Communiqué de Mgr Aupetit, évêque de Nanterre :
"L’affaire Vincent Lambert illustre l’immense difficulté de notre époque à définir la dignité humaine. Le cas douloureux de cet homme divise sa famille, les médecins et les juges requis pour statuer sur ce qu’il convient de faire.
Je rappelle les faits : en 2008, Vincent Lambert est victime d’un accident de la route. En 2013, un protocole de fin de vie par arrêt de l’alimentation est engagé en accord avec son épouse. Les parents informés saisissent les juges pour s’opposer à cette forme d’euthanasie. Après 31 jours d’arrêt de l’alimentation, la justice demande qu’elle soit rétablie. Il y aura une suite d’avis contraires jusqu’à celui du Conseil d’état, en juin 2014, qui juge légale la décision d’arrêt de l’alimentation et de l’hydratation considérées comme un traitement. La Cour Européenne des Droits de l’Homme vient de statuer en donnant raison au Conseil d’état français.
Cela pose plusieurs questions :
Ce jugement aura-t-il une conséquence pour les très nombreux patients qui sont dans un état comparable et pour lequel la famille demande la poursuite des soins ? Au minimum on peut craindre une forme d’exemplarité qui peut s’imposer moralement aux équipes soignantes.L’autre question concerne la qualification comme soin ou comme traitement de l’alimentation et de l’hydratation artificielles. S’il s’agit d’un traitement, on peut parler d’acharnement thérapeutique. S’il s’agit de soins, ils sont dus à tout être humain.
Il existe plusieurs formes d’alimentation artificielle dont les implications sont différentes. L’alimentation dite parentérale, c’est-à-dire par voie veineuse, qui est très contraignante et l’alimentation entérale qui utilise les voies digestives. C’est cette dernière qui est utilisée pour nourrir Vincent Lambert.L’ultime difficulté est de savoir maintenant qui va exécuter la sentence ? En effet, le médecin qui était à l’origine de la démarche d’arrêt de vie n’est plus dans le service où est hospitalisé Vincent Lambert. En outre, il semble que ce dernier puisse être transféré dans une unité de vie spécialisée où il serait attendu depuis deux ans. C’est dire que l’affaire n’est pas terminée.
Ce cas médical nous oblige à réfléchir sur la dignité de chaque vie humaine. La valeur d’une vie tient-elle à son utilité ou à son humanité ? Les juges de la Cour Européenne des Droits de l’Homme se sont déchirés sur la différence entre une personne humaine et une vie biologique.
Nous chrétiens, nous savons que Dieu lui-même confère à tous une dignité insurpassable : celle de devenir ses enfants."