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Culture de mort : Euthanasie

L’encadrement de « l’aide à mourir » est illusoire

L’encadrement de « l’aide à mourir » est illusoire

L’Assemblée nationale débattra dans l’hémicycle à partir du 27 mai du projet de loi sur la fin de vie, à partir d’un texte profondément remanié par les 70 députés de la commission parlementaire spéciale, qui ouvre considérablement le champ de la loi, en faisant sauter plusieurs critères qui en bornaient l’application. La présidente de la commission, l’ex-ministre de la Santé Agnès Firmin-Le Bodo, a fait part publiquement de ses désaccords. 3412 amendements ont été déposés.

Après débat et vote à l’Assemblée, le texte sera examiné par le Sénat. Le sénateur LR de Vendée, Bruno Retailleau, est interrogé dans Le Point :

Comment réagissez-vous au texte sorti de la commission spéciale de l’Assemblée nationale ?

Tous les cadres ont sauté. Je ne suis pas surpris. J’ai toujours dit que l’encadrement de « l’aide à mourir » était illusoire. En cinq jours, cette commission spéciale a accompli une trajectoire que la Belgique avait mis vingt-deux ans à effectuer, et le Canada huit ans. C’est la démonstration de ce que je dénonce, avec d’autres, depuis le début : à partir du moment où l’on épouse la logique du droit à mourir, les engrenages s’enclenchent et la machine des « droits à » s’emballe pour aller toujours plus loin, franchir toujours plus de limites. C’est ce qui s’est passé.

Le texte va être soumis à un débat parlementaire en hémicycle. Ce n’est pas donc pas celui-ci qui sortira tel quel de l’Assemblée…

Je n’en sais rien. Ce que je sais, en revanche, c’est que, depuis le départ, Emmanuel Macron a fixé une trajectoire en masquant ses intentions. On a biaisé le débat, en tordant les mots, au point de ne pas parler d’euthanasie et de suicide assisté alors que c’est bien cela dont il s’agit. C’est d’une hypocrisie absolue : cachez ces mots que je ne saurais voir ! Quant à la « fraternité » évoquée par Emmanuel Macron, nous sommes dans l’exact inverse. Être fraternel, ce n’est pas donner la mort, mais donner la main, c’est adopter une éthique de la vulnérabilité pour aider les plus fragiles jusqu’au bout, pas les abandonner, seuls, devant une alternative radicale. Un tel texte, s’il est adopté, conduira les plus vulnérables à se poser cette question insupportable : suis-je un fardeau pour mon entourage, pour la société ? Ce serait l’expression d’un individualisme poussé à son extrême limite, où les liens ultimes sont abolis.

Le texte initial prévoyait des verrous pour cantonner le champ d’application du texte. Beaucoup ont sauté en commission spéciale, mais il sera toujours possible de les rétablir…

Il faut évidemment mener le combat. Et je veux saluer nos courageux députés qui, dans cette commission, n’ont rien lâché. Mais les « verrous » dont vous parlez n’en étaient pas, en réalité. Car le but de ce texte n’est pas tant d’abréger les souffrances, ce qui était déjà l’objet de la loi Claeys-Leonetti, mais d’aller un cran plus loin dans la logique progressiste de la revendication prométhéenne d’émancipation. Dans cette perspective, tout garde-fou est perçu comme une restriction, un obstacle à la liberté personnelle qu’il convient d’éliminer. Le seul intérêt que je perçois dans cette commission est qu’elle nous a permis de voir en accéléré ce qui pourrait se passer si un tel texte était adopté, à savoir un enclenchement mécanique inexorable. C’est ce qui s’est passé en Belgique, aux Pays-Bas, au Canada. Au départ, on parle de maladie en phase terminale ; à l’arrivée, on passe à des maladies incurables. Au départ, on cantonne aux adultes ; à l’arrivée, on intègre les enfants. Au départ, seuls les malades disposant de leurs capacités de discernement sont concernés ; à l’arrivée, le droit est ouvert aux handicapés. Dans tous les pays qui ont autorisé simultanément le suicide assisté et l’euthanasie, le second finit par prendre le pas sur le premier. Quant à intégrer dans un même texte les soins palliatifs et l’euthanasie, la pente descendra naturellement vers cette dernière, tellement plus simple, tellement moins chère également. Il existe un « Quality of Death Index » qui mesure la qualité du bien mourir dans chaque pays, et qui montre qu’on meure toujours moins bien dans les pays qui autorisent l’euthanasie. Dans ce classement, la Belgique a été rétrogradée entre 2015 et 2021 de 21 places, et le Canada de 11 places.

