Chiesa a traduit un article parut dans l'Osservatore Romano et écrit par Marco Agostini. Extraits :
"Le soin apporté par l'architecture ancienne et moderne, jusqu’au milieu du XXe siècle, au pavement des églises est impressionnant. En plus des mosaïques et des fresques pour les murs, on trouve aussi, pour les pavements, de la peinture en pierre, des marqueteries, des tapis de marbre. […] Loin d’être un étalage de luxe, les pavements des églises étaient l’endroit où l’on marche mais ils avaient aussi d’autres fonctions. Ils n’étaient sûrement pas faits pour être recouverts par des bancs : ces derniers ont été introduits à une époque relativement récente, quand on a voulu aménager les nefs des églises pour permettre d’écouter commodément de longs sermons. […]
Ces pavements sont principalement destinés à ceux qui vivent la liturgie et y évoluent, à ceux qui s’agenouillent devant l’épiphanie du Christ. S’agenouiller c’est répondre à l’épiphanie donnée par grâce à une seule personne. Celui qui est touché par l’éclat de la vision se prosterne à terre et, de là, il voit davantage que tous ceux qui sont restés debout autour de lui. […] Il est émouvant de penser que ces pavements si beaux sont faits pour les genoux des fidèles : un tapis de pierre durable pour la prière chrétienne, pour l'humilité ; un tapis aussi bien pour les riches que pour les pauvres, un tapis pour les pharisiens et pour les publicains, mais qui est surtout apprécié par ces derniers.
Aujourd’hui les prie-Dieu ont disparu de beaucoup d’églises et on tend à retirer les balustrades auxquelles on pouvait s’appuyer pour la communion à genoux. Or, dans le Nouveau Testament, le geste de s’agenouiller est fait à chaque fois que la divinité du Christ apparaît à un homme : on pense aux Mages, à l’aveugle-né, à l'onction de Béthanie, à Marie-Madeleine dans le jardin au matin de Pâques. Jésus lui-même dit à Satan, qui voulait lui imposer une génuflexion mal à propos, que l’on ne doit fléchir le genou que pour Dieu. Satan nous demande encore aujourd’hui de choisir entre Dieu et le pouvoir, entre Dieu et la richesse, et il nous tente encore plus en profondeur. Mais ainsi on ne rendra gloire à Dieu pour rien ; ceux qui ont favorisé le pouvoir, ceux dont le cœur a été lié par un acte, ceux-là s’agenouilleront.
Un bon entraînement pour vaincre l'idolâtrie dans la vie est de recommencer à s’agenouiller à la messe, ce qui est d’ailleurs l’une des formes d’"actuosa participatio" dont parle le dernier Concile. Cela permet aussi de se rendre compte de la beauté des pavements (au moins ceux qui sont anciens) de nos églises. Devant certains d’entre eux, on est tenté de se déchausser, comme le fit Moïse devant Dieu qui lui parlait depuis le buisson ardent."