Paul II, originaire d’un pays dominé par le marxisme fut élu pape, il y eut certainement des cercles qui crurent qu’un pape originaire d’un pays socialiste devait nécessairement être un pape socialiste et qu’il apporterait donc la conciliation dans le monde comme « reductio ad unum » de christianisme et marxisme.

Toute la folie de cette position devint bien vite évidente dès lors que l’on s’ aperçut que précisément un pape issu d’un monde socialiste en connaissait parfaitement l’injustice et qu’il put ainsi contribuer au bouleversement surprenant qui se produisit en 1989 avec la fin du régime marxiste en Russie.

Cependant, il devient de plus en plus évident que la disparition des régimes marxistes est loin de signifier la victoire spirituelle du christianisme. Au contraire, la mondanité radicale s’avère de plus en plus être la vision dominante qui prive toujours plus le christianisme de son espace vital.

Dès le début, la modernité commence par l’appel à la liberté humaine : depuis l’accent mis par Luther sur la liberté du chrétien et l’humanisme d’Érasme de Rotterdam. Mais ce n’est que dans le moment historique bouleversé par les deux guerres mondiales, où le marxisme et le libéralisme sont montés dramatiquement à l’extrême, que deux nouveaux mouvements se sont mis en marche, conduisant l’idée de liberté à un radicalisme inimaginable jusqu’alors.

En effet, on nie désormais que l’homme, en tant qu’être libre, soit lié de quelque manière que ce soit à une nature qui détermine l’espace de sa liberté. L’homme n’a plus de nature mais se « fait ». Il n’y a plus de nature de l’homme : c’est l’homme lui-même qui décide de ce qu’il est, homme ou femme. C’est l’homme lui-même qui produit l’homme et décide ainsi du destin d’un être qui ne sort plus des mains d’un Dieu créateur, mais du laboratoire des inventions humaines. L’abolition du Créateur comme abolition de l’homme devient donc la véritable menace pour la foi. Telle est la grande tâche de la théologie aujourd’hui. Elle ne pourra la remplir que si l’exemple de vie des chrétiens est plus fort que la puissance des négations qui nous entourent et qui promettent une fausse liberté.

La conscience de l’impossibilité de résoudre un problème de cette ordre de grandeur sur un plan purement théorique ne nous dispense certainement pas d’essayer de concevoir une solution aussi sur le plan de la pensée.

Nature et liberté semblent à première vue en opposition irréconciliable : et pourtant la nature de l’homme est pensée, c’est-à-dire création, et en tant que telle, elle n’est pas simplement une réalité dépourvue d’esprit, mais elle porte en elle le « Logos ».

Les Pères – en particulier Athanase d’Alexandrie – ont conçu la création comme la coexistence de la « sapientia » in-créée et de « sapientia » créée. Nous touchons ici au mystère de Jésus-Christ, qui unit en lui la sagesse créée et la sagesse in-créée et qui, en tant que sagesse incarnée, nous appelle à être ensemble avec lui.

De cette manière, toutefois, la nature – qui est donnée à l’homme – ne fait qu’un avec l’histoire de la liberté de l’homme et porte en elle deux moments fondamentaux.

D’une part, il nous est dit que l’être humain, l’homme Adam, a mal commencé l’histoire dès le début, de sorte qu’à l’être [infinitif substantivé…?] homme, à l’humanité de chacun, l’histoire fournit désormais une donnée originelle erronée. Le « péché originel » signifie que chaque action est placée par avance sur une mauvaise voie.

À cela s’ajoute la figure de Jésus-Christ, le nouvel Adam, qui a payé à l’avance la rançon pour chacun d’entre nous, marquant ainsi un nouveau départ dans l’histoire.

Cela signifie que la « nature “ de l’homme est, d’un côté, malade, qu’elle a besoin de correction (” spoliata et vulnerata “[*], ce qui la met en contradiction avec l’esprit, avec la liberté, comme nous en faisons continuellement l’expérience.

Mais en termes généraux elle est aussi déjà rachetée. Et ce, dans un double sens : parce qu’en général, suffisamment de choses ont déjà été faites pour tous les péchés, et parce qu’en même temps, cette correction peut toujours être rendue à chacun dans le sacrement du pardon.

D’une part, l’histoire de l’homme est une histoire de péchés toujours nouveaux, d’autre part, la guérison est toujours prête. L’homme est un être qui a besoin de guérison, de pardon. Le fait que ce pardon existe comme réalité et pas seulement comme un beau rêve fait partie du noyau de l’image chrétienne de l’homme. C’est ici que la doctrine des sacrements trouve sa juste place. La nécessité du baptême et de la pénitence, de l’eucharistie et du sacerdoce, ainsi que du sacrement du mariage, devient évidente.

À partir de là, la question de l’image chrétienne de l’homme peut être abordée concrètement. Tout d’abord, l’observation exprimée par saint François de Sales est importante : il n’y a pas « l’image » chrétienne de l’homme, mais de nombreuses possibilités et manières dont l’image de l’homme se présente : de Pierre à Paul, de François à Thomas d’Aquin, de Frère Conrad [ndt: sans doute Frère Conrad de Parzham (1818-1894), humble frère convers capucin à Altötting, canonisé en 1934, auquel Benoît XVI a rendu hommage lors de son pèlerinage en Bavière en 2006] au cardinal Newman, et ainsi de suite. Où est indéniablement présent un certain accent qui parle en faveur d’une prédilection pour les « petits ».

Bien entendu, il faudrait considérer aussi dans ce contexte l’interaction entre la « Torah » et le Sermon sur la Montagne, dont j’ai parlé dans mon livre sur Jésus.

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