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Tribune libre

«Idéologie» et doctrine de l’Église : des sens de termes et expressions à éclaircir urgemment

«Idéologie» et doctrine de l’Église : des sens de termes et expressions à éclaircir urgemment

Cet article est une tribune libre, non rédigée par la rédaction du Salon beige. Si vous souhaitez, vous aussi, publier une tribune libre, vous pouvez le faire en cliquant sur « Proposer un article » en haut de la page.

Depuis le début de l’actuel pontificat, on voit apparaître le terme «idéologie» pour désigner une certaine façon de présenter la doctrine de l’Église. Ce terme est beaucoup utilisé et il n’y a pas eu vraiment de discussion sur le sens de ce terme et sur la pertinence de son utilisation. Le but de cet article est proposer une réflexion sur ce sujet.

L’une des premières apparitions de ce terme avec le sens d’une certaine manière de présenter la doctrine de l’Église eut lieu lors d’une interview au Pape François en 2013 (https://www.vatican.va/content/francesco/fr/speeches/2013/september/documents/papa-francesco_20130921_intervista-spadaro.html):

«Si le chrétien est légaliste ou cherche la restauration, s’il veut que tout soit clair et sûr, alors il ne trouvera rien. La tradition et la mémoire du passé doivent nous aider à avoir le courage d’ouvrir de nouveaux espaces à Dieu. Celui qui aujourd’hui ne cherche que des solutions disciplinaires, qui tend de manière exagérée à la “sûreté” doctrinale, qui cherche obstinément à récupérer le passé perdu, celui-là a une vision statique et non évolutive. De cette manière, la foi devient une idéologie parmi d’autres. Pour ma part, j’ai une certitude dogmatique : Dieu est dans la vie de chaque personne. Dieu est dans la vie de chacun. Même si la vie d’une personne a été un désastre, détruite par les vices, la drogue ou autre chose, Dieu est dans sa vie. On peut et on doit Le chercher dans toute vie humaine. Même si la vie d’une personne est un terrain plein d’épines et de mauvaises herbes, c’est toujours un espace dans lequel la bonne graine peut pousser. Il faut se fier à Dieu »

Dans ce passage, on voit qu’une certaine présentation de la doctrine pourrait conduire la foi à devenir une «idéologie parmi d’autres». Ce serait le cas, en effet, si l’on cherchait de manière exagérée une «sûreté» doctrinale.

Mais qu’est-ce qu’une idéologie ? Selon Le Petit Robert 1, (1990) :

«Idéologie 1° hist. philo. «Science qui a pour objet l’étude des idées, de leurs lois, de leur origine» (LALANDE). 2° péj. Analyses, discussions sur des idées creuses ; philosophie vague et nébuleuse. 3° (FIN XIXe ; vocab. Marxiste). Ensemble des idées, des croyances et des doctrines propres à une époque, à une société ou à une classe. «C’est bien bourgeois que sont par exemple, la messe du dimanche, la xénophobie, le bifteck-frites et le comique de cocuage, bref ce qu’on appelle une idéologie» (BARTHES). Système d’idées, philosophie du monde et de la vie. «La révolution du XXe siècle… est d’abord une politique et une idéologie» (CAMUS).»

Le passage de l’interview semble faire référence aux sens 2 et 3. Mais la foi, la présentation de la doctrine, peuvent-elles vraiment devenir «une idéologie parmi d’autres» ?

Il est important de rappeler ce que disait Saint Jean Paul II sur le Catéchisme de l’Église Catholique dans la Constitution Apostolique Fidei Depositum (https://www.vatican.va/content/john-paul-ii/fr/apost_constitutions/documents/hf_jp-ii_apc_19921011_fidei-depositum.html):

«Le Catéchisme de l’Église catholique, que j’ai approuvé le 25 juin dernier et dont aujourd’hui j’ordonne la promulgation en vertu de l’autorité apostolique, est un exposé de la foi de l’Église et de la doctrine catholique, attestées ou éclairées par l’Écriture sainte, la Tradition apostolique et le Magistère ecclésiastique. Je le reconnais comme un instrument valable et autorisé au service de la communion ecclésiale et comme une norme sûre pour l’enseignement de la foi. Puisse-t-il servir au renouveau auquel l’Esprit Saint appelle sans cesse l’Église de Dieu, Corps du Christ, en pèlerinage
vers la lumière sans ombre du Royaume ! «

La doctrine et la foi sont attestées ou éclairées par l’Écriture sainte, la Tradition apostolique et le Magistère ecclésiastique. Comme cela est lié à la Parole de Dieu, cela ne peut pas être une «idéologie» au sens d’un ensemble d’idées humaines, au sens 2 et 3 du Petit Robert 1.

