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Bioéthique

PMA : Les droits des enfants subordonnés à la volonté d’adultes

PMA : Les droits des enfants subordonnés à la volonté d’adultes

Nicolas Bauer, chercheur associé au European Centre for Law and Justice (ECLJ) et doctorant en droit à l’université de Strasbourg, décrypte dans Le Figarovox le chapitre II du projet de loi bioéthique, sur le besoin des enfants nés par PMA de connaître leurs origines. Extrait :

[…] Son objet est en effet de «reconnaître et sécuriser les droits des enfants nés d’assistance médicale à la procréation». Dans son état actuel, ce chapitre II est cependant bien insuffisant, et ce pour deux raisons principales.

D’une part, les enfants issus d’un don de gamètes devront attendre leur majorité pour connaître leurs origines biologiques. Or, les témoignages diffusés par «PMAnonyme» montrent que leur quête existentielle commence dès l’enfance ou l’adolescence, lorsqu’ils comprennent que l’homme qui les éduque n’est pas leur géniteur. C’est par ailleurs dès la naissance que la Convention internationale des droits de l’enfant reconnaît le droit de connaître ses parents biologiques.

D’autre part, le dévoilement de l’identité du parent biologique inconnu dépendra du consentement de ce parent. Autrement dit, l’enfant saura à ses 18 ans si l’homme qui a donné son sperme avait consenti à révéler son identité. En l’absence de ce consentement, la personne née par PMA devra se contenter de «données non identifiantes» sur son père biologique, comme son âge ou ces caractéristiques physiques. Cela constitue une inégalité entre les enfants, organisée avant leur naissance.

Pourquoi le législateur souhaite-t-il poser ces conditions à la levée d’anonymat des donneurs? Il est évident que ce n’est pas en vue du bien des enfants. Elles remplissent un autre objectif: rassurer les couples ou femmes seules «receveurs» et les donneurs de gamètes. Les contrats qu’ils signent continueront de l’emporter sur les préoccupations identitaires de l’enfant conçu. Les droits de cet enfant resteront ainsi subordonnés à la volonté d’adultes.

Le chapitre II du projet de loi de bioéthique ne permet donc pas réellement de protéger les droits des personnes nées de tiers donneurs. Le législateur méprise leur quête d’origines jusqu’à leurs 18 ans ; puis, à leur majorité, il fait dépendre leurs droits du bon vouloir d’un tiers. Cela est contraire au principe même de toutes les conventions internationales protégeant les droits de l’homme, qui font reposer ceux-ci sur la dignité humaine et non sur la volonté d’un autre.

Au-delà de cette question de connaissance des origines, il y a celle de l’établissement de la filiation biologique. En effet, la Convention internationale des droits de l’enfant rappelle le droit, dès la naissance, non seulement de connaître ses parents biologiques mais aussi d’être élevé par eux (art. 7). La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a également reconnu «le droit de connaître et de faire reconnaître son ascendance» (Pascaud c. France, § 59).

Force est de constater que la PMA avec tiers donneur crée délibérément une situation dans laquelle l’enfant ne pourra jamais exercer pleinement ce droit. La violation des droits de l’enfant n’est donc pas causée uniquement par les modalités du don de gamètes (anonymat ou non du donneur), mais aussi par son objet. Par essence, cette technique de PMA prive sciemment l’enfant de l’établissement de sa filiation biologique.

C’est donc la PMA avec donneur elle-même qui envoie ce message aux enfants: «votre filiation et votre bien passent après la planification familiale de ceux qui vous éduquent». Ce message a même été intériorisé par une partie de ces enfants, comme l’a montré la thèse de la Britannique Joanna Rose. Ils sont en effet tenus par une «dette existentielle»: la PMA avec donneur viole leurs droits, mais leur a permis d’exister. Ils se sentent donc ingrats de la critiquer. […]

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1 commentaire

  1. Il y a eu plusieurs articles sur ce sujet, publiés par l’ECLJ ou Juristes pour l’Enfance, et qui génèrent un grande frustration chez les lecteurs comme moi qui ne sont pas experts en droit. Si cette violation de la Convention Internationale des droits de l’enfant est avérée, comment une loi de bioéthique française peut-elle être autorisée? A quoi servent toutes ces lois et conventions si elles peuvent se contredire? Que peut-on faire et qui peut le faire? Quelle Cour ou quel Conseil saisir pour faire valoir ces contradictions? Ne pourrait-il pas y avoir un article pour expliquer ce fait étrange, ou alors doit-on admettre tout simplement que la mise en évidence de cette contradiction n’a d’effet qu’avant la loi, à laquelle il faut ensuite se résigner?

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