Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne (Marne) s’est penché lundi après-midi sur la légalité d’une quatrième procédure d’arrêt des soins de Vincent Lambert. La décision, mise en délibéré, sera rendue “dans dix jours”, autour du 1er février, a déclaré Olivier Nizet, le président du tribunal administratif, après deux heures d’une audience expresse.
En avril 2018 le CHU de Reims, où Vincent Lambert est hospitalisé, avait annoncé son intention de lancer une quatrième procédure d’arrêt des soins: c’est sur la légalité de celle-ci que le tribunal devait statuer, saisi en urgence par les parents Lambert via un référé-liberté.
Mais l’issue du dossier demeure incertaine: même avec l’aval du tribunal administratif, un recours en appel devant le Conseil d’État est plus que probable.
55 médecins ont signé une lettre à destination des juges pour expliquer que l’évaluation de l’état de santé de Vincent Lambert n’avait pas été réalisée dans de bonnes conditions :
Nous sommes tous spécialistes de la prise en charge des personnes en état de conscience altérée, qu’elles soient en état d’éveil non répondant (également appelé état végétatif chronique ou EVC) ou en état pauci-relationnel (EPR). La fluctuation de leur état de conscience (en fonction des moments, des stimulations, des personnes intervenantes) est une des spécificités de ces patients.
Nos confrères Xavier DUCROCQ, Edwige RICHER et Catherine KIEFER, qui ont participé aux opérations d’expertise de Monsieur Vincent LAMBERT, nous ont fait part des modalités d’évaluation de la conscience qui lui ont été appliquées : Vincent Lambert a été évalué un soir de 20h30 à 21h30, puis un matin pendant 1h30 en présence de 7 personnes, pour lui, inconnues. Ces évaluations comportementales n’ont pas été réitérées par la suite.
Les experts judiciaires ont conclu au diagnostic d’état végétatif permanent.
Ils affirment également que nourrir et hydrater Monsieur Lambert ne peut être constitutif d’une obstination déraisonnable et ils préconisent un transfert dans une autre unité.
Si nous ne pouvons que les approuver sur ces deux derniers points, nous contestons en revanche le protocole d’évaluation mis en oeuvre et son résultat. Eu égard au caractère fluctuant de ces patients, l’évaluation doit être renouvelée à différents moments de la journée et sur plusieurs jours comme le recommande le Professeur Steven LAUREYS du Coma Science Group de Liège : la CRS-R doit être appliquée au patient au minimum 5 fois en 10 jours pour que les résultats soient considérés comme fiables. (cf Evaluations comportementales chez les patients en état de conscience altérée – Wolff et coll – EMPR 2018 – page 54)
Une bonne évaluation nécessite également des conditions favorables : un milieu stimulant et bienveillant permettant au patient d’être en confiance, puis une évaluation par une équipe pluridisciplinaire formée à l’observation, familière du patient, en relation avec ses proches. Dans tous les cas, la règle fondamentale selon laquelle une absence de manifestation de conscience à un instant donné ne signifie pas l‘absence de conscience, doit être rappelée.
La seule imagerie morphologique ne peut en aucun cas, à elle seule, fonder l’évaluation de l’existence ou non d’une conscience. L’évaluation clinique et comportementale dans les conditions énoncées ci-dessus, reste fondamentale. Elle peut être avantageusement complétée par l’imagerie fonctionnelle, laquelle n’a de valeur qu’en cas de résultat positif.
C’est forts de toutes ces considérations que, au quotidien, dans nos unités, conformément à la circulaire n° 2002-288 du 3 mai 2002, nous prenons en soin, de la même façon, les personnes en état de conscience minimale et celles en état d’éveil non répondant.
Dès lors que Monsieur Vincent Lambert n’est pas dans le coma, n’est pas exposé à un risque vital, et n’est pas en fin de vie, il relève de cette circulaire relative aux droits des patients.
Monsieur Vincent Lambert n’a pas été évalué conformément aux règles de l’art. Cela est d’autant plus inquiétant que ce qui s’appliquera à sa personne pourrait, par la suite, concerner aussi tous ceux qui partagent sa condition.
Conscients du caractère exceptionnel de la présente démarche, il nous parait, en conscience, nécessaire de vous alerter.
Viviane Lambert, mère de Vincent Lambert, était hier à la Marche pour la vie :
Nous résistons et continuerons. Si je suis là aujourd’hui c’ est parce qu’il y a demain une audience sur le sort de Vincent. Il faut résister
2018
La seule chose qui est certaine, c’est qu’il n’est pas utile à notre société de consommation, contrairement à une mère porteuse