L'Homme nouveau publie un texte du Dr David S. Crawford, professeur associé de théologie morale et de loi de la famille de l’Institut pontifical Jean-Paul II à Washington et du Dr Stephan Kampowski, professeur d’anthropologie philosophique à l’Institut pontifical Jean-Paul II à Rome. Texte signé par de nombreuses personnalités. Extraits :
"Le 23 juin 2015 a été publié l’Instrumentum laboris (« document de travail ») en vue de la XIVe Assemblée ordinaire du Synode des évêques. Ce document couvre une série de sujets liés au thème de la famille choisi par le Synode. Le paragraphe 137 concerne un document clé du Magistère moderne, l’encyclique Humanæ Vitæ. Il en traite d’une manière qui à la fois remet en question la force de cet enseignement et propose une méthode de discernement moral résolument non catholique. Cette approche du discernement contredit tout ce qui, jusqu’à présent, a été enseigné par le Magistère de l’Église concernant les normes morales, la conscience et le jugement moral, en suggérant qu’une conscience bien formée puisse se trouver en conflit avec les normes morales objectives.
En notre qualité de théologiens moralistes et de philosophes moralistes catholiques, nous pensons qu’il est de notre devoir de prendre la parole contre la distorsion de l’enseignement catholique implicitement présente dans le paragraphe 137. Si cela était approuvé par le Synode, ce texte défectueux de l’Instrumentum laboris conduirait à porter la confusion parmi les fidèles. Le paragraphe 137 devrait être supprimé et remplacé par un paragraphe qui parle de la conscience de façon plus précise, qui célèbre la sagesse et la beauté d’Humanæ Vitæ, et qui puisse aider les époux à comprendre que des grâces sont à leur disposition pour vivre selon le plan de Dieu le don de la sexualité.
La traduction officielle française du site du Vatican propose le texte suivant :
En ayant bien présente à l’esprit la richesse de sagesse contenue dans Humanæ Vitæ, en lien avec les questions traitées par cette encyclique, deux pôles ressortent, qui doivent être constamment conjugués ensemble. D’une part, le rôle de la conscience conçue comme voix de Dieu qui résonne dans le cœur humain formé à l’écouter ; de l’autre, l’indication morale objective, qui empêche de considérer l’engendrement comme une réalité dont on peut décider arbitrairement, sans tenir compte du dessein divin sur la procréation humaine. Quand la référence au pôle subjectif prévaut, on risque aisément des choix égoïstes ; dans l’autre cas, la norme morale est ressentie comme un poids insupportable, ne répondant pas aux exigences et aux possibilités de la personne. La conjugaison des deux aspects, vécue avec l’accompagnement d’un guide spirituel compétent, pourra aider les époux à faire des choix pleinement humanisants et conformes à la volonté du Seigneur.
[…] La formulation du paragraphe est profondément ambiguë et elle tend à présenter la norme morale comme extrinsèque aux personnes humaines et à la vie bonne qu’elles sont appelées à vivre. En s’exprimant comme cela, elle suggère que la norme est exclusivement négative et, disons-le, coercitive. Mettre de cette façon l’accent sur la fonction prohibitive de la norme équivaut à ignorer le rôle positif joué par la norme dans la promotion de la croissance personnelle du sujet moral et sa réalisation dans le bien. Comme ce paragraphe n’enseigne pas que la norme elle-même, dans toute son objectivité, révèle quelque chose de décisif pour la beauté et la bonté de la vie humaine bien vécue, il donne aussi l’impression que les normes morales pourraient être en fait « un poids insupportable, qui ne répond pas aux exigences et aux possibilités de la personne ». [Lire la suite]