L’abbé de Massia (FSSP) est interrogé dans L’Appel de Chartres sur son ouvrage sur la théologie du sacrifice. Extraits :
[…] je suis convaincu que la crise doctrinale que nous traversons depuis plusieurs décennies touche de très près la question du sacrifice ; certains perdent de vue l’importance de la vertu de religion dans notre foi, oubliant que le sommet de la vie chrétienne est d’honorer Dieu, de lui rendre hommage, de se reconnaître humble créature devant le Créateur : ce qui se fait justement par le sacrifice et, depuis la Rédemption, par la sainte messe, renouvellement du sacrifice du Christ. La réaction de certains théologiens pendant le confinement (selon lesquels la privation de messe était finalement une bonne chose, et qu’il fallait quitter une vision trop « religieuse » de la foi), les récents débats autour de la place du sacerdoce, du sacré, ou du célibat des prêtres, nous montrent que nous avons là un enjeu crucial de la crise de l’Église. D’où l’importance du thème de nôtre pèlerinage cette année : L’Eucharistie, salut des âmes ! […]
La mort du Christ en croix est un vrai sacrifice, un acte d’hommage que le Christ rend à son Père, et qui compense tous les actes de haine que les hommes ont lancés vers Dieu. Au Golgotha, la bonté de l’amour du Christ vient détruire la malice du péché. Mais tout n’est pas terminé après le sacrifice du Christ, au contraire, tout commence ! Car Dieu, qui nous a créé sans nous, ne nous sauve pas sans nous. Il faut encore que le chrétien dise « oui » à son salut, qu’il s’unisse à la croix du Christ par un acte personnel, volontaire, pour obtenir ce salut mérité par le Christ. C’est la participation personnelle à l’œuvre de la Rédemption, que les protestants ne veulent pas voir ; et c’est toute l’importance de la messe. Car si le sacrifice du Christ est renouvelé devant nos yeux à la messe, c’est pour que nous puissions nous y associer personnellement. Nous n’étions pas là, en l’an 33, au Golgotha ; par la messe, c’est le Golgotha qui vient à nous en l’an 2023. […]
A la messe, il se passe quelque chose de très important. Le chrétien, parce qu’il est une créature, présente son sacrifice à Dieu, le sacrifice personnel de sa semaine, l’acceptation de ses difficultés, l’offrande de ses joies… C’est le moment, essentiel, de l’Offertoire : ce sacrifice est symbolisé par l’offrande du pain et du vin que le prêtre réalise à ce moment. Seulement, ce sacrifice est bien faible, puisqu’il vient d’un homme pécheur : il ne suffit pas, en lui-même, à faire son salut. Mais à la messe, de même que le pain et le vin sont convertis dans le sang et le corps du Christ, de même, et au même moment, le sacrifice de l’homme est converti, assumé dans l’immense sacrifice du Christ : et ainsi, au final, le chrétien offre personnellement le sacrifice du Christ, unique sacrifice agréable à Dieu, et trouve ainsi son salut. Cette vérité essentielle a malheureusement été tragiquement oubliée, avec la modification de l’offertoire dans le Novus Ordo. C’est aussi pour cela que j’ai voulu écrire ce livre : pour rappeler aux chrétiens qu’il faut participer à la messe, et que la seule vraie manière de participer à la messe, c’est d’y venir pour offrir un sacrifice, un culte à Dieu : cela est magnifiquement exprimé dans la messe traditionnelle, et c’est l’une des raisons les plus profondes de notre attachement à cette forme.