La Cour des comptes a souligné que 400 personnes par jour meurent sans soulagement nécessaire en France, que 22 départements ne disposent pas d’unités de soins palliatifs. C’est un vrai scandale.

Même si l’enveloppe allouée est très en deçà des besoins, selon les praticiens, le texte prévoit de développer les soins palliatifs…

Mais il n’y a pas besoin d’une loi pour cela ! Tout est déjà prévu par un texte de 1999. Ce qui manque, surtout, ce sont les moyens. De nouveaux moyens, pas une nouvelle loi : c’est ce que demande une majorité de soignants dans les services concernés. Pourquoi ne sont-ils pas écoutés ? La Cour des comptes a souligné que 400 personnes par jour meurent sans soulagement nécessaire en France, que 22 départements ne disposent pas d’unités de soins palliatifs. C’est un vrai scandale. Alors même que la plus grande crainte des Français, qui motive leur position sur la fin de vie, c’est la souffrance. Tous les spécialistes le disent : quand la souffrance physique et psychologique est apaisée, la demande de mort recule toujours. Le volet sur les soins palliatifs dans ce projet est donc un alibi pour faire passer la pilule. On se donne bonne conscience. Emmanuel Macron est le président qui aura été le plus loin sur le plan sociétal, en promouvant la constitutionnalisation de l’IVG, la PMA pour toutes, et maintenant l’euthanasie. Les dirigeants qui échouent à améliorer le quotidien des Français se réfugient toujours dans le sociétal.

Dans les détails, que reprochez-vous au texte qui sera présenté dans l’hémicycle ?

Ce qui s’est passé dans cette commission spéciale de l’Assemblée nationale est très grave. Dans le texte initial, l’euthanasie n’était autorisée qu’en cas d’impossibilité physique de se donner soi-même la mort. Ce critère a sauté. Désormais, donc, l’euthanasie est une option parmi d’autres, au même niveau que le suicide assisté. Pis, l’euthanasie devient un soin, car elle entre dans le Code de la santé publique. On fait disparaître aussi la notion de « pronostic vital engagé » ; après la commission spéciale, on passe à la notion de phase terminale avancée. Résultat, comme je le soulignais précédemment, on élargit considérablement le périmètre des maladies éligibles, en l’étendant aux maladies dégénératives, aux cancers métastasés. Et les députés veulent créer un délit d’entrave à l’aide à mourir puni de 15 000 euros d’amende. Un anesthésiste qui, demain, réanime quelqu’un qui a souhaité mettre fin à ses jours pourra-t-il être accusé de délit d’entrave ? Tout comme les bénévoles d’associations qui accompagnent des personnes en fin de vie ? Nous sommes dans une rupture anthropologique. Le Conseil d’État avait ainsi mis en garde le gouvernement début avril en disant que ce projet de loi introduisait une double rupture. D’une part, parce qu’il inscrit la fin de vie dans un horizon qui n’est plus celui de la mort imminente. D’autre part, parce qu’il autorise pour la première fois un acte dont l’intention est de donner la mort. Si ce texte est adopté, il sera plus facile de demander la mort que d’accéder à des soins pour être accompagné et soulagé. C’est une conception de la médecine qui aura des répercussions très graves sur l’idée que nous nous faisons de la dignité humaine et, pour le coup, de la fraternité que nous devons aux plus fragiles d’entre nous.

La majorité sénatoriale que vous conduisez fera-t-elle rempart contre le texte ?

Conformément à sa tradition, le Sénat n’examinera pas ce texte sous un biais idéologique, mais en rappelant que derrière la satisfaction de revendications individuelles, nous sommes face à un nouveau projet de société. Chacun a bien évidemment son intime conviction, et je pense pour ma part justement que, dans ces domaines si délicats et si fondamentaux, la loi doit avoir la sagesse de ne pas vouloir prétendre régenter tout ce qui relève de l’intime. La frontière entre la vie est la mort est une zone grise, une zone mystérieuse et parfois difficilement discernable, qu’il faut savoir préserver.

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4 commentaires

  1. Ce projet a été conçu dans les loges comme tout ce qui est sociétal et aucun argument moral, humaniste ou de bon sens n’aura prise sur ceux à la Chambre qui veulent remplacer la société de Dieu par celle de Satan, ils sont majoritaires. Le rouleau compresseur avance doucement en broyant tous ceux qui veulent s’y opposer. Seul le recours à la prière nous permettra d’obtenir des résultats.

