Le Père Dominique-Marie de Saint-Laumer, supérieur de la Fraternité Saint-Vincent Ferrier, est interrogé dans La Nef du mois de juillet. Extrait :
"Dans l’ordre politique, toutes les digues limitant le pouvoir de l’homme tombent les unes après les autres, les lois transgressives se succédant sans que rien ne semble pouvoir les arrêter : comment analysez-vous la situation, les causes de cette évolution mortifère et voyez-vous les germes d’un redressement possible ?
« La Russie répandra ses erreurs dans le monde entier », a dit Notre Dame à Fatima. C’est ce qui est arrivé. Les erreurs du marxisme, du matérialisme athée, les ultimes conséquences de la philosophie des Lumières et de la Révolution française ont envahi le monde et produisent leurs fruits de mort. Les élites qui ont le pouvoir médiatique, culturel, politique, économique, sont contaminées par ces idéologies qui veulent s’affranchir de l’anthropologie traditionnelle, jugée rétrograde, pour reconstruire une nouvelle humanité, ou un transhumanisme. Mais, devant les conséquences de plus en plus folles de ces théories (qu’on pense au gender !), de nombreux esprits prennent conscience du danger, et travaillent à restaurer une culture basée sur une saine anthropologie. Pour redresser la société, il faut retrouver une philosophie réaliste, qui comprenne ce que sont vraiment la nature humaine et l’ordre social permettant aux hommes de vivre harmonieusement. Si l’on tient compte de la nature blessée de l’homme, du fait du péché originel, il n’y aura pas de redressement vraiment solide sans la Rédemption, c’est-à-dire la foi au Christ qui apporte sa lumière et sa grâce. Il est urgent que la France retrouve la fidélité à ses racines chrétiennes. En 2017, ce sera le centenaire des apparitions de Fatima. Le pape ne pourrait-il pas consacrer à nouveau, plus explicitement, la Russie au Cœur immaculé de Marie et approuver la dévotion réparatrice des premiers samedis du mois ?
Une autre caractéristique de notre société est la course effrénée au profit et à l’argent, course qui ne bénéficie qu’à un petit nombre alors qu’une grande majorité voit ses revenus stagner, voire régresser – c’est un souci que le pape François évoque souvent. Le religieux d’un Ordre mendiant est-il plus particulièrement sensible à cette situation et y voyez-vous des remèdes ?
L’absence d’une vision saine de la nature humaine et de ses finalités, le relativisme régnant, engendre un matérialisme pratique, où les seules valeurs sont le pouvoir, la force, l’argent. L’économie n’est plus subordonnée à une finalité plus haute, politique et morale, au bien commun, au respect des hommes. Le remède est dans la meilleure connaissance et l’application de la doctrine sociale de l’Église. Benoît XVI et François ont donné des pistes intéressantes dans Caritas in veritate, et Laudato si. Le bien commun doit redevenir la finalité ultime et le respect des hommes primer sur le profit. Le principe de subsidiarité doit être appliqué. Les religieux qui vivent en communauté ont l’exemple d’une vie commune à taille humaine, où les besoins de chacun sont pris en compte. La famille est aussi une des dernières défenses de l’être humain contre un mondialisme qui broie les individus."