Monseigneur Pascal Chang Soi, administrateur du diocèse de Papeete, écrit aux trois députés de Polynésie :
"Le 10 mars prochain, en tant que parlementaires de l’Assemblée nationale vous serez amené(e)s à vous prononcer sur la proposition de loi sur la fin de vie présentée par les députés MM. Alain CLAEYS et Jean LEONETTI.
Il existe déjà une loi dite « Léonetti » [ loi n°2005-370 du 22 avril 2005] sur la fin de vie et les soins palliatifs, mais dans son rapport, en date du 11 février 2015, la Cour des comptes constate que «L’accès aux soins palliatifs demeure globalement limité, et nettement moins répandu que dans certains pays étrangers. Le développement d’une offre de soins graduée en milieu hospitalier n’a pas permis de résorber les inégalités territoriales. La prise en charge extra-hospitalière est demeurée le parent pauvre et reste toujours à construire… »
Bien que la loi de 2005 ne soit pas pleinement appliquée, la nouvelle proposition de loi vient apporter des dispositifs supplémentaires en « créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie ».
La mort et l’attention portée aux personnes en fin de vie, au regard de nos convictions religieuses, nous préoccupent particulièrement. Ces questions préoccupent tout autant notre société humaine, car abréger la vie d’une personne ne peut faire l’objet d’un droit. « Tu ne tueras pas » relève autant du devoir d’un chrétien que de la morale laïque.
La création de « nouveaux droits » est aussi une grave question constitutionnelle qui donne toute son importance à ce débat qui concerne aussi les Polynésiens très attachés à la culture de la vie.
En tant que Pasteur, mais aussi citoyen, je me permets d’attirer votre attention sur l’importance de ce débat. Vous, qui, en tant que députés, représentez le peuple polynésien, je fais appel à votre conscience et à votre devoir, j’ai la conviction que vous saurez porter notre espérance devant la Nation, pour :
–demander que la « sédation profonde et continue jusqu’au décès » soit un traitement exceptionnel pour soulager mais pas tuer afin qu’elle ne constitue pas une forme d’euthanasie déguisée ;
–refuser que certains arrêts d’alimentation et d’hydratation puissent avoir comme objectif de provoquer la mort au prétexte qu’ils constitueraient un maintien artificiel de la vie. Car il ne s’agit pas d’un traitement comme les autres ;
–Engager l’État pour le développement des soins palliatifs non seulement dans toutes les régions de France, mais aussi en Polynésie, avec des moyens correspondants, notamment en termes de formation des soignants et des accompagnants.
Pour nous, cette loi doit refuser clairement toute administration délibérée de la mort, quel qu’en soit le moyen : ni acharnement thérapeutique, ni euthanasie, ni suicide assisté- mais des traitements antidouleur et un accompagnement adapté à chacun(e).
Vous assurant de mon écoute attentive pour tout renseignement que vous pourriez désirer solliciter sur cette question, je vous prie de croire, Madame, Messieurs les députés, en l’expression de ma profonde considération."