Lu dans Minute :
"Car le coup du référendum sur la Turquie, c’est le fameux double effet « kiss cool ». D’une part, on connaît la soif de démocratie (directe) des Français et le fait que le président socialiste y ait recours ne peut que lui apporter quelques sympathies, dont lui comme son parti ont bien besoin. D’autre part, ancrer la question turque au coeur du débat des élections européennes de mai prochain, c’est paradoxalement jouer un vilain tour à l’UMP en favorisant sans doute le Front national dont on peut imaginer qu’il parlera plus fort et plus clair sur le sujet. D’autant qu’on sait bien que, pour les électeurs, la Turquie fait aussi office de symbole. Refuser la Turquie, c’est refuser l’Europe telle qu’elle se construit et surtout signifier son refus de l’entrée d’un pays musulman. […]
Enfin, François Hollande vient aussi d’offrir un joli gilet pare-balles à sa majorité sur ce sujet épineux. Car la question divise au sein des cadres du parti, mais encore plus au sein de son électorat. Du coup, la ritournelle « les Français auront le dernier mot » pourrait bien arranger tout le monde. La synthèse, toujours la synthèse…
Car si comme nous l’avons déjà évoqué les Français s’opposent à 83 % à l’adhésion de la Turquie d’après l’Ifop, c’est le cas de 73 % des électeurs de gauche et même de 81 % des électeurs socialistes! Il y a peu de chances de voir la situation s’inverser d‘ici un éventuel vote. Eventuel, car François Hollande ne s’est pas risqué à donner une quelconque date, ni même une indication. Il espère sans doute qu’il ne sera plus là quand le moment (« le jour venu » s’est-il contenté de dire lors de sa conférence de presse) arrivera. […]
On regrettera toutefois qu’il ne lance pas, tout de suite, la procédure référendaire, afin que les Français sachent ce que leur coûte la procédure de pré-adhésion. En 2011, un rapport d’experts allemands indépendant estimait que la Turquie avait déjà perçu de l’Union européenne trois milliards d’euros rien que pour la période 2007-2010, somme qui doit atteindre aujourd’hui cinq milliard d’euros. Le Commissaire européen à l’élargissement avait alors botté en touche en déclarant que « les coûts de l’adhésion de la Turquie ne pourront être estimés que dans la phase terminale des négociations ». […]"