En fait la doctrine de la foi prend racine notamment dans la Parole de Dieu et cette Parole a été donnée dès la création de l’homme comme on le voit dans la Genèse. Puis dans le livre de l’Exode, chapitre XX, on a la Parole de Dieu sous la forme des Dix Commandements. Ce sont des commandements de Dieu, pas de simples «idées humaines». Et il faut écouter ces commandements et il faut les enseigner à ceux qui ne les connaissent pas. Et Jésus-Christ avait dit «Car je vous le dis, en vérité : avant que ne passent le ciel et la terre, pas un i, pas un point sur l’i, ne passera de la Loi, que tout ne soit réalisé. « (Matthieu 5, 18, Bible de Jérusalem). Et à la fin de la Bible, dans le livre de l’Apocalypse, chapitre 22, on lit «Heureux ceux qui lavent leurs robes ; ils pourront disposer de l’arbre de Vie, et pénétrer dans la Cité, par les portes. Dehors les chiens, les sorciers, les impurs, les assassins, les idolâtres et tous ceux qui se plaisent à faire le mal ! ” (Bible de Jérusalem), ce qui est un rappel de la Loi. Bien sûr, avec l’aide du Christ nous pouvons mieux suivre la Loi. Dieu nous soutient par la grâce. Et comme l’enseigne Saint Thomas d’Aquin dans sa «Somme Théologique», il faut faire le bien par amour pour Dieu et pour les hommes et pas à cause d’une simple obéissance à la Loi. Mais cela ne nous exempte pas d’enseigner la doctrine, comme le rappelle toujours le Magistère (https://www.vatican.va/archive/hist_councils/ii_vatican_council/documents/vat-ii_decree_19651118_apostolicam-actuositatem_fr.html ).

On peut se demander aussi d’où vient cette manière de présenter la doctrine qui pourrait devenir «une idéologie». Cela a des liens avec les enseignements de Karl Rahner pour qui Dieu est de toute façon dans chaque personne, de sorte qu’il n’est pas très important de lui donner des doctrines externes (https://lesalonbeige.fr/le-synode-des-eveques-et-linfluence-de-karl-rahner/). Et c’est pour cela que justement dans le passage de l’interview citée plus haut, on lit que «Dieu est dans la vie de chacun».

Bien sûr, il est vrai que Dieu est dans la vie de chacun, mais en même temps Dieu appelle chacun à suivre son enseignement et cet enseignement doit aussi être entendu et lu, dans la mesure du possible. Et les chrétiens doivent donc enseigner la doctrine.

Ce qui est intéressant, c’est que le Petit Robert 1 (1990), pour le sens 3 d’«idéologie», cite Roland Barthes, qui fut marxiste à une époque de sa vie. Et dans cette citation il va jusqu’à placer la messe dans un ensemble idéologique bourgeois… Le sens 3 vient justement du marxisme.

Or, on sait que le Pape François a été influencé par la «Théologie des Peuples» (https://lesalonbeige.fr/la-theologie-des-peuples/) à travers l’enseignement de Juan Carlos Scannone. Or, ce dernier a été vraiment influencé par le marxisme (https://www.infocatolica.com/?t=opinion&cod=35762). Et de plus, le point de départ de la «Théologie des Peuples» n’est pas la parole de éternelle de Dieu mais l’histoire, le vécu de l’homme (https://www.infocatolica.com/?t=opinion&cod=35762). Et cela correspond aussi a la dernière partie de la citation de l’interview de 2013 où il était dit que «Dieu est dans la vie de chacun» avec ce sens où il n’est pas très urgent de présenter la doctrine. Cela vient à la fois de l’enseignement de Rahner et de la «Théologie des Peuples» car les deux sont influencés par Hegel qui enseigne le devenir dans l’histoire sans avoir besoin d’une divinité extérieure car l’Esprit et le Monde se confondent (panthéisme).

Bien sûr, il y a une idéologie marxiste et cette idéologie influence une bonne partie des théologiens et religieux actuellement. Et nous arrivons à une situation étrange où des personnes influencées par ces idéologies marxistes, hégéliennes, etc., de manière directe ou indirecte, présentent la doctrine catholique, dans certaines circonstances, comme une «idéologie»…

Bref, il est clair que la doctrine et la foi catholique ne sont pas des idéologies et ne peuvent pas le devenir. Il est important de prendre conscience de cela en ces temps de crise au sein de l’Église.

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