Jean-Marie Guénois analyse le conflit entre le gouvernement et l'Eglise. extraits :
"L'Église catholique quand elle critique le projet de loi sur le mariage homosexuel sort-elle «de son rôle» comme l'affirme David Assouline, porte-parole du Parti socialiste? Ou cherche-t-elle à «imposer» sa vision de la famille, comme le soutient Erwan Binet, le rapporteur PS du projet de loi?
Quand on le lui demande, à l'Église, ou plutôt à ses évêques réunis en assemblée plénière annuelle à Lourdes, ils pensent exactement le contraire! Ils affirment réagir à un projet de loi qui est «imposé» par le gouvernement. Et se disent dans leur rôle, non pas de politiciens, mais «de veilleurs et d'éveilleurs des consciences».
L'opposition dialectique et symétrique de ces deux discours pourrait ainsi donner l'impression d'un affrontement politique type. Sauf que – paradoxe pour ce gouvernement socialiste – le combat mené par les évêques et leur président, le cardinal André Vingt-Trois, est profondément… social!
Le piège vient des apparences. Dès qu'elle ouvre la bouche sur des questions d'éthique sexuelle, l'Église catholique est – a priori – taxée de rétrograde et d'antiprogressiste. Par les mêmes, du reste qui l'encensaient, il y a deux ans, quand elle grognait contre les méthodes musclées employées par le gouvernement de droite contre les Roms.
Mais c'était de l'éthique sociale qui plus est contre la droite: l'Église avait donc droit de séjour dans le champ de conscience socialiste. Pourquoi donc est-elle ici définitivement rejetée dans le camp de l'obscurantisme?Même les efforts menés par des évêques, de sensibilité de gauche, qui ont poussé en septembre à la rédaction d'un long texte du conseil famille et société de l'épiscopat, présidé par Mgr Jean-Luc Brunin, évêque du Havre, condamnant l'homophobie et démontrant une bienveillance face à la demande des couples homosexuels pour le mariage (qu'il récusait toutefois en proposant une voie médiane), n'ont eu aucun effet.
C'est que la question n'est pas une tactique d'habillage, c'est un sujet de fond. […]"