Suite à l'article "Sortir de l'euro : plus facile qu'on ne le croit", publié il y a quelques jours, voici la position plus pragmatique de Bruno Gollnisch, pourtant adversaire incontestable de l'Europe de Bruxelles, extrait de son dernier ouvrage Une volonté, un idéal :
"Au sein de notre groupe parlementaire, je n’étais pas le plus hostile à l’euro au départ. Je ne considérais pas que le pouvoir de l’Etat sur la manipulation monétaire fut tellement une prérogative légitime (…)
Je me disais également que s’il y avait une monnaie européenne garantie par des économies qui étaient encore des économies développées, il nous serait possible de faire ce que font les Etats-Unis, qui financent leur déficit en faisant marcher la planche à billets, c’est-à-dire en émettant des dollars qui trouvent preneurs sur les places internationales, à commencer par les monarchies pétrolières qui se font payer en dollars (…) la seconde guerre du Golfe a été déclenchée contre Saddam Hussein le jour ou celui-ci a demandé que le pétrole irakien lui soit payé en euros et non plus en billets verts (…) Je pensais aussi que si nous pouvions imposer l’euro comme monnaie de réserve internationale, qui s’imposerait naturellement compte tenu du poids conjugués de nos économies, nous pourrions faire ce que les Américains font avec la leur et ça nous donnerait davantage de puissance, d’aisance et d’influence.
Tel n’a pas été le cas, en raison (notamment) de la politique malthusienne du traité de Maastricht et de la Banque centrale d’émission (…) Je suis bien obligé de constater que cette monnaie-puissance a été dans les faits une monnaie-faiblesse. On n’a pas réussi à imposer l’euro. Une monnaie qui souffre d’une autre faiblesse structurelle, à savoir qu’elle couvre des pays aux économies extraordinairement disparates , de la Grèce à l’Allemagne…
Pour autant faut-il sortir brutalement de l’euro ? Je crois qu’il faut une renégociation là aussi, afin que la BCE soit placée sous une autorité politique, celle du Conseil des ministres de l’UE. Et qu’elle cesse d’agir de façon absolument indépendante sans avoir de compte à rendre à personne, avec pour conséquence que notre marge de manœuvre économique et sociale est extrêmement réduite du fait que les paramètres de notre finance sont décidées par d’autres .
Je ne suis pas sûr du tout que l’euro soit absolument indispensable à la cohésion européenne (…) l’erreur est d’avoir été boulimique et d’avoir agrégé à l’Europe et à la zone euro des économies qui avaient subi un demi-siècle de communisme et qui se relevaient péniblement de leur ruine et de leur misère."
Tartepousse
[Plutôt que de juger de manière péremptoire sans apporter le moindre argument économique, votre commentaire serait publiable si de surcroit vous n’attaquiez pas les rédacteurs du Salon Beige sur de prétendus aveuglements…
PC]
Laguérie Gérard
On est quand même étonné que Bruno Gollnisch ait trouvé un argument en faveur de l’euro dans la possibilité que cela aurait donné à l’Europe de se comporter de façon aussi cynique que les étatsuniens. Est-ce bien là le véritable enjeu de la lutte des nations contre les empires ? D’ailleurs, s’il y avait eu une possibilité que tel fût le cas, jamais lesdits étatsuniens n’auraient avalisé et même encouragé l’enrôlement des pays européens dans l’Europe monétaire, appendice européen des Etats-Unis.
PEB
Merci PC pour vos précisions.
Même Bruno Gollnisch affirme qu’il faut que l’euro soit non seulement géré mais gouverné. Il admet que l’euro est l’épée et le bouclier de la guerre économique et financière entre le Continent et les Iles. L’Histoire ne cesse d’emporter les hommes même ceux qui ont ramé à contre-courant.
Je pense que c’est la direction qu’est en train de prendre N. Sarkozy et A. Merkel (qui jouent très bien leurs rôles respectifs pour amuser la galerie). Un semblant de Trésor européen (idée de J. Attali) se fait jour. D’ici 2013, le fond monétaire de secours sera pérennisé et aura un accès direct au marché.
Je disconviens courtoisement à l’idée de mettre la BCE sous la dépendance directe des politiques. Cela affaiblirait la confiance publique et les Allemands n’en voudraient pas. La stabilité permet d’avoir une monnaie garante de la validité des contrats. L’indépendance est le moyen technique d’y parvenir. Cependant, rien n’interdit à la BCE non pas de solliciter des instructions mais de se coordonner avec le Conseil.