  2. Les verrous sont entrain de sauter les uns après les autres. Nous sommes en route, et à marche forcée, vers le destin que nous avons collectivement choisi, en tant que société qui s’est détournée du Dieu trinitaire.

    L’autodestruction manifeste des Hommes (latu sensu), est proportionnelle au degré de leur “libération”, de leur “émancipation”, de leur “autodétermination” philosophique (l’autodétermination psychologique est bonne et louable, c’est notre libre arbitre, exercé dans les limites imparties par notre NSJC, révélées par le biais de l’Eglise et la Tradition orale et écrite, transmise fidèlement et inlassablement par et dans l’Eglise jusqu’à ce jour).

    Comme toujours, le vocabulaire est piégé par la corruption orwellienne du champ sémantique : la rébellion, la désobéissance, la transgression, les iniquités, le rejet et l’éloignement de Dieu et des lois divines, sont déguisés en autant de “victoires” qui doivent mener au “triomphe” final de l’Homme “nouveau”. Cet Homme nouveau, à la recherche de toujours davantage d’autonomie philosophique, veut prendre la place de son Créateur. Cet Homme aspire à commettre le même crime sacrilège que celui qui, déguisé sous l’aspect d’un serpent, n’a cessé de l’inspirer depuis la révolte originelle au jardin d’Eden : surtout faire le contraire de ce que Dieu nous demande de faire, et ne nous fier qu’aux désirs de notre nature humaine déchue, corrompue. Son désir éperdu de fausse liberté, de fausse autonomie, et l’amour du mensonge et le rejet de Dieu qui en résultent, ont inévitablement conduit l’Homme indépendant à l’aliénation à Dieu.

    Où cela va-t-il conduire l’Occident décadent, post- et antichrétien ?

    L’aliénation grandissante, repoussante et suicidaire que l’Homme occidental s’est imposée par sa révolte permanente et croissante à l’égard de NSJC et de Son Eglise, mènera ultimement à l’apparition de l’Antichrist, l’homme du péché (2 Thess. 2,3-4), personnification paroxysmique de l’Homme complètement “nouveau” et, surtout, détaché de tout lien avec son Créateur et totalement séduit par et sous l’emprise de l’archidémon.

    Au fur et à mesure que cet esprit d’iniquité se renforcera dans la société (cela se déroule maintenant, sous nos yeux), l’Eglise restée fidèle au dépôt de la Foi, sera de plus en plus visée et persécutée. Ainsi, la fin de l’épopée terrestre de l’Eglise, ressemblera à son début historique : exils, persécutions, spoliations, emprisonnements, tortures et exécutions, commis par les autorités séculières corrompues avec, paradoxalement, la complicité d’une “nouvelle” Eglise qui se sera complètement détournée de sa mission sacrée et permanente de proclamation de l’Evangile, admirablement résumé en Actes 4,12 : “Car il n’y a pas sous le ciel d’autre nom donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés.” Amen.

  3. Ce projet de loi va être voté par l’Assemblée nationale en séance de nuit à 02:00, comme toutes les lois criminelles qui contribuent à la destruction de notre malheureuse Patrie. Et le passage au Sénat sera une simple formalité : in fine, ce sera le texte approuvé par l’Assemblée nationale qui sera promulgué. Et, tant qu’on y est, on pourrait inscrire ce nouveau “droit” dans la Constitution. Ainsi, après le droit d’assassiner les enfants avant leur naissance, on aura le droit de se débarrasser des personnes âgées, handicapées ou déprimées, dès lors qu’elles représenteront une charge morale ou financière pour la famille ou la société.
    La CNAV et la CNAM vont ainsi réaliser des économies substantielles en fermant les EHPAD devenus inutiles, les établissements spécialisés, et vont combler les déficits de la Sécurité sociale.
    Nous allons bénéficier des recommandations formulées par Attali dès 1981, instituant une version moderne du programme Aktion T4 et une concrétisation de “Soleil vert”, prophétique 50 ans avant les faits.
    Et le Serment d’Hippocrate sera transformé en serment d’hypocrite.
    https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Aktion_T4

  4. Je recommande la lecture d’un livre édifiant sur la collusion des adeptes de la culture de mort.:
    “Les assassins sont si gentils”. Écrit et publié en 2006 par une infirmière, tout est minutieusement décortiqué sur la démarche des promoteurs de l’euthanasie.
    https://www.babelio.com/livres/Bourgois-Les-assassins-sont-si-gentils/243296

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