Nous avons tous le même schéma socio-historique en tête : la modernité (exode rural, éducation) a conduit à la baisse de la pratique religieuse, qui a à son tour entraîné une baisse de la fécondité.
Une étude signée de Mary Eberstadt dans le dernier numéro de la Hoover Policy Review remet en cause cette idée reçue : et si c’était la baisse de la fécondité qui précédait la baisse de la pratique religieuse ? Et si le fait d’avoir une famille nombreuse poussait à la pratique religieuse, plus encore que l’inverse ?
Le point de départ de Mme Eberstadt est que
…chronologiquement, [la baisse de la fécondité] a précédé [celle de la pratique religieuse] en Europe occidentale, au moins dans certains cas.
Mme Eberstadt ne nie toutefois pas l’évidence :
Bien sûr, il ne fait aucun doute que certaines personnes cherchent à avoir plus d’enfants parce qu’il s’y sentent religieusement "appelés."
Mais la corrélation entre "famille nombreuse" et "pratique religieuse" se retrouve pas seulement dans le catholicisme, mais dans le protestantisme évangélique et le judaïsme orthodoxe, qui autorisent la contraception.
Si sa thèse est la bonne, et si la relation de causalité est inverse de celle communément admise,
… qu’est-ce qui, dans l’expérience de la famille naturelle, pourrait rendre un individu plus tourné vers la religion que sans cette expérience ? […]
D’abord, il a le fait phénoménologique de l’effet produit par une naissance chez de nombreux pères – et presque toutes les mères. Ce moment […] est habituellement ressenti par de nombreuses personnes comme un événement plus transcendant que tout autre.
Mais au fait, pourquoi l’ordre de cette corrélation aurait-il une importance ? Mme Eberstadt pense qu’elle indiquerait que la baisse de la pratique religieuse en Occident n’est pas une fatalité, car elle ne découle pas directement de la hausse du niveau de vie ou d’éducation.
Mais qu’il n’y ait pas de fatalité, on le savait déjà : l’Esprit souffle où Il veut (Jn 3,8).
Henri Védas (via NRO)