Le père Jean-François Thomas, jésuite au verbe clair, vient de publier un nouvel ouvrage pour méditer sur les vertus. À l’heure de toutes les déconstructions, la vertu par son étymologie même (dérivé du latin vir, homme), incarne une puissance virile de résistance à l’effondrement de notre civilisation. Le père Jean-François Thomas éveille ici ses lecteurs aux sept vertus chrétiennes : vertus cardinales héritées d’Aristote, justice, prudence, force, tempérance ; vertus théologales, foi, espérance, charité. À la base de la liberté, il place les vertus morales puis celles, intellectuelles, qui fondent le sens commun et l’ordre social. Ses méditations nourries de sagesse grecque, de réflexions philosophiques, d’écrits des Pères de l’Église et des saints, s’inspirent aussi de l’intuition des plus grands artistes, poètes et écrivains, sans oublier d’aborder les vices les plus destructeurs de notre temps, tels quel l’envie ou la médisance :
Le Français, depuis la révolution de 1789 (et toutes celles qui ont suivi), a été modelé par l’envie. Dans De la Démocratie en Amérique, Alexis de Tocqueville a bien analysé que l’envie est le poison de cet âge démocratique puisque la moindre différence est considérée comme une inégalité criante et inacceptable. Auparavant, Dieu et le Roi pouvaient être imités. Désormais ils ont été tués et les hommes s’entredéchirent pour acquérir ce que les autres ont et sont. L’envie devient le centre et le moteur de leurs relations. Nous y sommes, et plongés jusqu’au coup, encore davantage par la mondialisation en cours qui est tout sauf un épisode hasardeux puisqu’elle est mise en place par les empoisonneurs démocratiques de la consommation de masse.
Et sur la médisance :
Des êtres sont détruits par la rumeur diffusée, rumeur lâche puisque celui qui en est l’auteur avance à visage masqué, se gardant bien de s’exposer ou de se faire connaître. […] Elle dissout toute charité et habitue l’âme à ne visiter que les bourbiers. Certains êtres s’y complaisent, y compris, ceux qui prétendent ne demeurer que dans la lumière. […] Saint Thomas va encore plus loin en précisant que la médisance est une diffamation poussée à l’extrême, de façon vicieuse, puisqu’elle cherche à diviser les amis. La diffamation qui sème le trouble dans l’esprit d’un ami vis-à-vis de son ami, qui provoque la rupture, qui détruit ces liens uniques, est médisance […] La perte de ses amis par celui qui est diffamé et objet de médisance est une mort pire que celle de la perte de sa réputation aux yeux d’étrangers. Depuis Aristote, l’amitié a été louée comme un des biens les plus précieux […] Pourquoi perdre autant de temps, et son intégrité, et son honneur, à médire des autres, sous le fallacieux prétexte de dénoncer le mal, de vouloir la victoire du bien ? […] La jalousie est donc un moteur essentiel de la diffamation et de la médisance. Celui qui fait ainsi marcher sa langue est un impuissant de l’existence qui a besoin de phagocyter les autres afin de se persuader qu’il est quelque chose. […] Voilà pourquoi les pires médisants se trouvent souvent dans le cercle des amis proches […]