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Valeurs chrétiennes : Culture

Redéfinir la démocratie face au cléricalisme médiatique

Henri Hude est interrogé dans L'Homme nouveau à propos de son dernier ouvrage Démocratie durable. Penser la guerre pour faire l’Europe. Extraits :

H "Une démocratie raisonnable, durable (ce qu’Aristote appelle une politeia), ce n’est pas une idéologie jointe à des pratiques électorales. C’est d’abord, l’infrastructure socio-économique de classes moyennes prospères : patrons de PME et leurs salariés, les uns et les autres assez éclairés pour comprendre la solidarité de leurs intérêts. C’est ensuite une authentique culture politique, non idéologique. Si vous n’avez ni culture sérieuse, ni classes moyennes, la démocratie est une idée en l’air qui ne marche pas. Ce qu’on appelle le « politiquement correct » (PC), que je définis scientifiquement, n’est pas au niveau de ce que requiert une démocratie durable. Il empêche de gérer sérieusement les affaires d’État, en particulier, de prendre en compte la permanente possibilité du conflit. […] Nous devons redéfinir la démocratie, non nous contenter de réagir à des définitions déficientes. Les idéologies, socialiste ou libérale, sont mortes et mortifères. La démocratie est la forme normale que tend à prendre, sauf obstacles, une société qui se développe. Un peu comme dans une famille : la croissance des enfants change peu à peu les rapports initiaux de stricte subordination aux parents en rapports plus égalitaires, le respect restant sauf. Il n’y a là rien que de normal.

[…] L’idéologie politiquement correcte et l’émotivité médiatique ont pour noyau commun le vague relativisme de toutes les opinions et valeurs, grossière erreur philosophique. […] Ces positions « politiquement correctes » se rattachent d’abord à une dynamique de la peur : peur de la vérité, peur du bien, peur du réel, peur de l’autre. L’érosion des principes classiques aboutit à une culture d’impuissance : la démocratie devient ingouvernable, irréformable, autant qu’indéfendable – donc, non durable. […]

L’État ne peut se désintéresser de la religion au sens large car l’homme est un animal religieux. C’est dire que chez lui, la case de l’Absolu n’est jamais vide. C’est pour cela que l’homme est violent, quand l’orgueil dominateur investit le désir d’Absolu. Soit donc l’homme fait violence hors de lui-même par la guerre, soit il se fait violence pour se vaincre luimême. C’est le sacrifice. Cette victoire intérieure n’est que frustration, si elle n’est pas un accomplissement par lequel l’homme passe au-delà de ce monde. L’homme est belliqueux dans la mesure où il n’est pas mystique et sacrificiel. René Girard est profond sur ce sujet. L’État doit reconnaître la nécessité de la régulation religieuse de la violence et donc accorder en son sein une place aux religions qui rendent ce service. […]

Vous attribuez aux médias une très large part de responsabilité dans la prégnance du politiquement correct et par là, de l’échec du pouvoir en Europe. Faudrait-il envisager une certaine forme de censure ?

Quel est le sens de cette exubérance irrationnelle dans la sphère de l’information, qui affaiblit et décervèle la démocratie, seule structure, pourtant, qui puisse intégrer en elle-même une information libre ? Une contradiction. Qu’est-ce qu’une démocratie sans pouvoir politique sérieux ? Une impuissance qui ne peut durer. Qu’est-ce qu’une démocratie où le Léviathan médiatique usurpe le pouvoir ? Une théocratie de l’idéologie, un cléricalisme des gens de médias. Le pouvoir des classes moyennes appelle des conditions culturelles sérieuses, du bon sens, de la vision, une morale des vertus qui trouve le juste milieu. Dans une politeia, on raisonne, on prend le temps de considérer les faits et de s’élever à l’essentiel. Aujourd’hui, un raisonnement de plus de vingt secondes n’est pas recevable par les médias télévisuels. Ces médias tuent la raison dans le peuple, il faut donc en changer ou ils tueront la démocratie, car il n’y a pas de démocratie durable sans la raison."

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4 commentaires

  1. Les idéologies sont peut-être mortes (et encore), mais pas leur praxis.
    La suite du discours montre que nous avons affaire, encore une fois, à un philosophe qui a trouvé une cause unique à TOUT. C’était avec l’un le désir mimétique ; avec Henri Hude, c’est la peur.
    Et tout cela, mis au service d’une réhabilitation de la démocratie, cette “bonne” démocratie que ses éternels “compagnons de route” cherchent – en France, du moins – depuis deux siècles !

  2. “Ces médias tuent la raison dans le peuple, il faut donc en changer ou ils tueront la démocratie, car il n’y a pas de démocratie durable sans la raison”
    Merci au salon Beige de renouveler les média!

  3. @ tout les lecteurs du SB qui sont anti-libéraux. Peut-être en particulier ceux qui tiennent à le rester ainsi que ceux qui ont un peu de peine à imaginer pouvoir faire ce sain exercice qui consiste à remettre en question ses convictions.
    J’observe que pour étayer votre “anti-libéralisme”, vous faites mention de certains auteurs qui ont condamnés le libéralisme. Je n’objecte pas au principe de renvoyer à des auteurs et leurs écrits. Le SB a le grand mérite de permettre le débat mais je note simplement que l’on ne peut donner consistance à une réplique sur un sujet aussi difficile, qu’en tenant compte de l’espace qui y étant naturellement limitée.
    Un débat doit rester honnête, surtout en bonne compagnie. Pour avancer des arguments, je propose qu’on aille à la source.
    Au lieu de faire référence à des auteurs qui ont développé les raisons de leur condamnation du libéralisme, je propose à ces honorables lecteurs du SB très remontés vis à vis de cette doctrine, de faire dorénavant référence à des auteurs-penseurs qui s’affichent libéraux et dont les écrits font (ou feraient) apparaître clairement une incompatibilité substantielle et fondamentale entre libéralisme et Chrétienté.

  4. Oui ces médias qui critiques tout et tous sont eux non-criticable et pour toutes leurs erreurs et dérives se cache sous la `liberté de la presse“.

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