En revanche le fond monétaire européen demande une commande politique sous l’autorité du Conseil (et donc de l’intergouvernemental). C’est cette institution qui doit donner le la aux politiques de crédits des États membres. Elle est un vrai partage de souveraineté monétaire. Le consensus politique doit être la règle générale de décision, ce qui n’exclut ni la promptitude, ni la puissance d’action.
La Commission doit apporter toute son expertise technique, à condition d’être suffisamment diligente. Le Parlement devrait avoir un droit de regard et de contrôle (au moins a posteriori) de ce fond.
Guillaume
Cette campagne mérite de dévoiler quelques dessous des discussions programmatiques au FN.
Où l’on voit par exemple que BG fait preuve de pragmatisme et réalisme dans sa pensée économique. Cette pensée qui nuance légèrement le discours officiel du FN et diffère notablement de la tendance incarnée par Marine Le Pen actuellement, qui vise à séduire l’électorat de gauche. C’est la raison pour laquelle cette dernière, dans une visée plus électoraliste(ses détracteurs diraient démagogique) s’est prononcée récemment pour la retraite à 60 ans.
Corso
Les USA ont permis à des millions de gens de pouvoir échanger.
En effet lorqu’un état édite de la monnaie cette dernière n’est pas forcément reconnue par les autres.
Celui qui la reçoit si jamais il l’accepte ne le fait que dans la perspective de vendre des produits à ce même émetteur à son tour car hors de cette transaction (il lui rend ses billets), cette monnaie ne représente RIEN pour lui.
La création du dollar devise mondiale a été faite en accord avec les vieux pays européens et non contre eux, elle a permis à tous les petits et grands pays d’échanger librement et de pouvoir préserver au besoin une devise interne.
C’est un immense service qui est rendu.
Bruno Gollnisch le fait remarquer à propos des monarchies pétrolières qui vendent plus qu’elles ne peuvent acheter.
C’est pourquoi il n’est pas question de créer un autre usage alors que le premier convient parfaitement. L’euro n’avait donc pas ce rôle.
On notera aussi que “la planche à billet” n’en est pas exactement une.
Une monnaie n’existe que SI elle est adossée à un actif tangible et probant….sinon elle disparaît par dilution.
Ainsi les USA ont surtout financé leur développement à venir, par du crédit émis puis progressivement remboursé.
Nous le faisons aussi.
Même si des abus récents ont existé, la situation du pays montre que la facilité de la fameuse planche n’était pas forcément celle que l’on pourrait imaginer.
Ce service du dollar pour certains cas n’empêche pas qu’il soit indispensable de tenir à la prérogative d’état concerant la monnaie dès lors que les échanges sont plus importants…. sauf que cette dernière ne s’exerce plus à la manière ancienne et que beaucoup on du mal à investir la nouvelle.
L’absence de prérogative reviendrait dans l’idée à ce qu’un particulier laisse son portefeuille sur la table afin que tout le monde puisse y puiser au besoin. De nombreuses personnes se trouveraient des besoins illimités!
Il est tout a fait juste de dire que la politique de l’euro a été malthusienne, je vais même plus loin en disant qu’elle a été et reste une véritable escroquerie qui a comme résultat le siphonage de la richesse immédiate des pays entrants en direction de l’allemagne et, il faut bien le reconnaître… de la France.
Le mécanisme est simple : Nous émettons pour eux ou nous garantissons l’émission de devises en masse, nous les leur confions sous forme de “subventions” ou dotations conditionnelles d’ouverture des marchés puis comme ils n’en trouvent pas un usage pertinent nous les leur siphonons!
Pendant ce temps, afin d’éviter une réaction monétaire qui leur serait nécessaire, nous avons limité leur endettement à 3% du PIB alors qu’ils étaient en situation d’émergence.
[En n’en faisant rien pour notre part, bien entendu]
Pour ce qui concerne le présent, il est normal que la BCE soit totalement indépendante (sinon ce serait ingérable) nonobstant les consignes qui lui sont données par les différents états au travers d’une feuille de route.[Il s’agit donc de la réunion des Ministres des finances]
Il n’est donc pas souhaitable d’envisager un “conseil des ministres de l’UE” (!) pour quelque raison que ce soit.
