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Culture

Un “boomer” déconstruit le mythe de la libération des moeurs

Un “boomer” déconstruit le mythe de la libération des moeurs

Dans l’épilogue de son nouvel ouvrage Décadanse, Patrick Buisson se décrit lui-même comme un membre de la “race maudite” des “boomers”, ces “enfants gâtés des Trente Glorieuses”, cette génération du “nihilisme encensé”, “qui a rompu avec la tradition et dilapidé l’héritage”. Le sociologue et politologue démonte, avec la précision d’un ethnologue, cette

“vaste entreprise de démolition dénommée instinctivement modernité ou progrès”.

Dans cette somme retraçant les aspects politiques, médiatiques et culturels de l’offensive hédoniste qui toucha jusqu’à l’Eglise, la longue litanie des dépravations donne le tournis : extension du divorce, relations hors-mariage, légalisation de la pilule, promotion d’une mentalité contraceptive, dépénalisation de l’avortement, campagnes homosexualistes, puis pédophiles… Avec la droite, du général de Gaulle à Giscard, aux premières loges, dans tous les sens du terme, pour avaliser les nouvelles moeurs d’une France qui renie la famille.

L’auteur évoque par exemple l’ancestrale cérémonie des relevailles :

Loin d’être un rituel pénitentiel ou stigmatisant, la liturgie des relevailles était une cérémonie d’action de grâces au cours de laquelle l’assemblée toute entière célébrait dans la joie la nouvelle identité de l’impétrante. Seule, la jeune mère, un cierge à la main, s’agenouillait devant l’autel tandis que le prêtre posait son étole sur son bras pour lui signifier son retour dans l’Eglise avant de l’asperger d’eau bénite. […] Après le concile Vatican II, il fut décidé de supprimer la liturgie des relevailles pour la remplacer par une modeste bénédiction des parents sans plus aucun rapport avec la coutume. Faute de volontaires, ce pâle substitut dépérit aussi vite qu’il était apparu.

Retraçant précisément les légalisations successives de la pilule contraceptive et de l’avortement, Patrick Buisson montre l’influence déterminante de la franc-maçonnerie :

Pierre Simon s’en attribuera tous les mérites, deux ans plus tard, devant le convent de la Grande Loge de France : “Ce fut peut-être ma plus grande satisfaction (…) d’avoir pu transposer un travail rédigé en loge, d’avoir pu l’amener jusqu’à la place publique, jusque dans le territoire du législateur, engendrant les modifications qui ont amené les nouvelles définitions de la morale de la nation.”

Libération piège à c… ? L’auteur souligne surtout que l’arrivée de la pilule, légalisée sous prétexte que cela permettait d’éviter des avortements, a chosifié les femmes, devenues des machines à donner satisfaction aux hommes, sans crainte des “accidents”.

Quant à la légalisation de l’avortement, l’auteur dénonce la propagande, qui évoquait jusqu’à un million d’avortements clandestins, chiffre qui ne reposait sur aucune base scientifique.

L’intox des réformateurs avait été si massive, si en prise avec les attentes de la classe discutante que le chiffre de 850 000 avortements fut retenu dans l’exposé des motifs des deux projets de loi visant à légaliser l’avortement, celui de Pierre Tattinger en 1973 et celui de Simone Veil l’année suivante. Auditionné par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, Gérard Calot, le nouveau directeur de l’Inde qui venait de succéder à Alfred Sauvy, s’étonna qu’on pût envisager d’engager le débat sur une question aussi sensible à partir d’un chiffre si éloigné de la réalité. Le parti pris gouvernemental de dramatisation n’avait que faire des travaux des experts.

Outre l’intox sur le nombre d’avortements clandestins, la presse féminine exagérait à 5000 le nombre de décès annuels liés à l’avortement clandestin. Aussi l’Ined se résolût à rendre publiques ses statistiques :

Sur les 332 décès d’origine obstétricale enregistrés en 1963, 56 femmes étaient mortes des suites d’un avortement. Pour les années, le chiffre oscillait entre un minimum de 47 et un maximum de 158.

Concernant l’avortement, l’auteur rappelle l’option eugénique des projets de loi et le thème de la surpopulation mondiale asséné à partir des années cinquante réintroduisit l’idée d’une sélection entre les enfants du tiers-monde jugés globalement surnuméraires et ceux des pays développés.

Rien d’étonnant donc à ce que les militantes du Planning familial aient dévotement accroché le portrait de Margaret Sanger au siège parisien de leur association. Ni à ce que l’eugénisme constitue l’arrière-texte de toute la propagande en faveur du contrôle des naissances.

Cette idéologie est même clairement revendiquée par le franc-maçon Pierre Simon, qui voit dans la pilule une triple mission :

En premier lieu, la préservation du patrimoine génétique, propriété de tous les humains (…), bloquer la transmission des tares héréditaires transmissibles connues, c’est un devoir d’espèce. Le second rôle est la gestion qualitative de la vie : la santé est devenue propriété collective. Nous cotisons à la Sécurité sociale pour la qualité de la vie et la santé de la collectivité. Chacun est solidaire de tous. Le troisième rôle de la contraception est la modulation du nouveau schéma de la famille.

Quant à l’Eglise, son silence lors de l’adoption de la loi Veil fut remarquée et porte une lourde responsabilité :

A la veille du débat parlementaire, Jean Foyer, le président de la commission des lois, était allé à la rencontre du cardinal François Marty, président de la Conférence épiscopale, pour lui expliquer, noms et chiffres à l’appui, que des dizaines de députés de la majorité s’apprêtaient à basculer en faveur du projet de loi, faute d’une déclaration officielle et ferme de la part de l’épiscopat. Il fallut attendre que la loi fût adoptée et déclarée conforme à la Constitution pour que l’archevêque consentît à faire observer publiquement que le légal n’était pas toujours moral.

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