De Francis Bergeron dans Présent :
"Le journaliste Raphaël Glucksmann vient d’être chassé de la direction du Nouveau Magazine littéraire, après seulement sept mois passés à sa tête. C’est l’homme de presse Claude Perdriel qui avait fait appel à lui pour redresser ce titre, et c’est lui qui le renvoie aujourd’hui.
Claude Perdriel est un multimillionnaire avisé (sa fortune personnelle est estimée à 150 millions d’euros), qui a constitué un groupe de presse autour du Nouvel Observateur. Il fait partie de cette gauche bobo dans l’esprit de Mai 68, qui défend un absolu libéralisme dans les mœurs comme dans le domaine économique (mais jamais dans le domaine politique à l’égard des nationaux et nationalistes), et dont le grand homme s’appelait Strauss-Kahn. Ce qui le situe bien. Pour l’anecdote, rappelons que Perdriel a 91 ans, et son épouse… 44 ans de moins que lui, ce qui l’aide à rester jeune.
Dans le groupe Perdriel, le titre Magazine littéraire était en perdition, et Perdriel avait donc appelé Glucksmann à la barre. La nouvelle fut accueillie par des clameurs de joie dans tout le camp dit « progressiste ». Radios, télévisions et médias sociaux saluaient ce choix et la relance du titre. Grâce à cette publicité gratuite, il s’est vendu 31 000 exemplaires du Nouveau Magazine littéraire le premier mois. Mais rapidement les ventes ont chuté, et en kiosque, il ne se vend plus que 7 000 exemplaires par mois, ce qui correspond très exactement à ses ventes antérieures, et ce qui est très insuffisant pour faire vivre une rédaction complète, voire même Glucksmann tout seul.
Or Perdriel a injecté dans la relance de ce titre la bagatelle de 761 000 euros en marketing et publicité. Cet investissement a certes permis de collecter 6 000 nouveaux abonnés. Mais le produit livré ne correspondait pas à l’attente des lecteurs : Glucksmann a en effet transformé la revue littéraire en un brûlot d’extrême gauche. Ni les anciens abonnés et lecteurs, ni les nouveaux n’y trouvaient leur compte, et beaucoup d’entre eux l’ont écrit sans ménagement à la direction du journal. Les ventes s’écroulent, les abonnés sont mécontents. Perdriel a beau être le mécène de beaucoup d’organes de gauche, il préfère changer la direction du journal avant qu’il ne soit trop tard.
Glucksmann (sa conjointe est la journaliste Léa Salamé) n’a aucune envie, pour sa part, d’endosser cet échec. Aussi se répand-il dans les médias en expliquant que ce départ est une sanction politique, à cause de ses critiques de Macron : « Un numéro puis un passage télé en juin dans lesquels je mettais fortement en doute le “progressisme” du président déclenchèrent une crise qui s’avéra vite insurmontable. (…) Plus encore que le journal, on m’a fait comprendre que ce sont ma personne, mes tweets, mes passages télés, mes posts Facebook qui posaient problème. » […]"