Par contre il est indispensable d’envisager la sortie de l’euro actuel, invivable in fine.
Un peg doit être établi avec l’Allemagne par le rétablissement des monnaies respectives ou par un serpent monétaire court afin de rapprocher ces deux pays qui représentent 50 % de la masse monétaire de la zone.
Un autre peg plus large, à multiple et variable différents, doit être installé en direction des autres pays.
Il est par ailleurs possible d’établir un mineuro (mini-euro variable et éphémère) à usage interne pour rétablir les finances des pays en difficulté.
L’euro comme le franc sont des outils dont il convient avant tout usage de définir les objectifs.
Pour conclure, on sait que la France est maîtresse de ses décisions et peut parfaitement sortir de l’euro à son intérêt.
LB
Un pays ne peut être souverain sans être responsable de sa monnaie.
PG
La méthode que préconise B. GOLLNISCH est pertinente, par sa gradualité institutionnelle et monétaire.
Mais sa préconisation de demeurer dans l’€uro, parce qu’il ne serait plus piloté par des hauts fonctionnaires relativement indépendants, mais par le Conseil des Ministres, ne conduit-elle pas à se contredire quand il dit de manière très pertinente de la gouvernance du Franc : ”Je ne considérais pas que le pouvoir de l’Etat sur la manipulation monétaire fut tellement une prérogative légitime (…)”, point de vue très libéral à la Friedman qui est une évidence que démontrer l’histoire monétaire.
Mais cette manipulation de la monnaie par l’Etat national peut-elle être remplacée par une manipulation confiée aux chefs de gouvernements européens et à leurs ministres ?
Car quand on voit comment ils ont par une action concertée au niveau européen ”sauvé” les banques en accroissant vertigineusement les dettes des états (et donc des banques qui leur ont prêté cette dette supplémentaire), faut-il reproduire au niveau européen ce qu’il analyse comme ayant été néfaste au niveau national ?
Car en effet, tant que le Franc fut géré de manière privée, par des ”régents ” cooptés dans le monde des affaires et de la banque privée ( ”les 200 familles”) il fut solide. Car ces gens avaient bien des défauts, sauf un seul : ils savaient qu’un bon compte ne peut s’équilibrer durablement par la dette, sans que cela ne mène à la dévaluation.
Faut-il vraiment redonner des possibilités encore accrues de nuisance monétaire aux politiques, mais cette fois au niveau européen ?
C’est la critique qu’on pourrait formuler sur cette procédure que propose Bruno GOLLNISCH. La solution d’un décrochage de l’Euro monnaie unique pour un €uro monnaie de référence commune, pour permettre à chaque pays de se sauver selon ses besoins et moyens, sera sans doute la seule possible.
Corso
Réponse à @PG :
Un état n’est pas un compte d’exploitation d’entreprise, en conséquence l’équilibre stricte des finances que vous semblez avancer reviendrait à un recul relatif puisqu’il serait signifiant de l’arrêt des investissements donc de la perte de confiance dans l’avenir du pays.
Il faut intégrer mieux cette notion.
Réponse à @Guillaume :
On peut prêter à chacun toute intention électoraliste mais concernant la retraite à 60 ans, j’ai défendu cette option qui est raisonablement libérale et en tous cas surtout pragmatique.
En effet il sera nécessaire d’augmenter encore et encore l’âge de la prise de retraite à court terme pour des raisons simplement mathématiques dans l’acceptation actuelle.
La proposition des 60 ans par contre est une position dans le débat qui s’articule avec un autre volet, disons “participatif” (la françaction) qui n’a pas encore été évoqué.
A 60 ans un cotisant peut envisager une re-activité cohérente, rentable et modulée sur 15 ans et mieux s’il le souhaite, ce qui n’est plus possible mentalement à 65 ou 68 ans.
Rien de démagogique mais une réelle solution, il en faut!
Solange
Bruno Gollnisch fait preuve d’une grande clairvoyance dans son analyse économique de la réalité.
Il ne suffit pas de dire démagogiquement qu’il faut sortir de l’euro, encore faut-il connaître les moyens pratiques d’en sortir.
Gollnisch se montre encore une fois grand connaisseur des dossiers qu’il aborde. Un véritable homme d’Etat compétent et capable.