Outre les points non négociables, la doctrine sociale de l’Eglise est un trésor pour qui veut bien la lire. Voici ce que l’on peut trouver dans la DSE sur le plan de l’économie :
"L’Église reconnaît le rôle pertinent du profit comme indicateur du bon fonctionnement de l’entreprise. […] le but de l’entreprise n’est pas uniquement la production du profit, mais l’existence même de l’entreprise comme communauté de personnes qui, de différentes manières, recherchent la satisfaction de leurs besoins fondamentaux et qui constituent un groupe particulier au service de la société tout entière. Le profit est un régulateur dans la vie de l’établissement mais il n’en est pas le seul; il faut y ajouter la prise en compte d’autres facteurs humains et moraux qui, à long terme, sont au moins aussi essentiels pour la vie de l’entreprise." (Centesimus Annus, n. 35)
"Chacun a le droit d’initiative économique, chacun usera légitimement de ses talents pour contribuer à une abondance profitable à tous, et pour recueillir les justes fruits de ses efforts. Il veillera à se conformer aux réglementations portées par les autorités légitimes en vue du bien commun" (cf. CA, nn. 32, 34). (CEC, n. 2429)
"Cette doctrine reconnaît aussi la légitimité des efforts des travailleurs pour obtenir le plein respect de leur dignité et une participation plus large à la vie de l’entreprise, de manière que, tout en travaillant avec d’autres et sous la direction d’autres personnes, ils puissent en un sens travailler "à leur compte" (Laborem Exercens, n. 15), en exerçant leur intelligence et leur liberté. (Centesimus Annus, n. 43)
"Il faut remarquer que, dans le monde d’aujourd’hui, parmi d’autres droits, le droit à l’initiative économique est souvent étouffé. Il s’agit pourtant d’un droit important, non seulement pour les individus mais aussi pour le bien commun. L’expérience nous montre que la négation de ce droit ou sa limitation au nom d’une prétendue "égalité" de tous dans la société réduit, quand elle ne le détruit pas en fait, l’esprit d’initiative, c’est-à-dire la personnalité créative du citoyen. Ce qu’il en ressort, ce n’est pas une véritable égalité mais un "nivellement par le bas". A la place de l’initiative créatrice prévalent la passivité, la dépendance et la soumission à l’appareil bureaucratique, lequel, comme unique organe d’ "organisation" et de "décision"-sinon même de "possession"-de la totalité des biens et des moyens de production, met tout le monde dans une position de sujétion quasi absolue, semblable à la dépendance traditionnelle de l’ouvrier-prolétaire par rapport au capitalisme". (Sollicitudo Rei Socialis, n. 15)
En commentaire, je propose aux lecteurs de citer les propositions économiques des candidats et/ou d’autres extraits de la DSE concernant l’économie.
Bernard
Paul VI et JP II savait appeler un chat un chat pace qu’ils savaient ce dont ils parlaient. Entre autres quand ils emploient l’expression de “position de sujétion quasi absolue”, rien n’est plus vrai, et cela concerne autant le monde dit capitaliste que le monde dit socialiste. Parce que dans un cas comme dans l’autre, l’homme laborieux est très souvent réduit à la définition ou à l’exécution de processus techniques ou fonctionnels qui enlèvent tout ou partie de la part de créativité qui devarit revenir à tout un chacun. Sans même parler de cette étrange vision unique qui dicte à tout le monde la manière de penser et d’agir d’un bout à l’autre de la planète et quel que soit le secteur d’activité. Je remarque que cette encyclique est sortie dans les années 70 et que c’et la première fois que je vois citer ce passage ô combien lumineux. Cela prouve une nouvelle fois que l’enseignement des Papes est outrageusement passé sous silence par les évêques et les prêtres (qui reçoivent les consignes en ce sens des comités diocésains), qui laissent les fidèles dans l’ignorance ou au mieux distillent une bouillie pour chat inoffenssive. Comment appeler un tel comportement, sinon une TRAHISON pure et simple..!!!
Pascal G.
Il me semble que la perte d’influence de l’Eglise et des catholiques dans les sociétés modernes européennes ou de culture européennes vient de ce que les catholiques ont renoncé à parler authentiquement ”catholique”sur l’économie et le social pris dans un sens large. D’où des points de vue moralisateurs, et généralistes, souvent confus, voire opposés à la morale catholique, et à la doctrine sociale de l’Eglise, non enseignée, non étudiée, non diffusée, particulièrement par le Clergé.
Cette absence des catholiques sur ce terrain les a marginalisés sur le terrain de l’éthique et de la morale : ils ne reprendront pied dans la vie collective qu’en élaborant sur la vie économique et sociale des analyses construites et actuelles.
Cela nous impose d’éviter le double écueil du moralisme de la bienfaisance, ou de la simple bonne gouvernance, autant que le socialisme ou l’étatisme de la justice sociale par la redistribution, que l’on retrouve à la fois chez nos évêques et dans les partis de la droite souverainiste et nationale. Lesquels sur ce plan sont encore très loin de la doctrine sociale de l’Eglise, comme par exemple sur la subsidiarité et l’autonomie économique de la famille, des entreprises, des assurés sociaux, des communautés naturelles, communes, provinces, associations, etc…
Ces partis de la droite hors système pensent encore que protéger une réalité sociale, c’est la financer par l’impôt redistributeur, ce qui est du socialisme et non le respect des droits naturels des corps sociaux.
Ainsi, ne se distinguant pas des systèmes de pensée dominants en matière économique et sociale, les catholiques, devenus soit conservateurs, soit vaguement socialisants et altermondialistes, ne parviennent pas à être suffisamment crédibles et audibles sur le reste du message, l’essentiel, la Foi, la morale et le respect de la Vie dans toutes ses dimensions. La Foi sans les oeuvres est-elle possible ?
Pascal G.
2 citations de texte de la DSE à mettre à la suite de mon commentaire précédent :
231. On peut parler à juste titre de lutte contre un système économique entendu comme méthode pour assurer la primauté absolue du capital, de la propriété des instruments de production et de la terre sur la liberté et la dignité du travail de l’homme (cf. Laborem Exercens, n. 7). En luttant contre ce système, on ne peut lui opposer, comme modèle de substitution, le système socialiste, qui se trouve être en fait un capitalisme d’État, mais on peut opposer une société du travail libre, de l’entreprise et de la participation. Elle ne s’oppose pas au marché, mais demande qu’il soit dûment contrôlé par les forces sociales et par l’État, de manière à garantir la satisfaction des besoins fondamentaux de toute la société.
(Centesimus Annus, n. 35)
232. La seule initiative individuelle et le simple jeu de la concurrence ne sauraient assurer le succès du développement. Il ne faut pas risquer d’accroître encore la richesse des riches et la puissance des forts, en confirmant la misère des pauvres et en ajoutant à la servitude des opprimés. Des programmes sont donc nécessaires pour “encourager, stimuler, coordonner, suppléer et intégrer” (MM, n. 44), l’action des individus et des corps intermédiaires. Il appartient aux pouvoirs publics de choisir, voire d’imposer les objectifs à poursuivre, les buts à atteindre, les moyens d’y parvenir, et c’est à eux de stimuler toutes les forces regroupées dans cette action commune. Mais qu’ils aient soin d’associer à cette œuvre les initiatives privées et les corps intermédiaires. Ils éviteront ainsi le péril d’une collectivisation intégrale ou d’une planification arbitraire qui, négatrices de liberté, excluraient l’exercice des droits fondamentaux de la personne humaine.
(Populorum Progressio, n. 33)