D'Aymeric Pourbaix dans Famille chrétienne :
"Combien d’attentats faudra-t-il pour que l’Europe comprenne ? Après les attentats de Copenhague, un mois après Paris, Manuel Valls a redit son intention de « mobiliser la société autour de la laïcité », afin, dit-il, de combattre « l’islamo-fascisme ». Le Premier ministre est à l’unisson de la quasi-totalité des partis politiques français, pour qui la laïcité reste l’unique et fragile ligne de défense face à l’islamisme. Au risque de mettre toutes les religions sur le même plan. Et d’oublier surtout que cette fameuse laïcité, en France, est orpheline.
Qui osera donc, parmi les clercs, rompre le silence et rappeler la paternité de l’Église sur cette distinction essentielle entre spirituel et temporel ? Pendant que nous nous taisons, les pierres crient. Comme en Libye, où le sang des vingt et un chrétiens coptes décapités « confesse le Christ », ainsi que l’a dit le pape…
Face à ce défi, le risque serait celui du découragement : trop de contentieux entre l’Église et la République depuis deux siècles pour espérer un jour inverser la vapeur… Reste la prière, et encore, sans trop oser y croire. Là réside, précisément, notre manque de foi. « Ça ne sert à rien de prier », disaient ainsi les villageois de Pontmain, en Mayenne, menacés par les Prussiens en 1871. Quatre jours plus tard, l’armistice était signé, l’armée prussienne arrêtée aux portes de Laval. Mais il aura fallu l’insistance de la Sainte Vierge : « Mais priez mes enfants, Dieu vous exaucera en peu de temps, mon fils se laisse toucher ».
Un an plus tard, pour conjurer les malheurs de la France, l’enthousiasme rallie les catholiques autour de toutes les bannières mariales de France, pour une immense Manifestation de foi et d’espérance, en octobre 1872, qui réunit soixante-dix mille personnes dans un autre village perdu, Lourdes.
Qu’on le veuille ou non, c’est la foi catholique qui constitue le ciment de l’Histoire de France. Ses racines sont donc dans le Ciel, plus encore que dans sa terre. Dès lors, le sursaut attendu ne trouvera son ferment que dans une foi ardente. Et probablement pas d’une manière éclatante, au moyen d’un homme providentiel et médiatique. Mais dans l’ombre et l’humilité des périphéries. « La noblesse, écrivait Jean Guitton, en ces temps d’inflation des valeurs, semble s’être cachée dans des âmes modestes et inconnues, et d’abord d’elles-mêmes. » Jeanne d’Arc n’était qu’une petite bergère, Bernadette une paysanne inculte… Mais cette humilité laissait la place en elles à la grâce toute puissante. Pourquoi ne pas reprendre l’usage des « quarante jours de prière » à une intention spéciale, abandonné à nos frères protestants évangéliques ?
Les vrais pessimistes sont ainsi ceux qui ne croient plus à la sainteté ni à la force de la prière. Alors que les âmes confiantes, elles, comme l’a dit à Paray-le-Monial Notre-Seigneur à sainte Marguerite-Marie Alacocque, sont « des voleuses de grâces »."