Chanoine régulier de Saint-Victor (rattaché à la grande branche des chanoines réguliers de Saint-Augustin), le Père Martin de La Roncière a été interrogé dans La Nef. Extrait :
La liturgie tient une place importante dans votre vocation : comment analysez-vous la situation liturgique actuelle en France et qu’avez-vous pensé du motu proprio Traditionis custodes du pape François ?
Vaste sujet ! La France est le pays des extrêmes, même dans l’Église : cela va des plus « progressistes » aux plus « traditionalistes ». Le courant « traditionaliste » s’est développé au lendemain du IIe Concile du Vatican, en réaction contre de nombreux abus et errements dans le domaine liturgique. Concile ! Concile ! Que d’excès n’a-t-on commis en ton nom ! Même si, Dieu merci ! depuis les années 80, grâce à l’impulsion donnée par saint Jean-Paul II et à l’arrivée de nouvelles générations de prêtres et de fidèles, la liturgie s’est « assagie » un peu partout, le courant « tradi » reste vigoureux en France, comme l’a bien montré votre dossier de l’été dernier (cf. La Nef n° 338). Grâce à la bienveillance et au souci d’unité de saint Jean-Paul II, puis singulièrement de Benoît XVI, avec le motu proprio Summorum Pontificum de 2007, les « tradis » restés fidèles à Rome ont trouvé droit de cité dans l’Église et la situation s’est bien apaisée.
Le motu proprio Traditionis custodes est troublant parce qu’il obéit à une logique inverse de celle de Benoît XVI. Celui-ci parlait de « deux formes de l’unique rite romain » pouvant s’enrichir mutuellement. Mais s’il n’y en a plus qu’une, celle issue de la réforme liturgique postconciliaire, quelle est la place dans l’Église de la forme antérieure et de ceux qui y sont attachés ? On a l’impression qu’est soudain décrétée leur disparition alors que, rien qu’en France, ils sont des dizaines de milliers, dont beaucoup de jeunes, encadrés par un clergé nombreux et jeune. Je compatis à leur tristesse et à leur inquiétude.