D’Aurelio Porfiri, éditeur et écrivain catholique italien, pour le Salon beige:
Les catholiques peuvent être fiers, à juste titre, de l’héritage musical traditionnel de l’Église catholique. Un patrimoine composé d’œuvres d’art qui sont un don non seulement pour l’Église, mais pour toute l’humanité. En fait, nous savons bien comment même ceux qui ne sont pas du tout religieux peuvent être pleinement conquis par ces grandes œuvres musicales qui sont un pilier fondamental de notre civilisation.
Une partie importante de ce patrimoine musical est celle du chant religieux populaire. Cette partie du répertoire n’est pas naturellement élaborée comme dans les grandes œuvres polyphoniques ou comme dans le répertoire classique du chant grégorien, mais est une émanation de l’âme populaire authentique. Parfois ces chants viennent directement du peuple, d’autres fois elles sont composées par des compositeurs ayant une formation académique mais qui ont la capacité d’interpréter les aspirations et les désirs de l’âme populaire. Aujourd’hui, ce que l’on fait passer pour le chant du peuple n’est plutôt que le produit du talent de persuasion des multinationales de la musique, qui ne servent souvent qu’un seul dieu, l’argent.
Si l’on parle de chant populaire religieux et qu’il faut penser à une patronne pour ce répertoire, un nom s’impose : celui de la Bienheureuse Vierge Marie. Il est évident pour tous qu’une grande partie du répertoire des chants religieux populaires est constituée de chants pour la Mère de Dieu. Certains de ces chants, du moins en Italie, sont encore dans la mémoire collective, malgré le fait que ces derniers décennies, toutes les tentatives ont été faites pour annuler cette dévotion importante et spéciale que le peuple de Dieu a envers la Mère.
Si nous pensons aux sanctuaires mariaux du monde entier, nous savons bien à quel point le chant populaire est une partie importante des dévotions qui s’y déroulent. Pensons, par exemple, à l’un des sanctuaires les plus célèbres, celui de Fatima au Portugal. Fatima est donc célèbre dans le monde entier et est souvent identifiée au célèbre Ave Maria de Fatima, traduit dans toutes les langues. Qui ne l’a pas chanté ? Mais il y aurait d’autres exemples que l’espace de cet écrit ne suffirait certainement pas à citer.
Je pense qu’il est important de mettre un aspect en lumière. Le chant populaire religieuse mariale n’est pas une chant pour vieilles dames inoffensives, mais a un fort aspect militant. Nous pouvons comprendre cela si nous prenons par exemple l’un des chants religieux mariaux les plus célèbres, Nous voulons Dieu.
Le chant a été composé par un curé français, François Xavier Moreau pour un pèlerinage qui s’est effectué à Lourdes en 1882. Ceux qui connaissent ce chant savent bien à quel point la tendance est martiale, presque un chant de soldats au combat. La vie chrétienne est un combat et la chanson religieuse populaire ne l’oublie pas. Pensons au dernier couplet de cette célèbre chanson : « Chrétiens, notre antique alliance, renouons-là dans ce saint lieu, et crions au nom de la France, Oui, Dieu le veut ! – Nous voulons Dieu ». Le ton de l’engagement dans la lutte de la vie, qu’elle soit politique, sociale ou personnelle, est évident. Nous sommes l’armée du Dieu des armées et notre chant de combat est au nom de Marie. Pensez, une femme qui nous mène au combat. N’est-il pas étrange que les adversaires disent que le catholicisme est contre les femmes ?
Mais attention, le combat auquel nous sommes appelés n’est pas purement terrestre, notre combat est toujours d’abord spirituel et à la lumière de cela nous pouvons affronter les différents combats de la vie. C’est pourquoi des chansons comme Santa Maria del Camino nous posent problème.
L’auteur du texte et de la musique est Juan Antonio Espinosa (1940), un auteur-compositeur-interprète chrétien d’origine espagnole très populaire même dans le monde anglo-saxon. La chanson est incluse dans un livret de 1971 intitulé Madre nuestra, dans lequel sont rassemblées les chansons d’inspiration mariale de l’auteur, dont Santa Maria Del Camino. Mais qui est Juan Antonio Espinosa ? Le site antiwarsong.org reproduit et traduit une partie du texte trouvé sur le site officiel de l’auteur et dans lequel on lit : « Juan Antonio Espinosa est né en 1940 à Villafranca De Los Barros (Badajoz – Espagne) dans une famille de musiciens. Il commence très tôt à étudier la musique et à jouer de divers instruments. (…) Suite au Concile Vatican II, il commence à composer des chants pour une Nouvelle Liturgie, des chants qui parlent d’un christianisme ouvert, incarné et engagé. (…) Pendant de nombreuses années, il a travaillé avec des agriculteurs au Pérou et en Colombie. Ici, il commence à composer un nouveau type de chansons qui reflètent la lutte pour la libération des peuples latino-américains et qui sont rassemblées dans l’album “La tierra grita” (“La terre pleure”). Il est retourné en Espagne en 1975 et a commencé à parcourir les villes et les villes en donnant des spectacles, en chantant avec sa guitare sur les places et les quartiers, en encourageant le réveil du peuple avec sa voix. Il compose de nouvelles chansons rassemblées en deux LP : « Cantares de ojos abiertos » et « Hombres sin tierra » (« Chansons aux yeux ouverts » et « Hommes sans terre »). Il continue à chanter aujourd’hui et est étroitement lié aux Groupes et Communautés Chrétiennes de Base, avec l’illusion de composer des chants qui nous stimulent à vivre un Christianisme plus proche de l’Evangile de Jésus de Nazareth ». Il est très clair que la perspective de cette lutte est celle de la théologie de la libération, et non celle chrétienne. Marie nous guide dans la bataille mais sans l’orientation spirituelle sous-jacente, nous essayons simplement de corriger les erreurs du monde en faisant les mêmes erreurs.
Revenons au chant populaire religieux authentique et rejoignons la suite de Marie, Notre-Dame et Reine.