Le 20 juin 2019, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a communiqué la requête ASOCIACIÓN DE ABOGADOS CRISTIANOS contre l’Espagne (n°22604/18), qui avait été introduite le 26 avril 2018, suite à la profanation (massive) d’hosties consacrées par un artiste espagnol. Cela signifie que la Cour accepte de juger l’affaire, ce qui est une excellente nouvelle.
L’exposition« Exhumés » (Desenterrados) de l’artiste A.C. dans une salle municipale de Pampelune, montrait des photos de lui tout nu allongé à côté du mot « pédérastie », formé avec des hosties consacrées qu’il s’était lui-même procuré en assistant à des célébrations eucharistiques. L’exposition avait été autorisée par la ville. L’association requérante porta plainte (querella) contre l’artiste et la municipalité pour la commission d’un délit portant atteinte aux sentiments religieux ainsi qu’un délit de profanation. Le juge d’instruction no 2 de Pampelune rejeta la plainte et classa l’affaire déclarant le non-lieu définitif, au motif que les faits n’étaient pas constitutifs des délits mentionnés. L’Audiencia Provincial confirma le classement.
QUESTIONS AUX PARTIES
1. Dans la mesure où, dans sa plainte, la requérante réserva l’action civile (article 112 code de procédure pénale), le classement de la plainte par les tribunaux internes constitue une « contestation » sur « un droit ou une obligation de caractère civil » (voir Pérez c. France [GC], no 47287/99, §§ 7 et ss, CEDH 2004-I). Dans l’affirmative, peut-on considérer que ce classement est-il compatible avec l’article 6 § 1 ?
2. L’autorisation de l’exposition litigieuse a-t-elle porté atteinte au droit de la requérante au respect de sa vie privée, au sens de l’article 8 de la Convention ? En particulier, les autorités internes se sont-elles acquittées de leurs obligations positivesinhérentes à un respect effectif du droit garanti par cette disposition ?
3. Cette même circonstance emporte-t-elle violation du droit de la requérante au respect de ses convictions religieuses tel qu’il se trouve garanti par l’article 9 de la Convention (voir E.S. c. Autriche, no 38450/12, § 44, 25 octobre 2018) ?
4. La requérante est-elle fondée à soutenir qu’elle est victime d’une discrimination, contraire à l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 9 de la Convention et/ou l’article 8 de la Convention (voir, mutatis mutandis, D.H. et autres c. République tchèque [GC], no 57325/00, CEDH 2007‑IV) ?
Le Salon beige avait relayé deux articles sur ce sujet, l’un pour l’ECLJ et l’autre pour La Nef :
- Requête à la CEDH contre une profanation d’hosties consacrées par un “artiste” espagnol
- Profanation d’hosties en Espagne : l’artiste sacrilège bientôt devant la CEDH ?
Magistro78
Pour résumer, on est clairement dans la question du droit “artistique ” au blasphème qu’il s’agit de laisser dans la marge d’appréciation nationale des Etats. Est-ce aux Etats de définir leurs normes internes en la matière ou la CEDH décide t-elle de fixer des lois supranationales et si oui lesquelles ?
Voir à ce sujet le jugement E.S. c Autriche dans lequel une conférencière est condamnée pour avoir qualifié le Prophète de pédophile, condamnation visant à protéger le “sentiment religieux des musulmans”. De même l’arrêt Molla Sali c. Grêce et l’apparition du principe “d’intérêt public important” rapproché de la notion de “coexistence pacifique des religions”.
Ici, on n’est pas dans la critique rationnelle d’une religion mais dans la provocation outrancière et injurieuse, voire scatologique…
Le Pb c’est que c’est “de l’art” et qu’autant le politique ou le philosophe ne peut émettre de blasphèmes “pipi-caca” (E.S. c Autriche) mais l’artiste oui.
Une tartufferie intellectuelle ? A suivre…
philippe paternot
ah si l’affaire avait été faite dans une mosquée, le monde entier aurait crié au scandale, mmais des hosties… ç ne sont que du pain azyme