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France : Société

Lettre du père Danziec à Marguerite Stern : “en Israël même je n’ai pas trouvé une si grande foi “

Lettre du père Danziec à Marguerite Stern : “en Israël même je n’ai pas trouvé une si grande foi “

Suite aux excuses publiques de l’ex-Femen, le père Danziec lui adresse cette lettre dans Valeurs Actuelles :

Chère Marguerite,

Nous ne nous connaissons pas mais permettez-moi de vous appeler par votre prénom. N’y voyez ni procédé cavalier, ni volonté de jouer aux intimes. Simplement l’enchantement d’un pasteur d’appeler une brebis par son prénom de baptême. « Il appelle ses brebis par leur nom, et il les mène aux pâturages » (Jean 10, 3). J’ignore d’ailleurs laquelle des saintes Marguerite est votre patronne. La martyre sous Dioclétien ? Celle-là même qui est apparue à Jeanne d’Arc aux prémices de sa grande épopée nationale à Domrémy ! Ou bien sainte Marguerite-Marie, la religieuse visitandine de Paray-le-Monial à qui le Christ fit connaître les secrets de son cœur brûlant, notamment en lui adressant cette impressionnante sentence : « Voici ce cœur qui a tant aimé les hommes, et pour reconnaissance, je ne reçois de la plupart que des ingratitudes par leurs irrévérences et leurs sacrilèges… » ? Vous me direz, dans l’un et l’autre cas de ces patronages, vous vous trouvez en bonne compagnie ; et c’est, en effet, bien là l’essentiel.

Vous vous en douterez, chère Marguerite, ces quelques lignes, je vous les adresse en écho à votre récente sortie médiatique. Comme beaucoup de croyants, j’ai effectivement lu avec intérêt votre tribune « Pourquoi je m’excuse auprès des catholiques » publiée dans l’hebdomadaire Famille Chrétienne. Surtout, mieux encore, je vous ai écoutée, je vous ai regardée dire ce texte sur vos réseaux. Eh bien, chère Marguerite ! En un mot comme en cent, disons-le tout net, je vous ai trouvée poignante.

A vos excuses publiques, j’ose donc réagir par cette lettre ouverte. Avec l’audace de l’Evangile (Mt 10, 27), j’entreprends de publier sur les toits ce qui, à votre sujet, m’habite. Un mélange de reconnaissance et d’action de grâce. D’émerveillement aussi. Je ne doute pas que de nombreux catholiques, hier profondément blessés par votre coup d’éclat en tant que Femen dans la cathédrale Notre-Dame de Paris se soient sentis, tout comme je l’ai été, vivement émus par votre mea culpa sans fioritures. D’autant que, accordez-moi de le souligner, demander pardon sans battre sa coulpe sur la poitrine des autres, voilà chose bien singulière aujourd’hui pour ne pas être saluée.

Après vous avoir écoutée attentivement, comment ne pas voir un réconfortant signe du Ciel dans votre prise de parole. Voyez-vous, c’est également cela le miracle de Notre-Dame. En bonne mère, elle n’est pas rancunière. Vous l’avez outragée en 2013. Son incendie vous fait pleurer en 2019. Et, en 2024, à l’approche de sa réouverture, elle nous offre votre joli visage – bien qu’empreint d’une certaine gravité – auquel s’ajoute une voix claire et sans emphase, posée et réfléchie. En 3 minutes et 48 secondes, vous nous expliquez pourquoi vous avez changé, pourquoi vous voulez présenter vos excuses aux catholiques, ceux-là dont « c’est la mode actuellement de dénigrer, de faire passer pour des idiots vieille-France, insuffisamment branchés pour mériter le statut d’êtres humains ». Bien chère Marguerite, nous vivons dans un monde qui se moque tant des vérités du Christ, qui piétine si impunément l’enseignement constant de l’Eglise, que les petites étincelles d’espérance qui brillent dans l’obscurité n’en paraissent que plus incandescentes. Un peu de feu dans quelque coin du monde et tous les miracles de grandeur restent possibles.

Ma chère Marguerite, certains loueront votre courage, d’autres fustigeront votre retournement. Moi, je veux particulièrement rendre grâce pour votre cheminement intérieur, intime et secret, mystérieux. Celui d’une femme qui a certes l’appétit de l’action mais surtout soif de cohérences et de vérités. La Providence se plaît, dans l’histoire des hommes et les événements qui parcourent leurs vies, à confondre les orgueilleux et les superbes. Votre demande de pardon en témoigne. Que le nom de Dieu soit béni !

