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Bioéthique

Recours auprès du Conseil Constitutionnel contre la loi ni bio ni éthique

Recours auprès du Conseil Constitutionnel contre la loi ni bio ni éthique

La saisine du Conseil constitutionnel a été déposée le 2 juillet par 80 députés LR, UDI et Libertés et Territoires. En voici le début :

Les députés signataires ont l’honneur de soumettre à votre examen, conformément au deuxième alinéa de la Constitution, les dispositions suivantes de la loi relative à la bioéthique. Ils souhaitent également pouvoir bénéficier d’une audition par le Conseil Constitutionnel.

Sans méconnaître l’état actuel de la position du Conseil constitutionnel, ils doivent insister sur les éléments suivants : alors que la Cour de cassation définit le parlementaire comme « personne chargée d’une mission de service public [ qualité ] reconnue à toute personne chargée, directement ou indirectement d’accomplir des actes ayant pour but de satisfaire à l’intérêt général, peu important qu’elle ne disposât d’aucun pouvoir de décision au nom de la puissance publique, que la mission reconnue aux parlementaires est par essence même une mission d’intérêt général » (Cass. Crim. 27 juin 2017 n° 18-80069), l’intérêt général ne peut s’arrêter à la porte des juridictions, constitutionnelle ou administratives (CE Ass. 9 juillet 2010, Fédération nationale de la libre pensée, req. n°327663).

A la différence des Questions priorité de constitutionnalité (QPC) (commentaire de la décision n° 2017-632 du 2 juin 2017, qui retrace la séance du 6 avril 2017), où une partie serait confrontée à un parlementaire identifié si celui-ci pouvait intervenir, les décisions de conformité n’opposent pas des parties : « l’effet de cette saisine est de mettre en œuvre, avant la clôture de la procédure législative, la vérification par le Conseil constitutionnel de toutes les dispositions de la loi déférée y compris de celles qui n’ont fait l’objet d’aucune critique de la part des auteurs de la saisine ; qu’aucune disposition de la Constitution non plus que de la loi organique relative au Conseil constitutionnel ne permet aux autorités ou parlementaires habilités à déférer une loi au Conseil constitutionnel de le dessaisir en faisant obstacle à la mise en œuvre du contrôle de constitutionnalité engagé » ( CCT 30 décembre 1996 n° 96-386 DC).

Il est donc logique que les saisissants puissent se faire entendre. Enfin il est paradoxal que le conseil d’un justiciable puisse, dans le cadre de la procédure de QPC, contestant la loi, être auditionné et que des parlementaires contestant la conformité d’une loi ne puissent disposer de la même faculté. Ce refus serait attentatoire aux droits de l’opposition.

[…]

Ainsi les limites éthiques ne résultent-elles que de la loi, et sont systématiquement contournées ou abandonnées. Tel est le cas du principe posé par l’article 16 du code civil, « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie. », dès lors que l’embryon utilisé à des fins de recherche n’est pas considéré par le législateur juridiquement comme le commencement de la vie. La recherche sur l’embryon humain pour la seule « connaissance biologique », la décorrélation entre l’embryon humain et ses cellules souches, qui pour être obtenues nécessitent la destruction de l’embryon humain, le maintien de l’embryon en éprouvette jusqu’à ses 14 jours (article 20), ou encore la création d’embryons chimériques et transgéniques (articles 20 et 23), sont autant de modifications législatives d’ampleur sans que le respect de la dignité de l’être humain ne s’oppose en rien aux intérêts de la recherche. Le « point d’équilibre » entre ce que « la science propose[…] et les valeurs fondamentales qui soutiennent l’identité bioéthique de la France »5, n’existe plus dans cette loi : toutes les limites posées en 1994 ont disparu. La « compétitivité internationale », notion purement économique, la « sécurité juridique » des chercheurs, qui excède la simple liberté de la recherche, le besoin de développer « les connaissances » sont les arguments premiers, tandis que la protection de l’être humain est devenue secondaire. Parce que l’on sait faire, il faudrait légaliser. Cette absence de régularisation des nouveautés scientifiques atteint l’essence même de ce qui a constitué par le passé les lois de bioéthique à la française. C’est un changement complet de paradigme. En effet, le rôle d’une loi de bioéthique est de protéger la société, de poser des interdits, des limites, au nom de principes éthiques, anthropologiques et constitutionnels fondamentaux. En somme, il s’agit de trouver un équilibre entre des chercheurs qui souhaitent toujours chercher sans entraves et la loi qui doit leur fixer un cadre.

[…]

L’humain est-il encore l’objet des lois de bioéthique ?

Dès lors que l’embryon humain à des fins de recherche ne connaît aucune définition ou protection juridique, que la notion d’enfant à naître ne présenterait aucune incidence quant aux droits de l’enfant à naître, que la notion de l’intérêt supérieur de l’enfant à naître est juridiquement inexistante, que la prohibition de l’eugénisme ne serait pas une norme constitutionnelle, que la protection de la biodiversité et le principe de précaution n’entretiendraient aucune relation avec la bioéthique, alors il n’y aurait plus aucune limite constitutionnelle à la recherche, puis à son « application ». La protection de la santé dont on voit mal en quoi elle justifie par exemple la création de chimères animal – hommes, est pour le moment mise en avant, mais rien ne garantit qu’elle soit la finalité exclusive de la recherche. Ce texte aboutit à faire de la science le seul déterminant de l’éthique. En vain serait-il répondu que cette matière relève du pouvoir d’appréciation du législateur, dès lors que notre Constitution ne mettrait aucun point d’arrêt d’aucune sorte, aucune limite, à la liberté de la recherche.

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