Dissident chinois, Liao Yiwu a vécu arrestations, harcèlement, quatre ans de prison avec tortures. A 62 ans, cet écrivain et poète exilé à Berlin, souvent comparé à Soljenitsyne, dresse un constat accablant du régime et de sa gestion de la crise sanitaire. Dans Paris Match il évoque la crise sanitaire :
[…] Je ne suis pas croyant, mais j’ai l’impression que tous ces morts dans les pays libres sont une punition du ciel. Ce monde est un monde sans foi. Sa seule morale, c’est le commerce et l’économie. C’est pour cela que nous avons été punis. Ce virus de Wuhan, c’est notre Tchernobyl. Mais alors que ce drame a été relativement circonscrit, le Covid-19, lui, s’est répandu sur toute la planète. […]
Le confinement de Wuhan a commencé le 23 janvier. Quelques jours après, plusieurs dizaines de villes chinoises, Pékin, Shanghai, etc. étaient confinées, les voyages intérieurs arrêtés… Mais pas les vols extérieurs. Des dizaines de milliers de Chinois et d’étrangers ont alors quitté le pays pour se rendre en Italie, en Allemagne, en France, aux Etats-Unis, dans une absence générale de prise de conscience. Le monde avait confiance en l’OMS qui répétait qu’il n’y avait pas de transmission du virus de l’homme à l’homme. Je pense que le gouvernement chinois avait une arrière-pensée. Permettre à tant de voyageurs de se rendre en Occident n’était pas un hasard… […]
Aujourd’hui, le niveau scientifique des Chinois est pratiquement équivalent à celui des Américains. Pour en arriver là, ils ont employé tous les moyens possibles. Ils ont fait de l’espionnage économique, industriel, scientifique, menant ce qu’ils appellent “une guerre tous azimuts”. La situation est beaucoup plus grave que ne l’annonçait Orwell dans “1984”. D’une certaine façon, je suis en train de réécrire ce que lui ou Soljenitsyne ont déjà écrit. […]
Beaucoup de spécialistes ont dit que ce virus était apparu naturellement. Ils peuvent se tromper… Personnellement, je rassemble toutes les informations qui sortent sur ce laboratoire P4, parce que je veux m’en servir pour mon prochain livre. Le problème, c’est le patient numéro 1. On est encore en train d’essayer de comprendre comment il a été contaminé. Tant qu’il n’y aura pas une équipe internationale et indépendante de chercheurs pour se rendre à Wuhan, on ne le saura pas. C’est un secret qui ressemble à celui de la Cité interdite. Tant qu’on ne peut pas y entrer, on ne sait pas. […]
[Xi Jinping] a organisé la domination de son pays comme un gardien organise sa prison. Nous n’avons pas eu un tel dirigeant depuis Mao. N’importe quel homme ordinaire, qui observerait son comportement, ne trouverait qu’un seul qualificatif : il est fou. Il considère tous les citoyens chinois comme des suspects potentiels. Tout le monde doit lui obéir. Il est le pire dictateur que le monde moderne ait jamais connu.