Je ne saurais vous le cacher, lorsque vous soulignez dans votre tribune que « bon nombre de nos rites reposent sur l’Eglise catholique et même les incroyants devraient se battre pour les préserver », j’ai souri. Christopher Lasch avait bien raison de constater que « Le déracinement coupe de tout, sauf du besoin de racines ». Mais surtout, je me suis plu à repenser au Seigneur Jésus parlant du Centurion de l’Evangile : « Je vous le dis, en vérité, en Israël même je n’ai pas trouvé une si grande foi » (Lc 7, 9). Ce païen, occupant le territoire des descendants du peuple élu, par sa simplicité d’âme et son humble respect, venait d’attester avec une tranquillité déconcertante la toute-puissance du Fils de Dieu. Dans votre tribune, vous nous dites : « Sans croire en Dieu, finalement, sur certains points, j’arrive aux mêmes conclusions que les catholiques. » Alors qu’au sein même de nos institutions publiques – et parfois même ecclésiales, vous l’aurez sans doute remarqué – des déconstructeurs sont à l’œuvre, vous venez prouver à ceux qui l’auraient oublié que les meilleurs apôtres du bon sens de la Foi ne viennent pas forcément des sentiers battus par les réformateurs progressistes et autres comités Théodule d’Etat ou d’Eglise… Oui, assurément, les incroyants devraient se battre pour préserver les rites et les coutumes de l’Eglise catholique et oui, parmi eux, il s’en trouve de plus en plus qui, arrivant aux mêmes conclusions que les catholiques, s’interrogent sur le sens de leur vie et la raison de leur destinée. Chère Marguerite, évidemment, je vous espère d’en arriver, non pas seulement « sur certains points » mais sur tous les points, aux mêmes conclusions que la Tradition de l’Eglise.

Ce n’est pas tout. Votre témoignage transparent manifeste combien Dieu écrit droit avec des lignes courbes. « En creusant le sujet trans, j’ai compris que le transgenrisme était une forme de transhumanisme où l’être humain se comporte comme son propre créateur. Cela m’effraie car que fait-on de l’inconnu, de l’enchantement, du mystère, de ce qui nous dépasse ? » confiez-vous. Le Christ affirme dans l’Evangile : « Je suis la voie, la vérité et la vie » (Jn 14, 6) et de préciser durant sa discussion privée avec Pilate : « Quiconque est de la vérité écoute ma voix » (Jn 18, 37). La féministe radicale que vous avez été, par des chemins de traverse, en est arrivée à formuler ce pardon. Le prêtre que je suis y voit un motif supplémentaire d’espérance.

Ah ma chère Marguerite ! Je vous souhaite – si vous saviez comme je vous le souhaite ! – de rencontrer Jésus. La recherche honnête du vrai, du bien, du bon et du juste mène l’âme, inexorablement et parfois malgré elle, à rejoindre la voie du Christ, à embrasser la vérité et à vivre de sa vie surnaturelle. Vous l’avez dit avec une franchise confondante : « Il arrive que l’on aime mal ». Je ne prétendrais pas, pour ma part, aimer convenablement le Bon Dieu. Qui pourrait, du reste, s’en prévaloir ? Mais je sais, par la Foi, qu’en se mettant à son école, il est possible d’envisager d’aimer mieux. J’espère de grand cœur que vous aurez la possibilité un jour, voire prochainement, de le contempler à l’œuvre ce bon Dieu d’amour, dans le cœur de saintes femmes. J’en connais et j’en vois autour de moi. On ne parle pas d’elles. Elles ne font pas la une des magazines féminins. Elles ne posent pas pour des publicités proposant des produits de luxe inabordables. Elles sont plus humbles mais tellement extraordinaires. Elles sont le plus souvent écartelées entre leurs enfants, leur mari et une vie professionnelle harassante, car un seul salaire suffit rarement à faire vivre une famille. Elles sont parfois mères au foyer, parfois au couvent, mais dans les deux cas elles subissent l’incompréhension – quand ce n’est pas la réprobation – du monde actuel. Ces saintes femmes, ce sont des mères de familles courageuses qui tentent de préserver leurs petits des horreurs du wokisme. Des épouses fidèles, sentinelles de l’Invisible, soucieuses de leur rôle pour préserver la paix du foyer et entretenir la joie familiale. Ce sont encore des religieuses, qui ont donné leur vie, librement, pour chanter les louanges du Seigneur du cœur de la nuit jusqu’à la tombée du jour. A l’occasion, peut-être, aurez-vous la possibilité de vous arrêter dans une de ces abbayes féminines. Allez chère Marguerite, allez visiter les cisterciennes de Boulaur ou les bénédictines du Barroux ! Profitez de leur hôtellerie durant quelques jours, vous serez touchée par leur accueil évangélique, leur vie verticale et ce fluide mystérieux qui donne à leur visage ce reflet indéfinissable de divin. Vous découvrirez qu’il jaillit dans les profondeurs de l’intimité prolongée du cœur-à-cœur avec Dieu. Vous verrez comme ces consacrées attestent, avec une grâce sans pareille, combien la féminité devient plénière lorsqu’elle est vécue dans une amitié intense avec le Créateur.

Chère Marguerite, vous avez dit bien des choses dans votre courageuse intervention publique et il y aurait encore beaucoup à vous partager si je m’arrêtais sur chacune de vos phrases. Je crains cependant que cette lettre ouverte se charge inutilement lorsqu’elle voudrait, au contraire, contribuer à rendre votre cœur léger. Mais puisque nous nous trouvons au début du mois de novembre, mois dédié dans la Tradition de l’Eglise à la prière pour nos chers défunts, je voulais terminer ces lignes en vous disant que votre témoignage sur les obsèques de Philippine et la prise de conscience qui en a résulté pour vous, m’a paru très fort. Merci d’avoir eu la simplicité de le confesser. Avec Cocteau, nous savons que « Le tombeau des morts, c’est le cœur des vivants ». Je suis certain, chère Marguerite, que Philippine intercédera depuis son éternité à vos intentions auprès de Dieu. Et que votre cœur s’en trouvera béni.

En vous assurant de ma prière, je me permets de me confier aux vôtres.

Bien respectueusement à vous,

Père Danziec +

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