Pierre-Olivier Arduin décrypte l'avis 112 du CCNE. Extrait :
"le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) dessine un statut infra-humain de l’embryon in vitro. Le risque, délibéré ou non, est d’en faire un simple matériau pour la recherche. À l’origine de vingt avis publiés en un peu plus d’un quart de siècle, cette instance a développé […] un véritable magistère laïque sur la question de l’embryon «où l’élaboration des règles et leur mise en œuvre impliquent des compromis que le principe éthique du moindre mal peut rendre tolérables» (p. 11 et p. 49). Cette logique du moindre mal […] aboutit dans le dernier texte qu’il vient de rendre public à la formulation de recommandations éthiques extrêmement précises. […] Il s’agit :
d’autoriser les recherches sur les embryons humains in vitro et les cellules qui en sont issues en supprimant l’interdit légal actuellement en vigueur, d’autoriser à titre dérogatoire la création d’embryons à visée de recherche pour améliorer les techniques d’assistance médicale à la procréation.De fait, le CCNE a donc décidé d’en finir une bonne fois pour toutes avec ce qui restait de dispositions protectrices à l’égard de l’embryon humain in vitro dans notre système juridique et législatif. Pour défendre sa position, le Comité avance quatre arguments principaux […] :
décréter notre incapacité rationnelle à octroyer un statut éthique protecteur à l’embryon, substituer au concept de dignité celui de projet parental, présenter la destruction des embryons surnuméraires congelés issus des FIV comme une transgression plus grave que la recherche sur l’embryon elle-même pour retirer à cette dernière tout caractère problématique, ignorer délibérément les avancées scientifiques en matière de cellules souches adultes et reprogrammées afin de s’affranchir de l’obligation légale de mener des recherches sur l’embryon uniquement «en l’absence d’alternative d’efficacité comparable en l’état des connaissances scientifiques».[…] Pour le CCNE, il est vain de tenter d’identifier la nature de l’embryon car celui-ci est «une énigme» (p. 10, 11, 14, 32, 49). […] Au lieu de faire l’effort de rechercher objectivement ce qu’est en soi l’embryon, le CCNE fait reposer son raisonnement sur le postulat suivant, lequel n’est à aucun moment questionné : il est impossible de fonder rationnellement la valeur de l’embryon humain et le respect qui lui est dû. S’érigeant en tribunal par défaut, le CCNE choisit in fine de débouter l’embryon en le congédiant de l’humanité. […]
Pourtant, une parole réfléchie et cohérente sur l’embryon permet de discerner une présence personnelle digne de respect. Les plus récentes acquisitions de la biologie montrent sans le moindre doute que l’embryon est le point de l’espace et du temps où un nouvel être humain débute son propre cycle vital, construisant sa propre forme, moment après moment, de manière autonome et sans aucune discontinuité. […] Le CCNE n’a pas jugé nécessaire d’examiner les aspects biologiques du développement embryonnaire précoce qui lui aurait permis de tirer des conclusions éthiques accessibles au simple bon sens : par le fait qu’il existe, chaque être humain dans sa phase embryonnaire doit être pleinement respecté. […]
Le second argument sur lequel s’appuie le CCNE pour disposer sans entrave de l’embryon humain comme une simple matière vivante est la notion de projet parental. Pour ses membres, la dimension symbolique de ce nouveau concept s’est désormais substituée au lien corporel qui unissait jadis l’embryon avec sa mère. […] Le CCNE en déduit qu’il ne peut être porté atteinte à l’intégrité de l’embryon aussi longtemps que perdure le projet parental qui a été à son origine. Lorsque le désir des parents s’éteint, l’embryon quitte notre humanité pour basculer dans le monde des choses appropriables. […] Cette option anthropologique dévastatrice est celle qui a été également retenue par le rapport final des états généraux de la bioéthique. Du pain béni pour le CCNE qui le cite à son appui. Les jurys citoyens ont en effet considéré que l’embryon tirait son statut de l’existence ou non d’un tel projet. […] Pour le CCNE, la pirouette intellectuelle ne laisse aucun doute. Il s’agit de désigner arbitrairement deux catégories d’embryons humains, ceux qui seraient objets ou non d’un projet parental, de manière à créer des catégories éthiques et juridiques artificielles correspondantes. Dès lors, celle des embryons humains sans projet parental n’auraient plus aucun droit à la vie et les chercheurs pourraient légitimement revendiquer d’en disposer sans contraintes."
Marie
Quel boulot ! Bravo Mr Arduin ; il reste à faire savoir cela, tourner l’information, s’organiser, etc. etc.
