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France : Politique en France / France : Société

Populisme ? La classe dirigeante n’a plus d’autre choix que « d’aller au peuple »

Populisme ? La classe dirigeante n’a plus d’autre choix que « d’aller au peuple »

Le géographe Christophe Guilluy, qui a popularisé le concept de « France périphérique » répond au Courrier Picard :

Que nous dit le mouvement spontané des « Gilets jaunes » sur la ruralité d’aujourd’hui ?

Cette révolte est en réalité à replacer dans un temps plus long. L’idée de catégories très intégrées socialement, économiquement, a vécu. On est bien arrivé à des catégories qui aujourd’hui ne trouvent pas leur place dans un modèle mondialisé, qui se sentent à l’écart. En tout cas qui ont objectivement du mal à boucler les fins de mois.

Donc cette révolte, ce n’est pas seulement le prix de l’essence…

Effectivement, il y a la question du gasoil qui est l’étincelle. Mais ce mouvement ne serait pas aussi puissant s’il ne touchait pas à la place de ces catégories dans le modèle économique. On est sur des territoires fragiles, qui créent peu d’emploi. Les gens ne sont pas forcément actuellement dans la mouise, mais ils savent très bien qu’ils vivent dans une insécurité sociale très forte. Quand vous avez un gouvernement qui leur dit « vous ne vivez pas si mal » – en gros « fermez là » – forcément ça passe relativement mal…

Vous parlez des classes moyennes, mais n’est-ce pas aussi le malaise des ruraux face aux citadins, des provinciaux face aux Parisiens ?

Évidemment. On le lit très bien sur les cartes : plus vous vous éloignez d’un centre urbain, plus vous retrouvez des catégories modestes. On voit qu’un clivage est en cours avec le monde de l’hyper urbanisation, des métropoles mondialisées qui concentrent quasiment tous les emplois qualifiés, les salaires les plus élevés, l’essentiel des créations d’emplois. Ce n’est pas non plus un monde idéal. La majorité des Franciliens veulent quitter la région parisienne…

Tous ces gens ont-ils raison de dire qu’on leur fait les poches ?

Objectivement, leur niveau de vie s’est détérioré. On a sur ces territoires les plus petits revenus, les taux de chômage les plus élevés, des taux de pauvreté très importants. […]

Au moins peut-on parler d’une jacquerie moderne comme pour les bonnets rouges ?

En tout cas, ces mouvements-là émergent à un moment précis de l’Histoire où l’offre politique ne correspond absolument plus à la demande des populations. Non pas que les gens ne veuillent plus de politique. Mais ils veulent une offre pertinente. La classe dirigeante n’a plus d’autre choix que « d’aller au peuple ». Il faut prendre en charge les revendications des catégories modestes. Parce qu’elles sont majoritaires et qu’elles représentent la société elle-même.

Après les annonces très techniques du gouvernement, on a l’impression que c’est mal parti…

Les gens se moquent de savoir s’ils vont pouvoir acheter un véhicule électrique dont ils ne voulaient pas. C’est tout le problème culturel d’aujourd’hui. On a vraiment un monde d’en haut qui ne comprend plus ce qui se passe en bas. On voit l’enfermement de cette technostructure. Un système où le haut ne parle plus au bas n’est pas un système durable. Il faut aller dans une forme d’empathie qui n’existe plus.

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2 commentaires

  1. La ville de Londres avait envisagé de demander son adhésion à l’UE après le Brexit. On va avoir une intensification du morcellement des pays, comme dans le roman Les Monades urbaines.

  2. Que va-t-il se passer? Rien. Nos gouvernants connaissent la musique : ne rien faire, ne rien dire et verbaliser (taxer, mettre en garde à vue, envoyer des lettres recommandées avec commandement de payer, etc…)

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