Homélie de SE Mgr Athanasius Schneider, évêque auxiliaire d’Astana (Kazakhstan) à la XXVe Fête du livre de Renaissance Catholique le 4 décembre :
"Chers frères et sœurs en Christ ! Notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ avait proclamé solennellement avant sa mort rédemptrice sur la Croix, en présence des autorités incrédules de ce monde : “ Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. Quiconque est de la vérité écoute ma voix” (Jn 18, 37). La contradiction la plus manifeste avec l’esprit et la vie de Jésus Christ serait la crainte de confesser la vérité ou même d’accepter le moindre compromis dans le domaine de la vérité.
Nous nous appelons chrétiens d’après le nom du Christ, Notre Sauveur, mais aussi d’après l’huile sacrée et parfumée, appelée saint chrême, chrisma en latin, avec laquelle nous avons été oints lors du sacrement de la confirmation. Dans ce sacrement l’huile signifie l’abondance de la grâce qui se répand dans l’âme du chrétien pour le confirmer dans la foi ; et le baume, qui est odorant et préserve de la corruption, signifie que le chrétien, fortifié par cette grâce, est capable de répandre la bonne odeur des vertus chrétiennes et de se préserver de la corruption des vices. L’onction est faite sur le front, où apparaissent les signes de la crainte et de la honte, afin que le confirmé comprenne qu’il ne doit pas rougir du nom et de la profession de chrétien, ni avoir peur des ennemis de la foi. Puis l’évêque donne un léger soufflet au confirmé pour qu’il sache qu’il doit être prêt à souffrir toute sorte d’affronts et de peine pour la foi de Jésus-Christ. Faire des compromis concernant la vérité de la foi catholique, être « politiquement correct » que ce soit au sein de l’Église ou en dehors de l’Église, contredirait directement le nom chrétien, le nom catholique.
Il est évident qu’aujourd’hui les chrétiens vivent une époque de persécution au niveau presque mondial. Notre situation présente des similitudes avec l’ère de la persécution générale des chrétiens des premiers siècles de l’Église. De cette période nous possédons un exemple touchant du martyre de toute une paroisse dans la cité d’Abitène en Afrique du Nord pendant la persécution de Dioclétien. Le prêtre saint Saturnin était en train de célébrer la Sainte Messe du dimanche à laquelle assistait sa paroisse, toutefois secrètement, car il était interdit aux chrétiens de se rassembler pour la liturgie. La police fit soudainement irruption dans l’assemblée des fidèles et les arrêta tous. Les enfants de saint Saturnin, un veuf – ils étaient nés avant son ordination-, étaient aussi présents : Saturnin et Félix, lecteurs, Marie, une vierge consacrée, et Hilarion, un enfant de six ans. Tous les fidèles et leur curé furent emmenés au juge, puis emprisonnés avant d’être exécutés. Sur le chemin du tribunal ils rencontrèrent leur évêque Fundanus, qui revenait juste d’avoir commis l’acte d’apostasie. Quand le petit enfant Hilarion fut interrogé par le juge, il répondit : “Je suis chrétien et j’ai participé à la liturgie. J’y suis allé de plein gré, personne ne m’a contraint à y aller.” Le juge, qui avait pitié de lui, essaya de l’intimider en le menaçant de peines infantiles. Toutefois, le petit garçon ne fit qu’en rire. Alors le gouverneur lui dit : “Je te couperai le nez et les oreilles”. Hilarion répondit : “Vous pouvez le faire, mais de toute façon je suis chrétien.” Quand le proconsul eut donné l’ordre de les renvoyer à la prison pour l’exécution, le petit Hilarion avec tous les fidèles s’exclama : “ Grâces à Dieu". Par sa confession de foi et son martyre ce petit garçon, les autres adolescents, les pères et les mères de famille, fidèles, avec leur curé Saturnin firent ainsi réparation pour l’apostasie de leur évêque.
La fidélité à la foi catholique et le martyre chrétien ne demandent pas seulement la confession intrépide de la vérité divine face aux païens et aux infidèles, mais aussi face aux chrétiens hérétiques. Parmi ces nombreux martyrs on peut présenter l’exemple touchant de Sir John Burke de Brittas en Irlande à l’époque de la persécution de la foi catholique au début du 17ème siècle. Un dimanche matin, dans le château de John Burke, des catholiques étaient rassemblés pour assister à la Sainte Messe, célébrée par un prêtre clandestin. Mais les autorités civiles avaient été informées par un traître. Soudain une bande de soldats encercla la maison, où la Sainte Messe était en train d’être célébrée. Le capitaine demanda qu’on le laissât entrer. L’unique réponse de Sir Burke fut qu’il pouvait librement entrer, s’il s’était préparé à faire sa confession et avait entraîné ses compagnons à faire de même ; autrement ils devaient rester dehors, car les infidèles ne devaient pas avoir part à ce qui est saint, ni les choses saintes être jetées aux chiens ou les perles aux pourceaux. Lorsque John Burke comparut devant ses juges le président du tribunal déclara qu’il le traiterait avec une grande déférence s’il obéissait au souhait du Roi en tout ce qui concernait la foi et la religion, autrement il serait condamné à mort. Mais John Burke resta inflexible. Ensuite il écouta la sentence de mort avec un visage joyeux, et répondit seulement qu’il était heureux que ceux qui tuent son corps n’aient pas de pouvoir sur son âme. Il ajouta quelques mots, par lesquels il déclara son aversion pour les doctrines et les opinions hérétiques ainsi que son désir cordial d’obéir à l’enseignement de l’Église catholique, dans la communauté de laquelle il déclarait vouloir mourir. Quand on arriva sur le lieu d’exécution, il demanda à être mis par terre, afin de pouvoir s’en approcher sur les genoux, ce qui lui fut accordé. John Burke montra le même contentement et la même joie que s’il s’était rendu à une fête somptueuse. Au dernier moment on lui offrit le pardon, la restitution de ses terres et une promotion, s’il prêtait le serment de reconnaître la suprématie du Roi en matière de religion et assistait au culte protestant. Il dit que pour rien au monde il n’offenserait Dieu, qu’il n’échangerait pas le ciel pour la terre, et qu’il condamnerait et abominerait tout ce que l’Église catholique avait toujours condamné et répudié. John Burke est mort en décembre 1607 à Limerick en Irlande (cf. Murphy, D., Our Martyrs, Dublin 1896, pp. 228 – 239).
De nos jours nous sommes tous témoins des nouveaux martyrs chrétiens, spécialement au Proche-Orient, où aux yeux du monde entier sont martyrisés nos frères et sœurs en Christ. Au début de l’histoire de l’Église le Saint-Esprit a adressé à tous les chrétiens par l’apôtre saint Jean ces paroles : “Sois fidèle jusqu’à la mort, et je te donnerai la couronne de vie’’ (Apc 2. 10). Ainsi-soit-il."