Jacques Bailly
Un sommet d’orgueil, le seul péché de Satan, que cette phrase :
“D’autoriser à titre dérogatoire la création d’embryons à visée de recherche pour améliorer les techniques d’assistance médicale à la procréation.”
L’orgueil a donc bouffi l’homme au point qu’il se substitue au Créateur.
Qu’ils se méfient ces scientifiques insensés, car s’ils sont tous fils (prodigues) de Dieu, l’embryon est aussi fils de Dieu.
Un jour ces embryons “créés” ou assassinés par la main des orgueilleux et des insensés viendront et diront : Voici notre Père Tout-Puissant qui vient nous venger !
On ne se moque pas de Dieu impunément car LUI SEUL EST Tout-Puissant!
Jacques Bailly
Cassianus
La bataille se situe donc dans la définition de l’humain. Si le problème ne se posait pas au sujet de l’embryon, il se poserait de toute manière au sujet des possibles hybrides et des possibles créatures intelligentes extra-terrestres. L’ascendance humaine (= la formule génétique) ne peut pas être une solution solide, philosophiquement, puisqu’il est communément accepté que l’être humain apparaît quelque part dans une évolution animale continue, où, bien évidemment, le “premier” humain serait forcément engendré par un être vivant non-humain. Il semble bien qu’à l’intérieur d’une pensée exclusivement scientifique (je veux dire : sans référence à une révélation religieuse) le concept d’humain soit transformable ad libitum. Scientifiquement parlant, un être humain, c’est un être que la LOI déclare humain, et voilà tout. La Science peut toujours être humaniste sans respecter ce que les chrétiens considèrent comme humain. Il lui suffit pour cela de respecter ce que la LOI définit comme humain. Et si la Science se base sur la loi, et que la loi ne se base pas sur la religion (comme il est logique dans une société laïque), la loi, pour définir ce qui est humain, n’a absolument plus aucune autre référence que le bon plaisir populaire (comme il est logique en démocratie). Comment ne pas comprendre encore que la démocratie et la laïcité conduisent inévitablement à la plus infecte démagogie et à la ruine de toute valeur morale ?
[Votre argumentation est quasiment une insulte à l’intelligence humaine : la biologie nous montre que l’embryon est aussi humain que le vieillard.
“Dès que l’ovule est fécondé se trouve inaugurée une vie qui n’est ni celle du père, ni celle de la mère, mais d’un nouvel être humain qui se développe par lui-même. Il ne sera jamais rendu humain s’il ne l’est pas dès lors. A cette évidence de toujours la science génétique moderne apporte de précieuses confirmations. Elle a montré que, dès le premier instant, se trouve fixé le programme de ce que sera ce vivant : un homme, cet homme individuel avec ses notes caractéristiques bien déterminées […]. La réalité de l’être humain, tout au long de son existence, avant et après sa naissance, ne permet d’affirmer ni un changement de nature, ni une gradation de la valeur morale […]. L’embryon humain a donc, dès le commencement, la dignité propre de la personne ».”
La science doit se baser donc sur l’observation des faits.
Il n’y a pas besoin de la religion pour montrer que l’embryon est un être humain, même si l’Eglise a toujours considéré l’embryon comme un être humain dès le premier moment de sa conception, comme le montre aujourd’hui la fête de l’Immaculée Conception, ou le 25 mars, celle de l’Annonciation, 9 mois avant la naissance de NSJC.
MJ]
Cassianus
@ MJ
Excusez-moi, mais votre argumentation à vous se se fonde que sur une déclaration de l’Eglise catholique. L’insulte à l’intelligence humaine, c’est de prétendre que des non-catholiques doivent considérer comme vrai ce qui ne peut faire autorité que pour des gens qui croient à l’autorité de l’Eglise. Il faut faire l’effort de se mettre dans la situation intellectuelle des incroyants si l’on veut trouver des raisons capables de persuader des incroyants.
[Faux : mon argumentation se fonde sur la réalité naturelle, qu’elle soit déclarée par des ecclésiastiques ou des scientifiques ne change rien à l’affaire. Dire que dès la fécondation de l’ovule se trouve inaugurée une vie qui n’est ni celle du père, ni celle de la mère, mais d’un nouvel être humain qui se développe par lui-même, n’a rien de “religieux”.
Mais, comme l’écrivait Chesterton : enlevez le surnaturel, il ne reste même pas le naturel. Ces pseudos-scientifiques, en refusant tout ce qui vient de l’Eglise, en viennent à nier la réalité scientifique.
