Le danger est pointé par Aymeric Pourbaix dans Famille chrétienne :
"« Dans une campagne, il n’y a qu’un dieu, et il faut se méfier des apôtres qui se baladent avec le Saint-Sacrement. » Prononcée pour déplorer la cacophonie dans son parti, cette petite phrase est d’un député plutôt laïciste, mais connaissant bien son histoire de France et son catéchisme… N’y a-t-il pas là une tentation subtile qui guette aussi les catholiques en ce début de période électorale : celle de se laisser conduire par un esprit partisan, hérité de la Révolution, qui place l’appartenance politique au-dessus des droits de Dieu sur toutes les réalités humaines, y compris les élections ?
Avant donc que les esprits ne s’échauffent, sans doute est-il utile de rappeler quelques évidences, afin de ne pas mettre entre parenthèses, pendant trois mois, ce qui unit les catholiques au profit de ce qui les divise. Il peut certes y avoir différentes options temporelles pour un électeur chrétien, dans notre société devenue extrêmement complexe du fait d’une technique envahissante et pas toujours maîtrisée. Qui peut affirmer, à titre d’exemple, détenir la solution idéale pour lutter contre les méfaits de la mondialisation ou résoudre le problème de la dette ? Sans compter qu’il faudra aussi, sur le plan personnel, juger des qualités morales des candidats, nécessaires pour affronter une situation de crise et prendre les décisions courageuses qui s’imposent.
Facteur d’unité, la réflexion de l’Église en matière politique s’est beaucoup affinée ces dernières années, avec notamment l’apport du cardinal Ratzinger, puis de Benoît XVI. Si l’Église ne donne aucune consigne de vote, dans un sens ou dans l’autre, il y a en revanche des points d’attention sur lesquels elle ne peut pas transiger et se taire. Ce sont les fameux principes non négociables, qui constituent en quelque sorte la racine et le socle commun de la société : la protection de la famille, le respect inconditionnel de la vie humaine, du début à la fin, et la libre éducation des enfants. À eux seuls, ces points cardinaux ne constituent pas une politique, mais ils permettent à la politique de ne pas perdre le nord. Les méconnaître ou les bafouer, c’est mettre en danger les « fondements vrais et solides » de la société, et la conception même de la personne humaine.
Le relatif silence médiatique imposé à une manifestation comme la Marche pour la vie, réunissant pourtant plusieurs dizaines de milliers de personnes – des familles, des jeunes – et soutenue par trente-deux évêques, démontre qu’il y a encore du chemin à faire…"