La Quadrature du Net, spécialisé dans les libertés sur internet, dénonce la proposition socialiste :
"[…] Cette proposition de loi peut être découpée en deux parties distinctes.
La première concerne la notion de pression psychologique sur les femmes et leur entourage en matière d'IVG.
La notion de pression psychologique sur les femmes et leur entourage devrait être interprétée strictement, c'est-à-dire par « communication directe adressée aux femmes ou leur entourage pour faire pression sur elles de façon à les dissuader de recourir à l'avortement ». La volonté d'y inclure ce qui relève de la mise à disposition de contenus sur Internet dont l'accès est volontaire de la part de l'utilisateur risque de rendre la notion de pression psychologique bien trop extensible et, appliquée éventuellement dans l'avenir à d'autres opinions, de devenir une source de dérives importante.
L'autre aspect de la loi concerne la lutte contre les pratiques de désinformation, notamment sur Internet, induisant intentionnellement en erreur.
L'inclusion de la simple publication de contenus dans le délit d'entrave numérique créerait un précédent d'atteinte à la liberté d'opinion et d'expression inacceptable. Le fait que la visibilité de ces contenus soit excessive ne peut être corrigé par la création d'un délit, mais relève de la mobilisation positive sur Internet en faveur des droits, ou de la lutte contre la position dominante de moteurs de recherche et la façon dont ils en abusent. La création d'un délit pour mise à disposition de contenus, fussent-ils douteux, écoeurants ou opposés à la liberté de choix des personnes, porte indiscutablement atteinte à la liberté d'expression. Or, cette dernière n'est pas faite uniquement pour ceux avec qui nous sommes d'accord.
Devant cette proposition de loi qui part d'une intention louable (faire respecter le droit à l'IVG et l'information qui y est liée) mais qui cherche à masquer le manque d'implication du gouvernement et des pouvoirs publics dans la protection des droits des femmes, La Quadrature du Net ne peut que marquer son opposition à l'argumentation juridique employée qui porte atteinte à d'autres droits fondamentaux que sont la liberté d'expression et d'opinion. Il serait souhaitable que les pouvoirs public renforcent leur soutien et leur implication dans les structures travaillant avec et pour les personnes ayant recours à l'IVG, afin de combattre les atteintes portées aux droits des femmes et des autres minorités. Ce serait probablement plus utile que de créer un nouveau délit porteur dans son fondement de problèmes juridiques et d'atteinte aux droits très lourds, d'autant qu'il existe un arsenal législatif (abus de position de faiblesse ou de situation d'ignorance, article 223-15-2 du code pénal … ) largement suffisant mais malheureusement sous-utilisé."