MJ]
renaud
Le libéralisme, la société libérale dans toute son horreur et son impasse …
Lire à ce sujet, et à beaucoup d’autres, “L’empire du moindre mal”, de M. Michéa, une critique très juste du libéralisme.
Cassianus
Ce qui fait qu’un homme n’est pas un animal, du point de vue catholique, c’est le fait que dans son corps, qui n’est et ne peut être qu’animal, se trouve une âme immortelle. Mais comme l’âme est une réalité spirituelle invisible, il est inconcevable que des scientifiques, dont la méthode est d’observer ce qui est observable, puisse en confirmer ou nier la présence, que ce soit dès la conception ou après. Il en résulte que les scientifiques n’ont absolument aucun critère pour juger ce qui est humain, selon la définition catholique de l’humain.
[Aristote, qui n’était pas un chrétien…, avait montré par la philosophie l’existence de cette âme : en bref, elle est ce qui fait que nous sommes toujours la même personne malgré tous nos changements physiologiques, de notre conception à la mort. Elle subsiste ainsi au corps. La religion catholique “ne fait qu’ajouter” la foi en la résurrection des corps.
Mais le problème n’est même pas là : il est de savoir s’il y a une différence de nature entre un embryon et un foetus, entre un foetus de 12 semaines (avortable) et un foetus de 13 semaines (légalement protégé) et s’il y a une différence entre ces êtres non-nés et les êtres nés (sachant qu’on réussit à sauver des grands prématurés).
S’il y a une différence, qu’on me dise laquelle. Sinon, c’est que l’on peut tuer l’handicapé âgé de 5, 10 ou 30 ans, comme on tue l’embryon susceptible de présenter un défaut chromosomique, on peut aussi tuer des personnes en bonne santé pour en soigner d’autres, comme on tente de le faire (sans succès : cela aussi c’est une réalité scientifique) avec les embryons.
MJ]
JCM
@ Cassianus et MJ, pour éclairer la discussion :
Maître Jean Paillot a répondu très clairement à vos interrogations en expliquant que, contrairement à ce qui est trop souvent répété, la loi française actuelle défini déja l’embryon humain comme un “être humain” à part entière, et cela depuis la loi du 17 janvier 1975 dépénalisant l’avortement. Et oui, c’est bien en autorisant l’avortement qu’il a fallu définir l’embryon !
” Cet article 1er est ainsi rédigé : « La loi garantit le respect de tout être humain dès le commencement de la vie. Il ne saurait être porté atteinte à ce principe qu’en cas de nécessité et selon les conditions définies par la présente loi. » On constatera au passage qu’il n’est pas ici question de « personne juridique », laquelle ne commence qu’avec la naissance, mais d’« être humain ». Ainsi, en droit français, l’IVG-IMG est le droit reconnu à une femme de mettre fin à une vie humaine, celle de l’enfant qu’elle porte….
L’article 16 [de la première loi de bioéthique du 27/7/1994] dispose ainsi : « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie. »
Comme chacun peut le constater, cet article 16 rappelle le principe posé à l’article 1er de la loi de 1975, à savoir que le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie est garanti par la loi française. Or ce rappel, dans cet article 16, permet de conclure que le principe issu de l’article 1er de la loi de 1975 (soit le respect de tout être humain dès le commencement de sa vie) n’est qu’une conséquence du principe de dignité de l’être humain.
La conséquence est claire : l’IVG-IMG est une exception au principe de dignité. Pour le dire crûment, c’est la possibilité d’agir de façon indigne (c’est-à-dire de façon contraire à ce que le principe de dignité justifierait) à l’égard d’un être humain.”
http://www.libertepolitique.com/respect-de-la-vie/6411-jean-paillot-l-la-clause-de-conscience-en-droit-medical-releve-du-principe-de-dignite-r
C.B.
A l’attention de Cassianus
“Il lui suffit pour cela de respecter ce que la LOI définit comme humain.”
Et vous auriez fait quoi confronté à une LOI décrétant qu’un juif est un “untermensch” (un “sous-homme”, donc pas un homme?) Une telle loi est-elle respectable?
Qu’au moins on rappelle que la loi qui autorise l’avortement est une loi qui accorde à une femme le droit de disposer de la vie d’autrui [qu’elle dispose de SON corps, comme elle le revendique, rien de plus normal; mais là, ce n’est de SON CORPS qu’elle dispose, mais du corps d’un autre], la possibilité d’agir de façon indigne (c’est-à-dire de façon contraire à ce que le principe de dignité justifierait) à l’égard d’un être humain.
Comme une loi plus ancienne accordait au bourreau le droit d’ôter la vie à un être humain, en toute légalité.